Distancée dans les sondages par Raphaël Glucksmann, la tête de liste de la FI, Manon Aubry, affirme n’avoir « pas renoncé au programme de la Nupes ». Elle répond à nos questions sur le nucléaire, l’Ukraine, l’immigration, les lobbies, les relations à gauche et la diabolisation de la FI pour ses positions sur la Palestine.
La question de la souveraineté est au cœur de la campagne. Plusieurs candidats veulent relocaliser les industries et produire plus. Quelle est votre position ? Êtes-vous plutôt pour une décroissance ?
L’UE a organisé sa propre vulnérabilité en détruisant petit à petit son tissu industriel, en organisant les délocalisations, en signant à tour de bras des accords de libre-échange. Le résultat, ce sont les pénuries de médicaments, des usines de panneaux solaires qui ferment… On ne peut plus être l’idiot utile du village mondialisé. Il est temps de mettre un terme au libéralisme, de taxer aux frontières en fonction de la distance parcourue et du coup écologique de production, et d’assumer un vrai protectionnisme. Nous proposons un grand plan de relocalisation industrielle qui suit un principe : produire en France et en Europe ce dont nous avons besoin. Nous avons déjà remporté une bataille culturelle sur ces sujets, il reste à gagner la bataille politique. Concernant la croissance, il s’agit d’un mauvais indicateur économique : il faut faire croître ce dont nous avons besoin, et décroître ce qui est mauvais pour l’humain et l’environnement.
Vous prônez une bifurcation écologique à l’échelle européenne. Comment la financez-vous ?
Pour respecter les accords de Paris et réduire de 65 % les émissions de gaz à effet de serre, il faut tout changer en Europe : arrêter les accords de libre-échange, sortir de l’agro-industrie, atteindre le 100 % d’énergies renouvelables, développer le fret. Cela coûte de 300 à 400 milliards d’euros par an et nous avons les moyens de le financer en mettant à contribution les récents superprofits réalisés par les grandes entreprises (150 milliards d’euros à l’échelle européenne). Et je propose la création d’un ISF européen, sachant que les grandes fortunes ont vu leur richesse augmenter de 35 % en quelques années, qui rapporterait 250 milliards d’euros. De son côté, le gouvernement français prépare la pire cure d’austérité en application des règles budgétaires européennes. Tout y passera : notre assurance-chômage, nos retraites, nos écoles, nos hôpitaux, la rénovation thermique des bâtiments. Le 9 juin est un référendum contre cette cure votée au Parlement européen par les socialistes, les libéraux et la droite.