« Des rénovations, pas des illusions » a crayonné une lycéenne sur une pancarte. Casseroles et spatules en bois à la main, élèves et parents d’élèves du lycée Henri Moissan de Meaux ne manquent pas d’imagination pour se faire entendre. Les klaxons de voitures passantes les accompagnent. Ils sont venus soutenir les enseignants et personnels de l’établissement en grève depuis le mardi 7 janvier après avoir fait usage de leur droit de retrait.
Des toilettes inondées, infiltration d’eau par les toits, certaines fenêtres qui ne ferment plus, une isolation partielle, des rideaux tombants en lambeaux, des carreaux cassés remplacés par du carton, des caches néons et des plafonds menaçant de tomber, une cour remplie d’excréments d’oiseaux, des murs moisis… Les photos sont accablantes. Mais « la goutte d’eau qui a fait déborder le vase, se désole Vincent Vidal-Naquet professeur d’Histoire géographie et représentant syndical SNES-FSU, c’est la découverte de la chaudière de l’internat et de la cantine en panne au retour des vacances de Noël. »
Des problèmes qui ne datent pas d’hier
À peine revenus des vacances, les élèves internes sont renvoyés chez eux. Lydia, Viviane et Gloria, toutes trois agents restauratrices et d’entretiens, décrivent une accumulation de problème qui engendre des conditions de travail « invivables ». « On travaille dans de la vétusté, il y a de la moisissure et des remontés d’égouts au niveau de la plonge, les murs se dégradent, il est impossible de travailler dans les règles d’hygiène et de sécurité demandées » intervient Lydia.
À l’internat, un fond plafond s’est écroulé sur le lit d’un étudiant entraînant la fermeture des locaux temporairement. Dans les salles de classe, les élèves utilisent leurs écharpes pour remplacer les rideaux. La rentrée s’est déroulée dans le froid. Neuf degrés ont été relevés dans les salles de science. « J’ai peur que la région attende que les choses se dégradent tellement qu’on arrive à des frais ahurissants » réagit Vincent Vidal-Naquet.
Des investissements sans logique
Pourtant, sur un panneau disposé à l’entrée du lycée, il est inscrit que la Région a « investi 600 000 euros dans la rénovation de l’établissement » notamment pour des toilettes. « Ce qui n’a pas de sens, se désespère, Séverine Dubois, parent d’élève. On a aujourd’hui des toilettes neuves, déjà trop petites, mais aussi qui sont constamment bouchées ou inondés à cause des canalisations vétustes qui n’ont pas été changées ». La parent d’élève s’interroge « sur la priorité des travaux réalisés et à venir ».
Un constat partagé par Thomas Lang, professeur d’Histoire et géographie : « Cela fait seize ans que je suis prof à Moissan, la chaudière a déjà été changée deux fois. Il serait temps de s’attaquer aux problèmes d’isolation du bâtiment, c’est du gaspillage d’argent public. » Le gréviste dénonce également le manque d’agents d’entretien, « pas assez nombreux pour entretenir le lycée. Nos revendications relèvent de la dignité des élèves et du personnel, mais aussi de la sécurité de tous ».
Une région aux abonnés absents
Parents d’élèves et corps éducatif relèvent à chaque conseil d’administration, depuis des années, les problèmes de vétusté rencontrés. Une copie est toujours envoyée à la Région, sans jamais de retour. Dès le premier jour de grève, les enseignants interpellent Valérie Pécresse, présidente de la Région Île-de-France. Trois lettres, jamais de réponse, « ils font les morts », déplore Thomas Lang.
Vincent Vidal-Naquet a invité à maintes reprises des représentants de la municipalité de Meaux à venir constater l’état de vétusté de l’établissement. Vendredi, « le cabinet du maire nous a finalement appelé pour convenir d’une rencontre, déclare le syndicaliste, nous attendons la suite. » Marianne Margaté, sénatrice communiste de Seine-et-Marne, s’est rendue sur les lieux dès le premier jour de lutte. Après avoir constaté « la situation alarmante qui prévaut au lycée Moissan », cette dernière a écrit à la présidente de la Région pour l’encourager « à agir d’urgence pour mettre fin à cette situation insupportable ».
Toutefois, dans un communiqué de presse publié mercredi 8 janvier, Jean-François Copé, premier édile de Meaux, relaye que « des travaux sont bel et bien planifiés et que la Région reste pleinement mobilisée pour garantir leur réalisation ». Une communication démentie par le corps enseignant, « hors sol » argue Vincent Vidal Naquet. Si un crédit de 850 000 euros a bien été voté il y a plus d’un an pour des rénovations au sein de l’établissement, « nous n’avons aucun calendrier, ni nouvelle depuis » affirme le représentant FSU.
« Ces travaux ne prennent pas les problèmes à leurs racines, atteste le professeur d’Histoire, ils concernent deux salles de science et un auvent. Nous aimerions qu’ils viennent échanger avec les acteurs concernés pour établir un plan de rénovation sensé. » Un ingénieur envoyé par la Région s’est finalement déplacé vendredi 10 janvier. « Nous avons l’impression qu’il a bien pris note de nos revendications, maintenant nous attendons des promesses écrites, poursuit Vincent Vidal-Naquet. En attendant, nous montons un comité de suivi au sein de l’établissement pour suivre l’avancée des choses. »
Avant de partir, une dernière chose…
Contrairement à 90% des médias français aujourd’hui, l’Humanité ne dépend ni de grands groupes ni de milliardaires. Cela signifie que :
nous vous apportons des informations impartiales, sans compromis. Mais aussi que
nous n’avons pas les moyens financiers dont bénéficient les autres médias.
L’information indépendante et de qualité a un coût. Payez-le.Je veux en savoir plus