Tout part d’un cas mortel d’hépatite aiguë détecté en France. L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a par la suite analysé de nombreux autres cas semblables – mais non mortels – en France, ainsi qu’en Italie, aux États-Unis, au Canada mais aussi en Corée et ses résultats sont clairs : les promesses des « coupe-faim » à base de la plante Garcinia cambogia, masquent des effets indésirables graves et potentiellement mortels.
L’Anses déconseille donc « fortement à l’ensemble de la population » de consommer cette plante, dans un avis publié mercredi 5 mars. Bien qu’interdite dans les médicaments depuis 2012, la plante Garcinia cambogia – plus connue sous la nomination de Tamarinier de Malabar – « continue d’être proposée dans des compléments alimentaires » pour perdre du poids.
Des effets sévères chez des consommateurs « sans antécédent médical »
Près de 340 produits en contenant sont ainsi commercialisés, principalement sur internet. Or, entre 2009 et mars 2024, 38 cas d’effets indésirables ont été signalés en France, avec des atteintes hépatiques, psychiatriques, digestives, cardiaques et musculaires – souvent graves – dans la plupart des cas.
« Ces effets peuvent se manifester chez des personnes ayant des antécédents de troubles psychiatriques, de pancréatite ou d’hépatite, ou encore souffrant de diabète, d’obésité ou d’hypertension », détaille l’Agence nationale de sécurité sanitaire dans sa note publiée mercredi 5 mars. Ils peuvent aussi toucher des personnes prenant des antidépresseurs, des traitements antirétroviraux ou des médicaments connus pour affecter la fonction hépatique.
L’Anses présente notamment un drame intervenu en Italie. Une femme âgée de 45 ans, qui suivait un traitement contre l’asthme – et dont le médicament est connu pour affecter la fonction hépatique – est morte d’une hépatite aiguë. La cause du décès : avoir simplement consommé un complément alimentaire basé sur le Tamarinier de Malabar. Pire, alerte l’Anses, « des effets sévères » qui peuvent donc être accrus par des interactions médicamenteuses, ont aussi été signalés chez des « consommateurs sans aucun antécédent médical ».
« Une femme âgée de 32 ans, sans antécédents médicaux, a présenté une myocardite qui l’a conduite à avoir une transplantation cardiaque, rapporte par exemple Aymeric Dopter, chef de l’unité d’évaluation des risques liés à la nutrition à l’Anses, interrogé par l’Agence France-Presse (AFP). On voit à travers ces quelques cas que des gens qui cherchaient simplement à maigrir se sont retrouvés à avoir leur santé fortement dégradée. » Selon le responsable de l’Anses, l’équation est donc simple : « Le jeu n’en vaut pas la chandelle. »
Restreindre voire interdire cette substance
Actuellement, le règlement de l’Union européenne (UE) ne s’oppose pas à l’utilisation des allégations de santé – « contrôle du poids », « réduction du stockage des graisses » et « de la sensation de faim », « contrôle de la glycémie et du taux de cholestérol », etc. Les produits confectionnés à base de Garcinia cambogia sont cependant en cours d’examen par l’Agence européenne de sécurité des aliments (Efsa).
L’Efsa a aussi lancé une évaluation des risques associés à l’ingestion d’acide hydroxycitrique, présent dans le fruit de cette plante, une substance à laquelle sont attribuées des propriétés amaigrissantes. Cette expertise pourrait amener l’agence européenne à restreindre voire interdire cette substance. L’Anses espère ainsi que des listes précisant les plantes autorisées dans les compléments alimentaires, ainsi que les restrictions et avertissements encadrant leur utilisation verront le jour. L’Agence française rappelle que « la perte de poids sans indication médicale comporte des risques, surtout quand la personne adopte des pratiques alimentaires déséquilibrées et peu diversifiées ».
Elle ne possède néanmoins aucun pouvoir de police sanitaire. Une éventuelle interdiction des produits visés par son étude serait donc du ressort du ministère de l’Agriculture. Ce dernier, sollicité par l’AFP, a indiqué ne pas pouvoir donner de « précision à ce stade », rappelant qu’il s’agissait d’une « autosaisine de l’Anses ». Une réaction au niveau étatique reste donc loin d’être assurée.
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