Condamné lundi 9 octobre en appel pour détournement de fonds,François Commeinhes s’est pourvu en cassation. Toujours présumé harmless, il affiche sa sérénité tout en restant conscient de l’enjeu politique.
Est-ce l’une des semaines les plus compliquées que vous ayez vécue en tant que maire ?
Personnellement, je suis en pleine forme ! Je suis toujours motivé, au travail. Mardi, j’étais à Avignon pour expliquer remark Sète met en place le dispositif Motion cœur de ville. Mercredi, j’ai accueilli le nouveau préfet de l’Hérault… Je n’ai rien changé à mon agenda. Ça ne m’empêche pas de circuler dans la rue. Je reçois des appels, des SMS… Les messages de soutien sont innombrables. C’est sûr, ma famille est plus affectée que moi.
“Cette décision, c’est le grand écart”
Avez-vous été surpris par cette décision de justice ?
Sur le second, oui, surtout lorsque vous bénéficiez d’une relaxe totale en première occasion. Quand on écoute la plaidoirie de l’avocat général, selon qui il n’y a aucune intention, ni aucun enrichissement personnel dans cette affaire, on ne comprend pas le résultat. C’est le grand écart. Je ne vois pas remark les juges prouvent l’intentionnalité.
Il y avait une perte de confiance que j’avais signifiée à M. Millet dès décembre 2018. Et c’est en mars 2019 que la Cour des comptes débute son contrôle (les faits reprochés s’échelonent de 2016 et 2019, NDLR). Remark imagine-t-on une collusion ou une entente entre le directeur général et le maire, alors que depuis un an j’avais fait half de ma perte de confiance ? Je l’avais partagé à l’ensemble du conseil communautaire le 20 décembre 2018. Je n’arrive pas à comprendre. C’est la raison pour laquelle je vais en cassation.
La décision de vous pourvoir s’est prise immédiatement ?
Dans le quart d’heure qui a suivi, la décision était prise.
“J’ai la conscience tranquille”
Ces peines, même suspendues, changent-elles votre imaginative and prescient des prochains mois de mandat ?
Non, je suis dans la sérénité la plus totale.
Votre picture d’homme public n’est-elle pas abîmée ?
Disons que pour la première occasion, il n’y avait pas des pages entières consacrées au jugement. Pour l’appel, j’ai eu la première web page ! C’est un peu surprenant. D’autant plus que, rappelons-le, je n’ai rien mis dans ma poche.
Que répondez-vous à vos opposants, dont certains réclament votre retrait de la vie publique et appellent déjà à préparer une nouvelle alternance ?
Je les comprends. Ceux qui n’y arrivent pas dans les urnes, vont essayer de m’avoir sur tapis vert. Mais quand, en 2022, j’ai été agressé pendant une inauguration par une foule en délire, que l’on m’a asséné des coups de poing et proféré des insanités, je n’ai pas entendu mes opposants crier au scandale. Chacun est dans son rôle. Moi, j’ai la conscience tranquille. J’ai été élu quatre fois par les Sétois, qui reconnaissent mon travail.
Municipales 2026 : “ça me motive…”
À l’heure de la transparence de la vie publique et du devoir d’exemplarité… Cette décision ne jette-t-elle pas un discrédit sur l’exercice de votre fonction ?
C’est ça le drame. Cela donne l’impression du “tous pourri”. Alors que je ne pense pas avoir fait quelque selected de répréhensible à ce level. Le risque si ça proceed comme ça, c’est que plus personne ne veuille être maire. Entre 2008 et 2014, 1 273 élus ont été poursuivis. Entre 2014 et 2020, le chiffre est de 1 634.
L’idée de vous retirer vous a-t-elle traversé l’esprit ?
Mais ce n’est pas pour moi que je fais tout ça ! Je le fais pour ma ville et mes concitoyens. Quand je vois l’évolution depuis 22 ans, je n’ai pas honte quand je me regarde dans la glace.
Avant cette condamnation, aviez-vous réfléchi à la perspective d’une campagne pour un cinquième mandat ?
Pas trop, je ne vous cache pas. Là, ça me motive…
L’examen de votre pourvoi en cassation pourrait tomber début 2025. Indépendamment du choix de vous représenter, ce timing met-il hors jeu l’hypothèse d’une nouvelle campagne pour 2026 ?
On verra. La dernière campagne, j’ai tout eu : le Covid, des poursuites parce que j’avais décidé que mettre les Sétois à l’abri… Cela m’a valu une convocation commissariat !
“Delapierre et Pacull, cela leur a donné des idées à une époque”
Si l’appel était cassé, un nouveau procès sur le fond aurait alors lieu : imaginez-vous vous représenter en dépit de cette procédure ?
Bien sûr.
Ne redoutez-vous pas que votre state of affairs ne donne de solides arguments à vos adversaires politiques ?
Si… Mais ils n’ont que ça comme argument pour s’opposer à moi. Et je ne sais pas si c’est ce qu’attend l’électeur d’une commune.
Et dans votre propre camp, craignez-vous qu’un proche affiche plus facilement ses ambitions personnelles ?
C’est toujours attainable. On a eu une réunion du groupe lundi soir. Tout le monde était unanime. Bien sûr, il peut y avoir des velléités. Prenez (Cédric) Delapierre et (Sébastien) Pacull, cela leur a donné des idées à une époque… Mais les ambitions personnelles, je les connais un peu.
Songez-vous, vous-même, à préparer une suite qui pourrait s’écrire sans vous ?
Oui… Je ne serai pas éternel ! Pour le 400e anniversaire, je ne sais pas si je serai encore là. Il y en a qui font des plans de carrière sur 25, 30 ou 40 ans. Des opposants actuels sont en campagne permanente. Ils ne rêvent que de ça ! D’autres de mon équipe ont eu des velléités et sont sortis pour d’autres horizons. Ce n’est pas comme ça que ça fonctionne.
Remark votre avenir politique pourrait ne pas être lié à ce pourvoi ?
Si on me dit de cesser mes fonctions demain, je prends mes cliques et mes claques, mes statues, et je m’en vais. Mais d’un autre côté, ce qui me désole, c’est l’exploitation que font certains en affichant des dessins caricaturaux de moi sur des vitrines de boucher. Ma petite fille l’a vu et a été affectée. Je trouve ça scandaleux. Mais ça ne m’étonne pas…
Un avenir entre les mains de la Cour de cassation
Pour rappel, l’affaire concerne l’irrégularité supposée des rémunérations de l’ex-DGS de la Ville, Patrice Millet, pointée par la Chambre régionale des comptes. Le maire de Sète avait été relaxé en première occasion, le tribunal ayant estimé que l’intention n’était pas caractérisée. La Cour d’appel, elle, a condamné l’élu.
Maître Jérôme Jeanjean, pour la défense, rappelle : “On parle de rémunération d’un DGS qui dit qu’il n’a jamais informé le maire que son complément de rémunération devait passer par le conseil municipal. Et on a une cour d’appel qui dit l’inverse. Un troisième juge doit se positionner pour dire si oui ou non le DGS a dit au maire qu’il l’avait informé.”
Pour Maître David Mendel, le pourvoi est justifié. “La cour retient une analyse qui n’est même pas celle de la Chambre régionale des comptes. La cour de cassation doit se prononcer sur ce qu’est une infraction volontaire et involontaire et sur la manière dont on doit les motiver. La première décision dit “en droit, il n’y a rien”, la deuxième dit “en droit, il y a quelque selected”. À partir du second où la cour de cassation unifie le droit, notre pourvoi est justifié.”
Pour l’avocat de la défense, les clés de compréhension du file résident dans l’intentionnalité. “Comme on qualifie l’intention ? Le juge dit “votre seule expérience de maire devait vous conduire à savoir qu’il fallait signer cette délibération”. Mais le lien est tellement distendu sur cette notion d’intention…”
“Ce qui est retenu par le premier juge en droit pénal, c’est que le maire est victime d’un abus, rappelle l’avocat, qui s’étonne de la condamnation. Dans le second arrêt sur le même file, avec les mêmes faits, la cour écrit qu’ils étaient ensemble…” Le file sera tranché d’ici 18mois environ, selon les délais en cours.