Les regards devraient se tourner vers le dénuement le plus total qui touche Mayotte depuis le passage du cyclone Chido, le 5 décembre dernier. Pourtant, la droite préfère concentrer ses efforts sur la seule question migratoire, quitte à s’attaquer à un des piliers de la République.
Ce jeudi, à l’occasion de la niche parlementaire des « Républicains », la proposition de loi portée par la droite pour restreindre le droit du sol dans le département ultramarin a été adoptée. Un texte qui prétend réduire les flux migratoires illégaux provenant des Comores.
Les débats ont été vifs. Les représentants de droite et d’extrême droite se sont employés à dénoncer la « menace » que constituerait l’immigration pour la population mahoraise, en reprenant notamment la formule de François Bayrou sur une prétendue « submersion migratoire ». « Les enfants sont utilisés comme des passeports ! » persifle la députée Liot de Mayotte, Estelle Youssouffa, sous-entendant que donner naissance à un enfant sur l’archipel donnerait un droit automatique à la nationalité française.
Une affirmation bien éloignée de la vérité. « Pour demander la nationalité française en émigrant à Mayotte, même en donnant naissance à un enfant sur son territoire, il faut remplir un nombre de conditions dingues, analyse le juriste Jules Lepoutre, spécialiste de la question. D’abord, il faut avoir été régularisé avant la naissance. Et pour l’enfant, la demande de nationalité ne peut se faire qu’à partir de ses 13 ans. Et même en l’obtenant, cela ne permet pas aux parents d’accéder à la nationalité. »
« Pour la droite, la France doit cesser d’être une terre d’accueil »
En 2018, une réforme visant à restreindre le droit du sol avait déjà été portée par l’ancien sénateur macroniste, Thani Mohamed Soilihi. Depuis, un enfant né à Mayotte ne peut donc obtenir la nationalité française que si l’un de ses parents réside légalement sur le territoire depuis au moins trois mois avant sa naissance. La proposition de loi LR étend désormais ces conditions aux deux parents et un amendement du groupe d’Éric Ciotti allonge la durée à trois ans. Sauf que, « faute de données, rien ne prouve que la précédente réforme a limité l’immigration. En faire une nouvelle ne mènera à rien », affirme Jules Lepoutre.
À gauche, la députée écologiste Sandrine Rousseau a été parmi les parlementaires les plus offensifs pour dénoncer les sombres projets du camp gouvernemental et de ses alliés de circonstance. « Vous vous servez de Mayotte comme cheval de Troie pour remettre en question le droit du sol sur l’ensemble du territoire français et nos droits fondamentaux », a-t-elle asséné. Un avis que partage le député GDR Davy Rimane : « Mayotte est abandonnée depuis des années, elle est sous-investie par rapport au reste de la France, et on veut remettre la faute sur les immigrés ? Pour la droite, la France doit cesser d’être une terre d’accueil. »
Des reproches que le député LR Hubert Brigand esquive… tout en chargeant violemment les immigrés. « Face aux étrangers qui sont de plus en plus nombreux, les Mahorais sont démunis. Que ce soit dans l’accès aux services publics, aux soins, aux logements, à l’éducation, à l’eau potable… » nous explique-t-il. Désigner un bouc émissaire n’aidera pourtant en rien à résoudre la crise à Mayotte.
Face à l’extrême droite, ne rien lâcher !
C’est pied à pied, argument contre argument qu’il faut combattre l’extrême droite. Et c’est ce que nous faisons chaque jour dans l’Humanité.
Face aux attaques incessantes des racistes et des porteurs de haine : soutenez-nous ! Ensemble, faisons entendre une autre voix dans ce débat public toujours plus nauséabond.Je veux en savoir plus.