« Je veux que cela soit achevé d’ici cinq années. » Régalien jusque dans sa formulation, le vœu émis par Emmanuel Macron, au lendemain de la terrible soirée du 15 avril 2019, a été réalisé. Et le président de la République n’escompte pas que quiconque l’empêche de capitaliser sur cette réussite : c’est lui, ce vendredi 6 décembre, qui aura la primeur de la révélation urbi et orbi (« à la ville et au monde ») des splendeurs de Notre-Dame ressuscitée.
Les autres, tous les autres – le pape, lui, a décliné – passeront après, aux cours des deux jours de cérémonie prévus les 7 et 8 décembre. Même l’archevêque de Paris, Laurent Ulrich, devra attendre ce samedi pour s’en aller frapper de sa crosse les portes de la cathédrale, consacrant par ce geste sa réouverture au culte catholique.
Des décisions unilatérales
Nimbée d’une modestie qui sonne bien faux, au milieu de caméras retransmettant l’événement sur tous les écrans du monde, cette « visite de chantier » apparaît aussi comme une revanche. Le 15 avril 2019, Emmanuel Macron devait présenter aux Français ses conclusions tirées du « grand débat » organisé pour tenter de trouver une issue à la crise des gilets jaunes.
Cet objectif, comme son allocution enregistrée au moment où l’incendie se déclarait, avait été emporté par les flammes. Et remplacé par ce défi insensé d’une reconstruction en cinq ans, derrière quoi le pays était censé se rassembler, au nom du patrimoine – auquel les Français sont attachés, leur participation au financement des travaux en atteste.
Pour y parvenir, Macron le thaumaturge avait besoin d’un entremetteur : ce sera le général Jean-Louis Georgelin, ancien chef d’état-major des armées et catholique féru de patrimoine, nommé sans discussion à la tête de l’établissement public créé tout spécialement pour la reconstruction.
Le choix de la restauration à l’identique, ce sera le sien plus encore que celui du président de la République, sans discussion là non plus. Sans discussion les choix, sans discussion non plus le rythme du chantier, à marche forcée sous la férule du général en retraite (décédé avant la fin du chantier, en août 2023). Les milliers d’ouvriers, d’artisans, de compagnons, d’ingénieurs, d’architectes ont payé pour le savoir, tout comme le ministère de la Culture, réduit à jouer les utilités.
Mais la vie est injuste : le locataire de l’Élysée vient de se faire méchamment sonner les cloches à l’Assemblée et, à défaut de flammes, c’est la débâcle de la motion de censure qui pourrait emporter ses rêves d’assomption républicaine. C’est que les Français ne sont pas forcément enclins à absoudre celui qui, depuis plus de sept ans, transforme méthodiquement leur vie en scène digne de la cour des miracles.
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