C’est un peu leur série Netflix à eux, un feuilleton rocambolesque dont ils suivent les rebondissements avec une gourmandise d’initié. Le petit monde des professionnels du « restructuring » (restructuration d’entreprise) est entré en ébullition depuis que Patrick Drahi, milliardaire des télécoms, a entamé un bras de fer avec ses créanciers pour renégocier une dette gargantuesque. À l’échelle mondiale, Altice (le nom de l’empire de Drahi) doit gérer une ardoise de 60 milliards d’euros, soit à peu de chose près le budget de l’Éducation nationale française.
Et, dans l’Hexagone, la dette d’Altice France s’élève à 24 milliards d’euros : c’est cette dernière qui fait en ce moment l’objet d’une restructuration, dont tous les experts s’accordent à dire qu’elle sort de l’ordinaire. « Cela fait vingt ans que je suis dans la partie, je n’ai jamais vu un niveau de dette pareil, assure un avocat parisien spécialisé en restructuring. C’est le syndrome du « too big to fail » : pendant des années, les banquiers ont prêté à Drahi, en partant du principe que s’ils arrêtaient de remettre au pot l’édifice s’écroulerait et qu’ils ne reverraient jamais la couleur de leur argent ! »
Pour comprendre comment on en est arrivé là, il faut remonter aux origines de la fortune de Patrick Drahi (5,4 milliards d’euros selon les estimations du magazine Forbes en juillet 2024). Son histoire officielle a tout du conte sur papier glacé : une enfance modeste mais heureuse, inondée par la lumière de Casablanca, au Maroc, où il est né en 1963 ; un talent inné pour les chiffres (on raconte qu’il corrigeait les copies de ses parents profs de maths quand il était gamin) ; le départ pour la France ; l’entrée à la prestigieuse École polytechnique ; puis la réussite, foudroyante…
Le plus beau coup de Drahi
Rien de tout cela n’est faux, mais laisse dans l’ombre le fondement de sa fortune : le goût pour