Le président du Rugby club nîmois, Steeve Calligaro, revient sur la dimension sociétale des clubs sportifs aujourd’hui.
D’où est venu le projet d’un village rugby dans les quartiers sensibles de Nîmes ?
Le rapport d’étonnement qu’on a fait quand on a pris le club, c’est qu’à Nîmes, il y a 300 passionnés de rugby, voire 500. Si on veut être ambitieux pour notre club, il faut qu’on “ratisse large” et que voir un match à Kaufmann devienne un spectacle, une expérience familiale. Mais cela concerne aussi un développement : il y a deux ans et demi, on a racheté la brasserie attenante, on a créé une SA, puis une SAS en novembre 2023. Qui nous a permis d’ouvrir le capital à de petits porteurs nîmois à hauteur de 75 %. Tout en créant le fonds de dotation Rugby Cœur Nîmes. Elle nous rend capable tant de faire des journées thématiques que de répondre à des appels à projets. Comme avec le village rugby et la préfecture. On se retrouve parfois confronté à une réalité d’enfants qui n’ont même pas de lignes de bus qui les relient au stade… Donc c’est nous qui venons à eux. Et c’est une initiative qui est amenée à durer, car la préfecture songe à installer des villages rugby dans le cadre de restructurations de friches industrielles, le temps des travaux.
S’impliquer dans la société est de plus en plus fréquent, voire indispensable, dans le monde du sport.
Il n’est pas possible, aujourd’hui, d’avoir un club sportif déconnecté des problématiques sociétales. Nous avons des business models qui reposent sur des partenariats privés, de la création de ressources propres, mais aussi de l’argent public. Quand on reçoit plus de 500 000 € de la part d’une mairie, on se sent un peu redevable quand même… De fait, un club dans une ville a une dimension sociétale et doit être présent dans les événements de la ville. On ne fait pas que progresser un club vers le professionnalisme, on diffuse les valeurs de ce sport, le seul sport de combat collectif mais où le respect de l’autre, de l’arbitre sont sanctuarisés et où il est impossible de marquer autrement un essai que par le collectif. Et il y a dans ses quartiers sensibles, une énergie revancharde qui colle parfaitement avec les sports de combat, où on peut avoir une sorte de défoulement organisé.
Aujourd’hui, où en est le club du RCN ?
Il y a trois piliers dans le projet du club : le rugby, en prospérant sur l’ADN de notre sport ; notre réseau de partenaires, avec 315 entreprises, réseau qu’on anime comme un réseau business avec des petits-déjeuners, des afterworks, des rencontres. Et nous avons le volet sociétal. J’ai grandi avec un club de Nîmes qui était dans le Top 16, qui était pleinement impliqué dans sa ville. Puis il a été déclassé, comme souvent dans les villes moyennes. Aujourd’hui, on est en Nationale 2, avec une ambition raisonnable de National. Depuis trois ans, on écrit une nouvelle histoire, forcément rajeunie, en termes de communication et de marketing : on a doublé le budget (2,8 M€ aujourd’hui, NDLR).
Un challenge d’autant que culturellement, on n’est pas dans une ville de rugby. C’est une terre de foot, très loin devant, un peu de handball – et encore, quand ça gagne – , mais il n’y a quasiment aucun petit Nîmois à qui on a mis un ballon dans les mains. Le rugby n’est pas proposé dans les milieux scolaires ou sociaux, souvent parce que cela nécessite des infrastructures, des gestes qui parfois font peur. C’est pour ça que se développent des formes de rugby, comme le rugby touché, qui peuvent infuser. Avec toujours, la volonté d’être inclusif.
Vous avez lancé une initiative d’ouverture de capital aux particuliers, à l’instar du Real Madrid en Espagne. Où en est le projet ?
Nous sommes en train de faire l’appel de fonds et la première assemblée générale aura lieu le 3 mai. Il y a aujourd’hui 102 petits porteurs qui ont acheté les 75 % de la SAS. L’assemblée générale sera constitutive, avec un bureau et un membre qui fera partie du comité de direction. C’est donc bien engagé. Il y a désormais tout un univers autour du club qui lui permettrait de monter en National, voire en Pro D2. Ne manque plus que le pétrole !
Les prochains villages rugby se tiendront le 24 avril à Pissevin, à l’’espace Vergnole ; le 8 mai au Mas de Mingue ; à Nemausus, route d’Arles le 5 juin ; à l’espace Vergnole le 19 juin et le 26 juin sur un lieu à définir.