Le télescopage des actualités est souvent révélateur. Ce mardi, alors que la Cour des comptes préconisait un nouveau tour de vis sur les finances publiques, la société anglo-américaine de gestion d’actifs Janus Hendersen révélait les données de son index des dividendes mondiaux. Contraste saisissant. En 2023, les grandes entreprises cotées en Bourse ont versé à leurs actionnaires 1 660 milliards de dollars de dividendes (1 517 milliards d’euros), pulvérisant tous les records établis. Un plus-haut historique lourd de sens.
Au banquet mondial des rentiers du système, certains secteurs ont profité plus que d’autres du festin. Les nouvelles technologies, oui, mais aussi le secteur bancaire. Surfant sur les décisions des banques centrales de relever leurs taux directeurs, pour, disaient ces dernières, contrer l’inflation galopante, les établissements de prêt ont augmenté considérablement le prix des crédits, excluant un grand nombre de demandeurs – notamment de l’accès à la propriété – en s’en mettant, « en même temps », plein les poches.
L’industrie automobile, elle, a augmenté sur un an les dividendes de ses actionnaires de près de 25 %. Loin, bien loin des impératifs écologiques qui exigent une réduction considérable de nos émissions globales de gaz à effet de serre.
En France, le CAC 40 a versé en 2023 près de 100 milliards d’euros de dividendes. Encore un record. Encore une preuve de l’échec cuisant de la stratégie du ruissellement. La suppression de l’impôt sur la fortune (ISF) devait pousser les ultra-riches à investir dans l’économie réelle ? En excluant les actifs financiers de la taxation sur le patrimoine, elle les a remplumés comme jamais. Emmanuel Macron s’était engagé à encadrer sévèrement les rachats d’actions ? Il n’en a rien été.
La stratégie qui vise à faire racheter par l’entreprise ses propres titres pour augmenter mécaniquement la valeur de ses actions a le vent en poupe. Taxer les dividendes, combattre l’évasion fiscale, rétablir l’ISF… les leviers existent pour mettre à contribution ceux qui « super-profitent » du système et de son iniquité. Mais en décidant, à nouveau, de trancher dans les finances publiques et les dépenses sociales pour renflouer les caisses, le gouvernement a choisi, sans ciller, de faire payer les plus modestes.