Les communistes sont entrés au Panthéon. Le corps du résistant d’origine arménienne Missak Manouchian repose désormais avec celui de son épouse Mélinée dans le temple républicain. Vingt et trois autres noms ont été gravés dans la crypte. Vingt et trois autres résistants membres des FTP-MOI, exécutés eux aussi par les nazis avec Missak Manouchian, il y a quatre-vingts ans.
Joseph Epstein, Marcel Rajman, Joseph Boczov, Rino Della Negra, Celestino Alfonso, Georges Cloarec, Olga Bancic… Vingt et trois noms pour honorer toute la Résistance communiste, qui n’était pas encore représentée au Panthéon, alors qu’elle a versé son sang sans compter. Vingt et trois noms qui célèbrent la part cruciale prise par les étrangers pour libérer la France du fascisme.
Vingt et trois noms qui convoquent des parcours qui ne font qu’un : ici des ouvriers et des poètes ayant survécu au génocide des Arméniens, ici des juifs polonais, hongrois ou roumains déterminés à prendre les armes contre le nazisme, ici des Italiens ayant fui Mussolini. Là un Espagnol, ancien membre des Brigades internationales. Tous guidés par un idéal de liberté, d’égalité, de fraternité. Tous combattants de l’Internationale.
Auraient-ils tous parié qu’ils seraient ainsi honorés, malmenés qu’ils furent leur vie durant ? Leur famille enfermée, déportée ou assassinée ? Leur demande de naturalisation rejetée ? Leur accueil refusé au moment de rejoindre la France, parqués dans des camps et déclarés indésirables après la guerre d’Espagne ? Leurs droits déchus avec l’ignoble statut des juifs sous Vichy ? Leur veste et leur cœur souillés par une étoile jaune ?
Bien avant leur entrée au Panthéon, ces militants avaient trouvé leur dignité dans le combat. Dans le refus de se soumettre dans la cité comme à l’usine. Dans leur choix de la lutte armée contre l’occupant. Dans leur grandeur, même quand les nazis tentèrent sans y parvenir de les salir en les exposant sur une « Affiche rouge » pensée pour leur coller les mots de terroriste et d’indésirable à la peau.