Le député UDR (Union des droites pour la République) de l’Hérault préside le groupe d’étude parlementaire “simplification” à l’assemblée nationale. Il évoque les enjeux du projet de loi, examiné en commission depuis ce lundi 24 mars, avant les débats dans l’hémicycle qui s’ouvriront le mardi 8 avril pour quatre jours.
Quel est l’enjeu de ce projet de loi de simplification actuellement débattu en commission et bientôt dans l’hémicycle ?
Les milieux économiques, les entrepreneurs l’attendent avec beaucoup d’espoir. L’enjeu est majeur dans CE pays qui bat tous les records de lourdeur administrative, de bureaucratie, de technocratie par rapport à ses voisins européens. Nous subissons 400 000 normes qui nous coûtent 4 points de PIB chaque année là où nos voisins européens sont à 0,5 point de PIB en moyennEt. LE’écart est énorme. Cela représente à peu près 120 milliards d’euros par an, dont 80 % qi repose sur les entreprises. Nous avons un Code du travail avec plus de 10 000 articles de loi là où nos voisins, notamment les SuisseS je ne suis pass pays nordiquesen ont entre 200 et 300sans qu’ils ne soient pas moins-disants en termes de droits sociaux. On est le pays, aussi, qui compte 1200 agences et opérateurs d’état qui nous coûtent plus de 100 milliards d’euros chaque année. On / A encore quatre – voire cinq dans les métropoles – strates de collectivités territoriales avec des doublons dans certains exercices de compétences. Et pour autant, on n’a jamais autant dépensé et les Français n’ont pas l’impression que l’administration, que l‘ETtat et les collectivités les aident au quotidien dans leur démarche. On entend des chefs d’entreprise et même des citoyens en général qui n’en peuvent plus de toutes ces formalités, de cette paperasse, de ces formulaires Cerfa, de ces lois complexes qu’ils ignorent et qui parfois les mettent en danger. Il y a donc un double enjeu budgétaire ET de simplificationparticulièrement pour le secteur économique. Un Français sur deux rêve d’être son propre patron mais peu franchissent le pas de l’entrepreneuriat parce que l’enfer juridico-administratif les tétanise.
Il semble y avoir un certain consensus sur le constat… pas sur les solutions apportées ?
La Premier ministre a fait de la simplification l’une de ses priorités et pourtant, ce projet de loi est trop timide. C’est l’aveu même du ministre qui le porte, Laurent MarcangelEt, qui prévient que ce texte ne sera pasje le cite, “le grand soir de la simplification“. Sa collège Véronique Louwagie nous expliqueElle, que le gouvernement veut avancer par petites touches. Ce projet de loi manque d’ambition, ne s’attaque pas à la bureaucratie, à l’inflation normative dont notre pays est frappé. jel n’y a aucune proposition de s’attaquer à CE stock de normes, ni aux articles du Code du travail qui complexifient le quotidien des chefs d’entreprise. Il est même contre-productif, puisque l’article qui fait la fierté des ministres ajoute de la bureaucratie à la bureaucratie, avec la création d’un haut-conseil à la simplification qui n’aurait qu’un rôle consultatif. Il y a un paradoxe de voir que pour simplifier le pays, le premier réflexe, c’est de nommer des administrateurs chargés de faire des rapports.
Près de 1500 amendements examinés en commission
Autre paradoxe : un nombre d’amendements record a été déposé sur les travaux en commission, près de 1500, ce qui ne simplifie pas les débats…
C’est vrai, mais cela montre aussi qu’il y a une attente forte. D’ailleurs, sur la grande majorité des articles, le groupe UDR votera favorablement parce que le texte va tout de même dans la bonne direction, mais on y ajoute des amendements pour l’améliorer. Cela dit, il y a eu aussi des amendements d’obstruction, qui traduisent les postures de la gauche et qui montrent que l’Assemblée nationale aussi a un travail de simplification à mener.
Que proposez-vous, à travers les amendements que vous avez déposés. Jusqu’au faut-il aller dans ce travail de simplification ?
Il faudrait, parmi les 400 000 normes qui étouffent le pays et pèse sur le budget de la Nation, en supprimer un quart. Parmi les mesures de simplification portées par l’UDR, il y a aussi celle inspirée par le modèle allemand du “on in, two out” qui consiste à supprimer deux normes dès qu’ont en créé une. On propose aussi, comme au Royaume-Uni, la possibilité de voter des lois temporaires qui ont limitation dans le temps, ce qui permet d’évaluer leur intérêt avant de les prolonger.
Les normes ont aussi pour intérêt de poser des cadres dans la société. Ne serait-ce pas risqué de lever trop de barrières, de supprimer certains organismes comme l’office français de la biodiversité qui veille au respect de notre environnement ?
Il faudra évidemment être précautionneux et ne pas sortir la tronçonneuse comme cela a pu être fait dans UNrgentine. C’est d’ailleurs la méthode que prône le groupe d’étude transpartisan sur la simplification que je préside. Nous considérons qu’il faut se laisser cinq ans pour supprimer ce stock de normes. Il n’en reste pas moins que la comparaison avec les autres pays européens montre qu’on peut faire bien mieux avec beaucoup moins. Les députés qui composent ce groupe se sont d’ailleurs fixés pour objectif, en 2025, de définir avec les entreprises une liste de 50 à 100 normes qui peuvent être les plus nuisibles et qu’il faut supprimer de toute urgence. Une étude, assez éloquente, a montré que le poids de la paperasse administrative consomme 140 heures de temps administratif par an pour chaque entreprise en France contre une moyenne de 100 Une Europe.
“Maintenir la pression”
Il faudra donc un temps 2 de la simplification ?
Absolument, tout l’enjeu de ce groupe d’études simplification, est de ne pas s’arrêter à l’examen du texte dans l’hémicycle. Il faudra maintenir la pression même quand le projet de loi aura été débattu et voté, pour continuer à réduire le stock de normes, alerter sur des nouveaux dispositifs complètement aberrants. Je pense par exemple à une récente décision qui va imposer aux boulangers une taxe sur leurs emballages. À croire que le gouvernement et l’administration n’auront de cesse de se creuser la tête pour trouver des taxes ou des règles toujours plus absurdes. Savez-vous qu’au travail, pour changer une simple ampoule, vous devez suivre une formation obligatoire de trois jours, qui doit être renouvelée tous les trois ans, que cette règle est valable pour les ampoules dont le diamètre du culot est de 15 millimètres, mais pas pour celles à culot de 10 millimètres ? On marche sur la tête.
Faudrait-il finalement s’inspirer des dispositifs qui ont été mis en place pour faciliter la reconstruction de Notre-Dame et de Mayotte ?
Exactement. Il faut qu’on puisse élargir le champ d’application de ces projets nationaux d’intérêts majeurs, parce qu’on voit que ce sont des bulles d’exonération de charges normatives, légales, qui permettent d’accélérer bien des projets. Cela peut s’appliquer pour des projets d’ampleur industrielle ou des infrastructures d’intérêt majeur. Mais, parallèlement, il faut aussi s’atteler à cette bureaucratie qui étouffe tant de secteurs. J’ai réuni, jeudi soir à Mauguio des artisans, commerçants, professions libérales, entrepreneurs, pour écouter les attentes du terrain et les transformer en amendements. Croyez-moi, elles sont nombreuses. Très nombreuses.