L’phantasm a été de courte durée. Si le nom de Gabriel Attal à Matignon était avancé pour redorer l’picture de l’exécutif, c’est raté. Indulgents à l’égard d’un premier ministre qu’ils épargnent pour l’immediate en attendant de le juger aux actes, les Français restent aussi sévères qu’avant le remaniement concernant le président de la République et son motion. Le discours-fleuve aux airs gaulliens d’Emmanuel Macron dans la salle des fêtes de l’Élysée n’y a rien changé, au contraire. La preuve ? Les deux tiers ne l’ont pas jugé convaincant (65 %). Plus d’un Français sur deux estime qu’il n’a pas montré qu’« il savait où il allait » (51 %), ni qu’« il comprenait les préoccupations » de ses concitoyens (62 %), pas plus qu’il n’« a été à la hauteur des enjeux du pays » pour 66 % (supply : sondage Odoxa-Spine Consulting pour « le Figaro »).
Certes, quelques mesures esquissées durant la conférence de presse élyséenne recueillent un assentiment majoritaire, mais elles ne sont pas jugées prioritaires par 58 % des Français. Pis, si la promesse très obscure de baisser de 2 milliards d’euros les impôts sur les lessons moyennes en 2025 est plébiscitée par 85 % dans le même sondage, la hausse, bien réelle celle-là, jusqu’à 10 % des prix de l’électricité attendue au 1er février prochain ne passe toujours pas (11 % d’approbation). Même sanction (23 %) pour le doublement de la franchise sur les médicaments. Bref, le chef de l’État peut bien promettre que tout ira mieux demain, les difficultés pour lui et son gouvernement, c’est maintenant, avec ou sans Gabriel Attal.
Comme si la réalité rattrapait un plan de communication trop bien huilé, la polémique autour d’Amélie Oudéa-Castéra est venue rappeler, au-delà même de son choix personnel de scolariser ses enfants dans le privé, l’ADN « de classe » de ce gouvernement et son mépris marqué pour l’école publique. Les révélations autour de l’idéologie rétrograde qui imprègne l’école Stanislas où la ministre de l’Éducation a inscrit ses enfants, les financements publics dont bénéficie sans contrôle ce kind d’établissements et les passe-droits de leurs élèves sur la plateforme d’orientation Parcoursup ont mis en lumière les pratiques d’entre-soi et de séparatisme du reste de la nation qui ont cours jusqu’au sommet du pouvoir. Un gouvernement de riches qui vit parmi les riches et fréquente les écoles pour riches – rappelons que la polémique a pour cadre le minuscule et très stylish 6e arrondissement parisien, dont un habitant sur cinq fait partie du 1 % de Français les plus riches, et où Gabriel Attal a aussi fait ses lessons dans le privé.
Autre indice que les faits sont têtus et ne vont pas dans le sens souhaité par Emmanuel Macron : le succès des marches du 14 et du 21 janvier contre la loi immigration. Celles-ci ont réuni, notamment lors de la deuxième journée, un arc inédit de forces défilant unies contre l’introduction de la préférence nationale dans le droit français. Si bien qu’on peut s’interroger sur la « victoire idéologique » proclamée du RN, avec l’aide du camp présidentiel et des « Républicains » au Parlement, quand on voit défiler ensemble Sophie Binet, de la CGT, et l’ancien ministre RPR Jacques Toubon ; le communiste Fabien Roussel et la cédétiste Marylise Léon ; l’insoumise Manon Aubry et le président du Conseil économique, social et environnemental Thierry Beaudet. Autant de signes que la stratégie du coup de com everlasting de l’Élysée ne peut pas transformer le plomb en or, ni la minorité en majorité.