Dans un nouveau rapport, un collectif d’ONG dont Oxfam France, Action Santé mondiale, Global Citizen, et ONE, révèlent « de graves failles » dans la collecte de la taxe sur les transactions financières (TTF). La TTF, aussi appelée « taxe Robin des Bois », est pensée pour limiter la volatilité du taux de change en régulant les transactions monétaires internationales. En France, elle existe depuis 2012 et a notamment été conçue comme une réponse aux dérives de la finance qui ont engendré la crise financière de 2008.
Le rapport, réalisé par l’économiste Gunther Capelle-Blancard, fustige le manque d’ambition et les zones d’ombre de la taxe sur les transactions financières. En pleine campagne des législatives anticipées, ce rapport vient appuyer la proposition du Nouveau Front populaire d’une « taxation renforcée des transactions financières », dont le rendement a été évalué par les économistes Lucas Chancel, Anne-Laure Delatte et Élise Huillery dans une fourchette de deux à six milliards d’euros supplémentaires.
« Un grave laxisme de la part du gouvernement »
Les conclusions du rapport montrent que seules 15 % des transactions financières sont taxées via la TTF. « Chaque seconde, c’est 100 euros de taxe sur les transactions financières qui échappent à l’État », calcule le collectif d’ONG, qui dénonce « un grave laxisme de la part du gouvernement ». Rien qu’en améliorant le fonctionnement existant, les organisations estiment pouvoir doubler les recettes actuelles et donc dégager entre un et trois milliards d’euros supplémentaires chaque année.
L’étude prend particulièrement pour cible la société privée Euroclear, chargée par l’État du recouvrement de cet impôt. Alors que cette entreprise détient les titres financiers pour le compte de ses clients, elle est également chargée du prélèvement de la taxe qui concerne ces mêmes titres. « Nous assistons donc à une situation flagrante de conflit d’intérêts », accusent les ONG. « C’est comme si, à la caisse du supermarché, on vous laissait calculer vous-même la TVA que vous devez payer et que personne ne vérifiait la justesse de votre calcul », vulgarise le rapport. En plus de cette situation, le collectif fustige l’opacité cultivée par Euroclear quant aux informations autour de cette taxe et de son prélèvement. « Personne ne sait, ni les citoyen.ne.s ni l’État, ce qui est réellement taxé par la TTF », affirme le rapport.
La question d’un élargissement de cette taxe, régulièrement évoquée dans le débat public, est également remise sur la table. Il s’agirait de l’étendre à des opérations d’achats et de ventes d’actions réalisées dans la même journée, appelées « intra-day » et jusqu’ici exemptées, ainsi qu’aux opérations de trading à haute fréquence (HFT). Jusqu’à présent, ces transactions, parmi les plus spéculatives des marchés financiers, ne sont pas concernées par la TTF pour des raisons techniques. Pourtant, depuis 2018, l’Autorité des Marchés Financiers (AMF) dispose d’une base de données exhaustive détaillant toutes les informations nécessaires. « Tous les obstacles techniques ayant été levés, la France n’a plus aucune excuse pour ne pas agir aujourd’hui », estiment les ONG.
« Ce n’est pas compréhensible de laisser de tels trous dans la TTF et en même temps de couper l’aide au développement », regrette Friederike Röder, vice-présidente de Global Citizen. Une partie des recettes de la taxe Robin des Bois est en effet directement affectée à l’Aide publique au Développement, sans cesse rognée, soutenant les populations les plus vulnérables face à la pauvreté et aux changements climatiques. « Notre solidarité internationale ne peut pas être sacrifiée sur l’autel de la négligence fiscale », concluent les ONG.
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