Stephan Steinlein, ambassadeur d’Allemagne en France depuis l’été 2023, participera à la cérémonie d’ouverture de la Quinzaine franco-allemande en Occitanie, ce jeudi 21 mars à Millau.
Dans le contexte géo-politique actuel, la relation franco-allemande s’avère-t-elle plus vitale que jamais ?
Absolument. Nous vivons actuellement un tournant dans l’ordre international, dont l’enjeu va bien au-delà de la guerre en Ukraine. Ce n’est pas pour rien que nous parlons en Allemagne d’un “changement d’époque”, qui est loin de se limiter à des investissements dans le domaine de la défense.
La France et l’Allemagne, en tant que plus grands États membres de l’UE et en raison de leur coopération extrêmement étroite, ont une responsabilité particulière : nous devons veiller à ce que nos démocraties demeurent résilientes. Nous devons faire en sorte de pouvoir défendre nos valeurs et notre liberté face aux attaques de ceux à qui nos sociétés ouvertes déplaisent.
Ce n’est pas une tâche facile, et il y a parfois des frictions, mais nos deux pays partagent la même analyse et sont conscients que c’est vital pour l’Europe.
Parce que le couple qu’ils forment reste malgré tout le socle de l’UE ?
Je suis convaincu qu’il n’y a pas d’alternative au socle franco-allemand en Europe. Ce socle va d’ailleurs bien au-delà de l’entente politique à l’échelle gouvernementale. Il est aussi le fruit d’une étroite imbrication de nos populations et de nos économies. Cette conviction est d’ailleurs partagée non seulement par les gouvernements de Paris et de Berlin, mais également par les autres États membres de l’UE. Sans accord franco-allemand, rien ne va plus.
La volonté permanente de parvenir à des compromis – même si nos deux pays ont des cultures politiques très différentes – est essentielle pour faire progresser l’UE.
Le fait que des échanges aussi permanents voient parfois des divergences apparaître est le signe que notre partenariat repose sur des bases si solides que nous pouvons aborder ouvertement tous les sujets, même si cela n’est pas toujours du goût de l’autre.
Quels liens entre les deux pays pourraient être encore renforcés ? Sur le plan des échanges culturels, ou de l’apprentissage de la langue ?
Parce que la coopération à l’échelle de la société civile constitue pour moi le ciment de notre amitié, la question de la langue est déterminante. Nous ne pouvons être satisfaits sachant que l’allemand n’est plus que la troisième langue étrangère choisie en France, loin derrière l’espagnol. Nous voulons lutter contre ce phénomène.
Je me réjouis que le gouvernement français ait pleinement conscience de ce problème et s’engage pour y remédier.
La Quinzaine franco-allemande en Occitanie débute ce jeudi. Quelle va être votre implication dans cet événement ?
Les manifestations comme la Quinzaine franco-allemande d’Occitanie sont très importantes à mes yeux. Les accords entre États, les relations diplomatiques, les orientations politiques communes sont une chose, mais ce qui fait réellement vivre les relations franco-allemandes c’est l’engagement des citoyens et citoyennes de nos deux pays. C’est à ce niveau que naît une véritable compréhension mutuelle, que se tissent des liens solides et souvent une authentique amitié.
De Millau à Sommières, 150 événements
Après une ouverture ce jeudi à Millau, à la Maison de la Région, la Quinzaine se clôturera le 4 avril à Sommières.
Et entre ces deux dates, ce sont environ 150 événements qui seront organisés sur l’ensemble du territoire. Sans souci d’exhaustivité, on mentionnera ici, notamment, ceux mis en place à l’IUT de Nîmes qui s’affiche aux couleurs de l’Allemagne pendant toute la durée de la Quinzaine, les opérations “Bas les Murs !” à voir un peu partout en région, la poésie à l’honneur de la Maison de Heidelberg à Montpellier (“Quand les poètes traduisent les poètes”) ce 23 mars, des projections de films sur l’ensemble du territoire, des propositions de découverte de la langue allemande, à Perpignan ou à Thuir, ou encore une conférence sur le développement durable urbain en France et en Allemagne à la Maison des relations internationales de Montpellier le 2 avril.
Sans oublier la rencontre entre l’ambassadeur d’Allemagne en France et les étudiants de la faculté de droit de Montpellier ce vendredi 22 mars à 10 h.
Chaque initiative, qu’elle soit modeste ou à plus grande échelle, y contribue. C’est pourquoi je tiens à remercier du fond du cœur toutes celles et tous ceux qui ont consacré du temps et de l’énergie, parfois depuis des mois, à la préparation de cette Quinzaine. Le programme proposé est très varié et attrayant.
Je suis ravi à la perspective de m’exprimer lors de la cérémonie d’ouverture et d’avoir l’occasion de mieux connaître cette magnifique région dans les fonctions d’ambassadeur d’Allemagne en France que j’occupe depuis l’an dernier.
Quel regard portez-vous personnellement sur la France ?
Mon lien avec la France est avant tout personnel et affectif. Ma femme est en effet française et mes enfants ont la double nationalité allemande et française. La France est ma deuxième patrie, l’endroit où je vis pour la deuxième fois de ma vie en tant qu’ambassadeur d’un État allemand.
Mais la France est également un poste particulièrement passionnant d’un point de vue professionnel. Sa culture du débat animé, son amour pour la littérature et la culture, l’histoire émotionnelle qui lie nos deux pays, tout cela fait de la France un endroit très spécial pour moi.