Les grandes conquêtes sociales sont au cœur de l’affrontement politique. Emmanuel Macron fait de l’application des orientations de sa réforme des retraites la clé de voûte de la composition d’un gouvernement faisant la part belle à la droite. Pour cela le « trou de la sécu » fait à nouveau la « une » de média qui mettent en scène la « faillite des régimes de retraite ». Les campagnes se prolongent et se succèdent, opposant actifs et chômeurs, salariés stables et précaires, cotisants et retraités… Alors que la réforme Macron n’est pas encore mise en place des voix s’élèvent pour justifier une nouvelle réforme, des sacrifices supplémentaires et le développement de l’épargne retraite.
Les jeunes sont directement visés et cela d’autant plus qu’ils sont concernés par un horizon qui de réformes en réformes semble se dérober. La bataille pour les retraites a tout pour se prolonger confirmant l’enjeu que représente l’entrée dans le conflit des jeunes, des travailleurs, des étudiants, des précaires… population dont les banques et assurances font la cible privilégiée des produits d’épargne.
Introduire une part de capitalisation dans notre système c’est accepter d’entrer dans la logique régressive d’un affaiblissement des solidarités. Une dose accrue d’épargne retraite, conduirait à un accroissement fantastique des inégalités, à l’image du système britannique dans lequel plusieurs millions de retraités vivent au-dessous du seuil de pauvreté
Les pouvoirs publics, comme le MEDEF n’évoquent les retraites qu’au travers de la question du financement. Nous pensons à l’inverse qu’il faut d’abord partir des « insuffisances du système », celles qui font que la retraite apparaît aux jeunes comme une perspective inaccessible, Pour donner confiance aux jeunes générations il faut tenir compte des nouvelles réalités sociales, notamment des problèmes d’insertion dans un emploi stable. Les chiffres sont édifiants : en deux générations, à trente ans, les droits accumulés pour le décompte de la retraite ont reculé de 10 trimestres pour les hommes et de 6 trimestres pour les femmes. D’où le besoin de revendications originales, notamment d’une nouvelle approche du travail qui inclurait le temps de la formation, celui de la mobilité professionnelle et celui consacré à la recherche du premier emploi.
On ne peut se contenter de discuter du nombre d’annuités nécessaires pour toucher une retraite à taux plein sans s’interroger sur ce que l’on inclut dans les périodes prises en compte. Il faut bien réarticuler le droit à la retraite et les parcours de vie et de travail. Intégrer dans la notion d’activité les périodes d’apprentissage, toutes les périodes de formation, et de recherche d’un premier emploi à partir de 18 ans apparaît nécessaire. Avec la reconnaissance de la pénibilité, c’est un des leviers pour bâtir un système de retraite plus juste.
Tout débat tronqué sur les retraites comme sur les autres sujets sociaux structurants menés à coup de 49.3, conduit à la hussarde, risque d’accroître les clivages entre générations. La gestion d’un avenir incertain suppose au contraire des débats sociaux transparents sur lequel les jeunes, les salariés et les citoyens de toutes les générations, peuvent avoir réellement prise. Nous avons conscience qu’une grosse partie du défi intergénérationnel va se jouer autour de l’emploi et du travail, dans la capacité à créer pour toutes les générations un véritable droit à l’intégration dans un emploi de qualité, base d’une vie meilleure. Commençons à le concrétiser dans l’organisation du système de retraite !