En cas de rejet, ce serait un « coup de tonnerre ». À l’initiative du groupe Communiste, républicain, citoyen et écologiste – Kanaky (CRCE-K), le CETA, un traité de libre-échange conclu en 2017 entre l’Union européenne (UE) et le Canada, sera débattu et enfin soumis au vote des sénateurs, ce jeudi 21 mars.
Soit six ans après son application partielle et quatre ans après son adoption par l’Assemblée nationale… Depuis, le gouvernement a toujours refusé de présenter le texte dans l’hémicycle du palais du Luxembourg. Un scandale démocratique sur le point de s’achever grâce à l’opiniâtreté des élus PCF, qui vont user de leur niche parlementaire pour imposer l’examen du texte.
« Depuis 2018, nous assistons à un véritable déni démocratique, s’indigne le sénateur PCF Fabien Gay. Nous avons tout tenté pour pouvoir nous prononcer sur ce texte. En novembre 2018, nous avions demandé un débat au gouvernement autour de l’application provisoire du texte. Il nous avait rétorqué qu’il était trop tôt. Et, en 2021, nous avons déposé une proposition de résolution invitant le gouvernement à poursuivre le processus de ratification du traité. Le gouvernement a toujours refusé. »
L’article 53 de la Constitution détermine pourtant que « les traités de commerce (…) ne peuvent être ratifiés ou approuvés qu’en vertu d’une loi » votée par le Parlement. Mais la Macronie passe outre depuis des années sur ce sujet.
Un moment décisif pour le libre-échange ?
L’exécutif craindrait-il le rejet du texte par le Sénat dont la majorité est à droite ? Si, au niveau de l’UE, le Parti populaire européen (PPE) – auquel « Les Républicains » sont rattachés – est en soutien des traités de libre-échange internationaux, la donne est légèrement différente au niveau national. En 2019, lors du scrutin organisé sur le CETA à l’Assemblée nationale, les députés LR et UDI avaient pour la plupart voté contre.
Deux ans plus tard, Bruno Retailleau, président du groupe LR au Sénat, avait affirmé que son groupe attendait impatiemment ce texte pour « le refuser » : « Je ne vois pas pourquoi on irait importer du Canada de la viande qui n’est pas produite avec les mêmes normes de production qu’en France. Et, en plus, ça fait traverser l’Atlantique, c’est une empreinte carbone supplémentaire. »
Un vote « contre » qui devrait également être soutenu par la « majorité des groupes de gauche », selon la cheffe de file des sénateurs PCF, Cécile Cukierman, socialistes et écologistes étant fermement opposés à ce projet depuis son élaboration à cause des dégâts sociaux et environnementaux liés.
Alors que la crise agricole a agité tout le pays en ce début d’année, avec, au cœur des revendications, la fin des traités de libre-échange, Fabien Gay considère que ce « vote très politique » constitue une échéance clé. « Si le Sénat rejette ce traité, ce sera un signal extrêmement fort envoyé aux agriculteurs, mais aussi au gouvernement et à l’Europe tout entière, estime-t-il. Si, pour la première fois, un grand Parlement dit « stop », il faudra alors une renégociation de l’ensemble des traités de ce type, notamment le Mercosur, celui avec le Kenya, le Chili, et beaucoup d’autres, qui sont en cours d’application ou de négociation. Pour enfin tendre vers un commerce équitable et de coopération plutôt que de mise en concurrence et de moins-disant. » La balle est (enfin) dans le camp des sénateurs.