Dès le départ, la réforme du revenu de solidarité active (RSA) a été perçue comme un bouleversement pour les presque deux millions d’allocataires. La Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) avait par exemple fustigé, le 19 décembre 2024, une mesure « attentatoire aux droits humains », qui s’attaquait à la possibilité d’une « insertion sociale et professionnelle librement choisie », comme inscrit dans la charte sociale européenne.
Active depuis le 1er janvier 2025 à l’échelle nationale – elle a été testée pendant près de deux ans dans plusieurs localités -, cette évolution inscrite dans la loi plein-emploi de décembre 2023 contraint les allocataires à s’acquitter d’au moins quinze heures d’activité par semaine. Concrètement, ils sont dans l’obligation de prouver leurs heures passées à tenter une réinsertion, que ce soit par la rédaction de CV, de passages d’entretiens ou le suivi d’une formation.
Une suspension de 30 à 100 % pour un mois ou deux
Sans quoi ces derniers – désormais inscrits d’office à France Travail – feront face à une sanction nouvellement instaurée dans le cadre de cette réforme : « Suspension-remobilisation ». Les contours précis de cette sanction restaient jusqu’ici flous. Le journal le Monde et franceinfo ont eu accès au document envoyé par le ministère du Travail aux conseils départementaux pour en présenter les grandes lignes.
Selon ce dernier, dévoilé jeudi 20 mars, l’allocataire qui ne respecte pas ce contrat d’une quinzaine d’heures d’activité (le bénévolat et le travail dissimulé ne sont pas comptabilisés) pourrait voir son allocation être suspendue de 30 à 100 %, et ce, pour un mois ou deux.
Cette sanction représente le premier palier de cette réforme répressive. « Comme la loi le prévoit, si la situation se règle durant la période de la sanction, le montant sera versé rétroactivement, sinon il sera définitivement perdu », résume ainsi le Monde. Le document partagé par le gouvernement indique ensuite qu’une gradation des sanctions est prévue, « donnant des marges pour apprécier la gravité ».
Ainsi, la réforme du RSA permet à France Travail de suspendre une seconde fois le versement, toujours de 30 % à 100 %, mais pour un à quatre mois, ou la suppression totale sur le même laps de temps. De plus, la suppression totale pour quatre mois – soit la sanction la plus lourde indiquée dans le document – prend effet avec la radiation de l’allocataire de la liste des demandeurs d’emploi et de la liste des bénéficiaires du RSA.
Afin d’éviter ces sanctions, l’allocataire sera dans l’obligation de présenter un contrat d’engagement – la preuve de son activité de réinsertion et le nombre d’heures que cette dernière lui a demandé – élaboré selon les attentes ou actualisé. Selon les informations de franceinfo et du Monde, la réforme du RSA prévoit que ces obligations soient « adaptées en fonction du profil du demandeur d’emploi ».
De même, les sanctions seront appliquées selon « un faisceau d’indices de manquements ». La suspension des allocations sera notifiée dix jours avant sa mise en application ; un laps de temps qui s’allonge à trente jours pour une suppression. L’allocataire du RSA est ainsi censé pouvoir agir avant que la sanction ne soit effective. Ces dernières ne pourront, enfin, pas dépasser les 50 % de l’allocation en ce qui concerne un foyer composé de plusieurs individus.
Des « garde-fous » qui ne devraient pas rassurer tant les premiers concernés que les associations et syndicats ayant condamné cette réforme. Comme le rappelait un rapport publié lundi 14 octobre 2024 par le Secours catholique, le syndicat FSU, Emmaüs, la Fondation pour le logement des défavorisés (ex-Fondation abbé Pierre) et la Ligue des droits de l’Homme : « Le risque de glissement vers le travail gratuit » est prégnant.
Les auteurs soulignaient alors que les « effets de mise en concurrence avec des emplois publics comme privés, s’avéreraient contre-productifs en matière de création d’emplois » et pourraient « tirer le marché du travail vers le bas en matière de conditions de travail et de rémunération ». Encore une fois, ce sont les plus démunis qui sont sacrifiés sur l’autel de la productivité.
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