Le chômage, l’état calamiteux des services publics, l’insécurité… Et même le cyclone Chido et ses conséquences ! Pour l’extrême droite, il n’y a qu’une seule coupable et c’est toujours la même, surtout lorsqu’il s’agit de Mayotte : l’immigration. Y mettre un terme, comme le promet le RN, serait donc la solution miracle à tous les maux de l’archipel. La mère des batailles même, à condition de s’attaquer au droit du sol.
« Sans régler le problème de l’immigration clandestine, rien ne sera utile », a avancé Marine Le Pen depuis le département sinistré, où elle était en déplacement dimanche et lundi. Son objectif ? Accentuer la pression sur le gouvernement et faire de Mayotte, où elle a obtenu 59 % des voix au second tour de la dernière présidentielle, le terrain de son affrontement avec les macronistes.
Arsenal anti-étrangers
Moins d’un mois après la tempête meurtrière, on pouvait pourtant nourrir l’espoir que les débats politiques tournent enfin autour des enjeux écologiques – d’atténuation comme d’adaptation au changement climatique – ou des problématiques sociales concernant le département de loin le plus pauvre du pays.
Il n’en est rien : l’exécutif, et ses soutiens donnent dans la surenchère. La contamination des idées d’extrême droite se poursuit, à l’instar de l’ex-écologiste, soutien d’Emmanuel Macron, Daniel Cohn-Bendit, qui reprend désormais à son compte la théorie raciste et complotiste du « grand remplacement ».
Plutôt que laisser l’extrême droite à ses lubies, le « bloc central » mène donc la charge contre l’immigration à Mayotte. Quitte à se lancer dans un mortifère pas de deux avec le RN, lui permettant surtout de mettre sous le tapis sa gestion catastrophique de la crise.
Dès sa visite à Mayotte en décembre, le premier ministre, François Bayrou, fraîchement nommé, affirmait déjà que revenir sur le droit du sol était « une question qu’il faut se poser ». Trois de ses ministres – Sébastien Lecornu (Armées), Bruno Retailleau (Intérieur) et Manuel Valls (Outre-mer) – y ont déjà répondu dans une tribune publiée dimanche sur le site du Figaro. Ils réclament cette mesure, portée depuis toujours par les lépénistes, pour « traiter les causes du désordre migratoire ».
Les ministres enfoncent aussi le clou, proposant un arsenal anti-étrangers inédit dans le futur plan « Mayotte debout » : « Allonger la durée de résidence régulière des parents pour l’accès des enfants à la nationalité française, lutter contre les reconnaissances frauduleuses de paternité ou étendre l’aide au retour volontaire des ressortissants africains dans leur pays d’origine. » « Sans fermeté migratoire, nous reconstruisons Mayotte sur du sable », écrivent-ils.
Leur collègue de la Justice, Gérald Darmanin, leur a également apporté son soutien : « C’est la bonne voie. (…) Ce n’est pas possible de continuer à avoir 60 à 70 % de parents non français qui donnent naissance à Mayotte », s’est-il réjoui sur RTL, voulant élargir la restriction du droit du sol à la Guyane. Cette idée n’est pas récente en Macronie, puisque le président de la République défendait déjà, interrogé en février dernier par l’Humanité, une telle mesure pour « casser le phénomène migratoire », et ainsi éviter « l’effondrement des services publics sur l’île ».
« Pas la bonne voie », selon Borne
Si la Macronie se convertit peu à peu à l’idée d’écorner un principe fondateur de la République, il reste des personnalités à y être opposées. C’est le cas de la numéro 2 du gouvernement, Élisabeth Borne : « Ce n’est pas la bonne voie », s’est-elle contentée de répondre sur BFM TV, tout en demandant des mesures pour « mieux lutter » contre l’immigration clandestine sur un territoire où les étrangers représentent la moitié de la population.
La gauche est, elle, fortement opposée à cette restriction de l’accès à la nationalité française. D’autant que le droit du sol avait déjà été réformé, sans effet, en 2018. « Croire que modifier le droit du sol empêchera des ressortissants voisins de venir à Mayotte en espérant échapper à la misère est soit naïf, soit cynique », a critiqué sur X la sénatrice socialiste Marie-Pierre de La Gontrie.
Pour Fabien Roussel, interrogé mi-décembre sur RTL, les Comoriens vivants à Mayotte « ne sont pas des étrangers les uns vis-à-vis des autres », car « c’est un seul et même peuple » avec « la même culture ». « On ne peut pas commencer à dire que c’est de la faute des immigrés, qu’on ne reconstruira que pour les Français et les autres dehors. Ce sont des frères et des sœurs », assure le secrétaire national du PCF, qui s’opposait déjà en février 2024 à la remise en cause du droit du sol : « Le gouvernement conteste le fait que tous les citoyens sont égaux, quel que soit le territoire où ils habitent. »
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