Une majorité des ex-employés constitués partie civile ont assisté, lundi 23 septembre, à la première audience du procès à Nanterre (Hauts-de-Seine) qui oppose l’État à la société d’intérim RSI. Ils étaient soutenus par le collectif des travailleurs sans papiers de Vitry-Île de France et l’intersyndicale du ministère du Travail pour affirmer leur droit à la justice et revendiquer une régularisation rapide. Une étape importante dans la lutte qu’ils mènent depuis trois ans.
En octobre 2021, environ 80 intérimaires initient un mouvement de contestation. Devant la mairie de Grigny (Essonne), ils maintiennent un piquet de grève pendant plus d’un an. Touré Mahamadou, l’un des grévistes, rappelle les raisons de leur mobilisation : « La société RSI refusait de nous fournir les documents Cerfa (nécessaires à la demande de titre de séjour – NDLR), les attestations de travail. Certains n’ont même pas reçu de fiches de paie, d’autres n’étaient payés qu’en liquide », raconte-t-il.
« On pensait que l’histoire était réglée, qu’on allait pouvoir travailler légalement »
Le mouvement de ces travailleurs sans papiers conduit l’inspection du travail à entamer une enquête qui confirme que les grévistes ont effectivement travaillé pendant plusieurs mois, condition indispensable pour prétendre à un titre de séjour salarié temporaire. Un an après le début de leur mobilisation, ils peuvent enfin déposer leurs dossiers à la préfecture et obtiennent 83 récépissés de titres de séjour avec autorisation de travail pendant six mois. « On pensait que l’histoire était réglée, qu’on allait pouvoir travailler légalement », poursuit Touré Mahamadou. Le piquet de grève est levé et les 83 travailleurs trouvent un emploi.
Mais, brutalement, 65 récépissés sont interrompus et seulement 18 cartes de séjour temporaire délivrées. Pour ceux dont la situation reste irrégulière, le procès représente un espoir, bien que la justice ne puisse pas directement prononcer leur régularisation. « On n’attend pas d’argent, on veut être reconnus comme victimes, ce qui pourrait nous aider à être régularisés », précise Touré Mahamadou.
Les membres de l’intersyndicale du ministère du Travail (CGT, FSU, SUD travail) présents lors du rassemblement déplorent que la preuve apportée d’une relation de travail entre RSI et ses employés n’ait pas suffi à la régularisation des sans-papiers.
Sur le banc des accusés, manquent les entreprises de BTP
Au contraire, les contrôles de l’inspection du travail peuvent porter préjudice aux salariés irréguliers, qui sont licenciés sans indemnité. « Si on veut la fin du travail dissimulé, il faut la régularisation des sans-papiers », affirme Thomas Dessalles, de la CGT du ministère du Travail. Il appelle à ce que « les mesures appliquées dans les affaires traite des êtres humains, où un titre de séjour est délivré aux victimes pour les protéger, s’étendent aux cas de travail dissimulé ».
Maître Xavier Robin, avocat de plusieurs travailleurs sans papiers, se dit optimiste quant à l’issue du procès : « L’enquête de l’inspection du travail démontre que RSI était pleinement conscient de commettre du travail dissimulé. » Il regrette en revanche que la société d’intérim tente de se dédouaner en rejetant la responsabilité sur la directrice de l’agence de Gennevilliers.
Le collectif des travailleurs sans papiers de Vitry-Île-de-France estime pour sa part qu’il manque du monde sur le banc des accusés. « Les entreprises de BTP pour lesquelles travaillaient les intérimaires recrutés par RSI profitaient de leur vulnérabilité pour imposer des conditions de travail très dégradées », précise son communiqué.
L’audience a été reportée aux 29 et 30 avril, la juge ayant estimé que deux journées seraient nécessaires pour auditionner les 35 plaignants, et non une seule après-midi comme prévu.
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