L’ancien Premier ministre Gabriel Attal était en déplacement à Nîmes ce vendredi 7 mars. L’occasion de s’exprimer sur les enjeux nationaux à venir, mais aussi internationaux avec la guerre en Ukraine et le positionnement des États-Unis et de l’Union européenne.
Vous avez passé plusieurs heures sur Nîmes ce vendredi 7 mars. Que retirez-vous de vos échanges avec la population ?
D’abord, du dynamisme. J’ai entendu beaucoup d’encouragements. Et ça, c’est quelque chose qui nous pousse, qui vous donne envie de vous engager davantage, tant pour le combat que je mène au niveau national, mais aussi au niveau local pour Valérie Rouverand. On a abordé différents enjeux comme le soutien en Ukraine, la guerre commerciale qui se prépare puisque les États-Unis ont annoncé une augmentation des droits de douane qui touchent les produits européens. Ce sont les grands défis qui touchent actuellement la France et L’Europe qui résonnent jusqu’ici à Nîmes. Je suis très attaché au terrain, au déplacement, car ce sont à chaque fois des petites France que je rencontre.
Vous étiez en soutien à la première candidate à s’être déclaré pour les municipales à Nîmes, la candidate Renaissance, Valérie Rouverand, qui a été la première à se déclarer pour les municipales. Quel soutien pensez-vous lui apporter durant cette année ?
Valérie représente le parti Renaissance, mais elle a la singularité d’avoir une personnalité qui dépasse les clivages politiques. Renaissance lui apportera un soutien, mais je pense au même titre que d’autres formations politiques et acteurs locaux. L’objectif est de rassembler largement et je pense que Valérie, en étant à la fois une femme de terrain, une femme d’expérience, puisqu’elle a été adjointe au maire à l’Éducation – une délégation importante et complexe – une femme sincère, saura porter ce rassemblement pour aider cette ville à se tourner vers l’avenir.
“Aujourd’hui, j’écris un nouveau chapitre de ma vie politique. Sans rien renier de ce qui a été fait, mais en construisant une voie et un parcours qui m’est propre”
Vous avez été le plus jeune Premier ministre de la Ve République, un des plus brefs aussi. Comment vit-on l’après ?
J’ai eu l’honneur immense de servir mon pays au plus sommet de l’État, en étant chef du gouvernement à 35 ans. Ça a été une responsabilité exceptionnelle. J’ai cherché à faire du mieux que j’ai pu tant que j’ai pu. Mais je ne suis pas dans la nostalgie, je vois aussi la puissance de ce que je peux porter aujourd’hui en tant que chef de parti, de président de groupe. Et dans un engagement différent : j’ai créé mon association de lutte contre le harcèlement à l’école, Faire face. Nous avons déjà fait de la prévention auprès de 10 000 élèves en France, on forme des enseignants, des parents sur ces questions. C’est un nouveau temps dans ma vie politique, enrichissant à bien des égards.
Quelles sont aujourd’hui vos relations avec Emmanuel Macron ?
Il est président de la République. Et je suis à la tête du parti qu’il a fondé, ce qui crée évidemment un lien. J’ai été son Premier ministre, je ne le suis plus. Je ne suis plus non plus ministre dans le nouveau gouvernement. Donc, aujourd’hui, j’écris un nouveau chapitre de ma vie politique. Sans rien renier de ce qui a été fait, mais en construisant une voie et un parcours qui m’est propre.
Quelles vont être les prochaines échéances pour Renaissance ?
D’ici à la fin du mois de mars, on présentera notre stratégie pour les municipales. Ce sont simplement, pour le parti Renaissance, nos deuxièmes élections municipales face à d’autres partis qui en ont vécu de nombreuses. On est encore dans ce temps d’ancrage, d’implantations dans un certain nombre de territoires. Après, il y a un enjeu national pour 2027 à préparer : j’ai lancé trois grandes conventions nationales thématiques sur notre modèle économique et social, sur le régalien (autorité, sécurité, immigration) et sur la transition écologique. Nous avons des experts et des députés qui travaillent dessus et des militants qui contribuent. D’ici au printemps, je présenterai les premières orientations qui viseront à assurer la pérennité de notre modèle social alors que la démographie n’est plus celle d’après 1945. Mais aussi à adapter la stratégie économique à un moment où la guerre menace et où l’intelligence artificielle va tout révolutionner. Sur le régalien, comment garantir le retour de l’autorité partout, dans la rue, dans les classes, dans les familles. Et sur la transition écologique, comment on prend en main le destin des générations à venir pour leur laisser une planète plus vivable et plus respirable.
Cette voie est malgré tout liée à Renaissance. Comment envisagez-vous votre avenir politique. Par une candidature aux prochaines présidentielles ?
Je n’avais rien prévu, ni d’être ministre de l’Éducation nationale ou même Premier ministre. Ce que je sais, c’est que j’ai exercé des responsabilités au plus haut niveau, ce qui m’a donné à la fois une expérience et une visibilité sur beaucoup de choses qu’il faut changer au niveau de l’État. Et quand je vois aujourd’hui ce qu’il se passe en France et dans le monde, je n’ai pas envie de rester spectateur. Mais les élections présidentielles sont dans deux ans et je vois un risque à se projeter top tôt, c’est de laisser passer les mois et les années sans être utile aux Français. Aujourd’hui, dans le monde, tout le monde trace : Donald Trump sort des décrets tous les jours pour réformer son pays et attirer de l’activité économique, la Chine investit dans sa politique économique également ; les Allemands sont en train de constituer un nouveau gouvernement puis vont reprendre leurs réformes. Si la France lève le stylo parce qu’il y a une élection présidentielle dans deux ans, ce n’est pas deux ans qu’on perdra, ce sont les cinquante prochaines années car il y a des choix décisifs à faire maintenant pour se réarmer, investir dans l’économie, dans notre école.
“Je ne veux plus qu’on soit seulement un parti qui se bat contre les extrêmes, mais un parti qui se bat pour un projet d’espoir pour le pays”
À Nîmes, comme dans d’autres villes en France, le Rassemblement national a des ambitions certaines. Comment comptez-vous lutter face à la percée de l’extrême droite ?
D’abord, en dénonçant les doubles discours permanents du Rassemblement national : sur le terrain, il assure défendre le retour du service public quand, à l’Assemblée nationale, ils défendent des amendements pour privatiser La Poste et la remplacer par Amazon… Quand ils voient des personnes qui travaillent et ont le sentiment de financer un modèle qui parfois coûte cher et permet à certains de ne pas travailler, mais quant à l’Assemblée on fait la réforme du RSA avec 15 heures d’activité, ils votent contre, tout comme quand on propose une réforme de l’assurance-chômage. La deuxième chose, c’est d’incarner une espérance. Avec Renaissance, je ne veux plus qu’on soit seulement un parti qui se bat contre les extrêmes, mais un parti qui se bat pour un projet d’espoir pour le pays. Car on a des raisons d’avoir de l’espoir pour ce pays vu les talents qu’on a en France.
Beaucoup de Français craignent aujourd’hui une Troisième guerre mondiale, surveillent de près la guerre entre la Russie et l’Ukraine. QUel regard portez-vous sur ces conflits et le rôle que la France doit avoir ?
On voit qu’à un peu plus de trois heures d’avion de la France, il y a des bombes qui tombent sur un peuple libre, démocratique, qui a choisi ses représentants avec, en face de lui, une puissance qui veut en prendre le contrôle. Évidemment que c’est inquiétant pour les Français. Quand on voit à quel point la Russie ambitionne de prendre le pouvoir sur d’autres territoires, d’autres pays de l’Union européenne. Mais nous avons les moyens de notre puissance, en France et en Europe. On a doublé le budget des armées depuis 2017. Et au niveau européen, on est en train de franchir des pas de géants pour être mieux capables de se protéger et se faire respecter. C’est possible de défendre, de peser dans les équilibres mondiaux, à condition de s’en donner les moyens. C’est ce que porte le président de la République.
Êtes-vous également d’accord avec l’idée que l’Europe doit davantage s’imposer plutôt que d’attendre l’action des États-Unis ?
Bien sûr. La ligne de Donald Trump est de se replier sur les seuls intérêts des États-Unis et de ne prendre des décisions internationales que quand il y a un intérêt commercial et économique. Ce n’est pas notre conception, mais cela dit une chose, c’est qu’il faut qu’on prenne en charge notre propre sécurité et notre propre défense. On a une chance en France, c’est qu’on a ce modèle indépendant, grâce au général de Gaulle, à ceux qui lui ont succédé ; on a une armée complète, la dissuasion nucléaire… Ce n’est pas le cas de tous les pays européens, à qui il faut qu’on permette d’élever leur niveau de sécurité.