Inondations, tempêtes ou sécheresse, incendies, la multiplication des catastrophes naturelles et les dégâts qu’elles occasionnent font bondir les tarifs des assurances habitation. En Floride ou en Californie, les primes de risques naturels ont atteint jusqu’à 6 500 {dollars}, selon certains témoignages. Face aux coûts engendrés par les sinistres, certains assureurs vont même, là-bas, jusqu’à refuser d’assurer les habitations.
La tendance est malheureusement la même en Europe. En Allemagne, la moitié des habitants des zones sinistrées, en raison du montant « excessif » des choices d’assurance sur les risques de catastrophes naturelles, ne sont plus couverts. Sans arriver à ces extrêmes, en France, les contrats d’assurance ne cessent d’augmenter, au risque de finir par devenir un « produit de luxe ».
Depuis dix ans, les tarifs ont progressé de 40 %
En dix ans, entre 2010 et 2023, les tarifs de l’assurance habitation ont bondi de 40 %, passant de 162 euros par an, en moyenne, à 227 euros en 2023. Et de 5 % rien qu’entre 2022 et 2023. « Un effet rattrapage, explique Olivier Moustacakis, cofondateur d’Assurland.com. L’activité dommages habitation est surtout un produit d’appel soumis à des règles prudentielles élevées afin de garantir le remboursement de nos sinistres. »
Pour cela, à chaque contrat, l’assureur doit, en fonction des risques auxquels il est exposé, disposer d’un montant minimal de fonds propres. « Il n’y a que pendant le Covid, du fait de la baisse des sinistres, que les assureurs ont explosé leurs marges sur l’activité dommages », poursuit l’knowledgeable.
Outre la hausse des cambriolages, l’inflation sur le prix des matériaux, l’évolution tarifaire serait liée majoritairement aux dégâts causés par les catastrophes climatiques, répondent les assureurs. En 2022, ceux-ci ont coûté près de 10 milliards d’euros aux compagnies d’assurances. « Un niveau jamais vu depuis plus de vingt ans », alerte la fédération des assurances. Contre 3,5 milliards d’euros en moyenne par an, entre 2007 et 2021. « Avec notamment des épisodes de grêle intenses qui ont touché une commune sur deux pour un coût historique de 5,1 milliards d’euros », développe-t-elle.
La sécheresse avec le retrait-gonflement des sols argileux qui provoquent de sérieuses fissures sur les habitations, pour un montant de 2,9 milliards d’euros, a contribué à faire monter la facture. Et, ce n’est qu’un début, puisque ces dommages devraient augmenter d’environ 40 à 60 % à l’horizon 2050.
Ainsi, confirme Assurland.com, « l’Occitanie, particulièrement touchée par les fortes intempéries et les conséquences de la sécheresse, augmente de 8 % et s’établit désormais comme la région la plus chère, devant Paca et l’Île-de-France, une première ».
Si bien qu’il « existe, depuis une vingtaine d’années, une corrélation entre le coût des catastrophes naturelles croissantes et les tarifs de l’assurance habitation », confirme le médiateur de l’assurance. Pour 2024, les assureurs envisagent d’alourdir un peu plus la facture de 5 à 7,5 %.
Un mécanisme de solidarité pour contenir les prix
Cela dit, la hausse serait en France relativement contenue, insistent les acteurs. Du fait d’un mécanisme fondé sur la solidarité nationale et mis en place en 1982, le Cat-Nat. Selon lequel, lorsqu’une disaster naturelle ou climatique est reconnue par arrêté interministériel, les personnes sinistrées restent couvertes malgré le coût élevé des dommages causés, grâce à la solidarité de tous les détenteurs d’un contrat d’assurance dommages.
Celle-ci s’opère au travers d’une taxe ponctionnée sur la prime annuelle d’assurance habitation des Français, fixée par le gouvernement, actuellement de 12 %. Et de 16 % sur un contrat vehicle. Des pourcentages qui n’ont pas évolué depuis l’an 2000. Soit 25 euros par an en moyenne, « quelle que soit son exposition aux risques », explique Olivier Moustacakis. Les fonds, d’un montant de 2 milliards d’euros, sont ensuite gérés par la Caisse centrale de réassurance (CCR), « l’assureur des assureurs, détenue à 100 % par l’État français » – qui intervient comme un filet de sécurité pour les assurés –, définit Antoine Quantin, son directeur, « lorsque le marché seul ne peut pas couvrir les risques ».
Enfin, pas directement, puisqu’elle indemnise les compagnies d’assurances sur les montants engagés, à situation que la zone sinistrée soit reconnue by way of la parution d’un arrêté interministériel. L’indemnisation couvre généralement les dommages matériels directs causés par la disaster naturelle. Ainsi, pour le Pas-de-Calais, les récentes inondations devraient coûter « 550 tens of millions d’euros », dont « au moins la moitié (275 tens of millions d’euros) sera prise en cost directement par la CCR au titre de la réassurance publique ».
Vers une hausse de 7 % dès 2024
Si le mécanisme est réputé « protecteur », il est toutefois très limité. Depuis 2016, à l’exception de l’année 2020, la CCR est déficitaire. Pour remplir les caisses, l’establishment demande à Bercy une hausse des primes annuelles de 3,2 milliards d’euros. Celle-ci passerait de 12 % à 19 %, dans une première part. « Ce qui permettrait de remettre le système à l’équilibre, afin d’être en mesure de continuer à financer des catastrophes naturelles de grande ampleur comme un tremblement de terre majeur ou des inondations historiques sans faire appel à la garantie de l’État », affirme son directeur. Soit une augmentation de la cotisation d’assurance habitation moyenne d’un peu plus d’1 euro par mois.
Ce qui, pour le directeur de la CCR, reste un montant « très inférieur », en comparaison avec les pays qui ne sont pas dotés du régime solidaire de catastrophes naturelles dont nous bénéficions en France. Pour couvrir l’ensemble des périls à moyen terme, la CCR préconise de faire passer la ponction à 22 %. L’objectif étant de générer 500 tens of millions d’euros supplémentaires par an. Le contrat d’assurance dommages augmenterait en 2024 de plus de 20 euros, calcule Olivier Moustacakis. Il pourrait approcher les 250 euros par mois.
Une couverture encore défectueuse sur certains risques
Outre les tarifs qui ne cessent de grimper, certains sinistres restent mal pris en cost. C’est essentiellement le cas des fissures, notamment à la suite d’épisodes de sécheresse, « les autres dégâts sont basés sur des faits précis, comme un vent à plus de 100 kilomètres/heure pour une tempête, un niveau de précipitations pour les inondations, explique le médiateur de l’assurance, Arnaud Chneiweiss, qui reçoit près de 30 000 saisines par an, dont 7 000 concernent l’assurance habitation. Ce qui ne laisse guère de place aux interprétations », poursuit-il. Contrairement au phénomène retrait-gonflement des sols argileux, dont les conséquences sur les buildings construites au-dessus de ces sols peuvent entraîner des dommages structurels.
Or, « les fissures peuvent apparaître après l’épisode de sécheresse ou dans des communes qui ne sont pas reconnues en disaster naturelle », pointe la médiation de l’assurance. Autant de failles dans lesquelles s’engouffrent les assureurs pour ne pas rembourser les dégâts. « Si bien qu’à la fin, moins d’un quart des personnes se retrouvent indemnisées », résume la députée les Écologistes, Sandrine Rousseau, coautrice d’une proposition de loi sur le retrait-gonflement de l’argile, adoptée en première lecture à l’Assemblée nationale et qui devrait bientôt poursuivre son chemin parlementaire.
Ce péril pourrait à terme concerner plus de 11 tens of millions d’habitations, soit une maison sur deux, à la lecture d’un rapport gouvernemental rendu le 9 octobre. Et apparaître rapidement comme le risque le plus coûteux, avec une hausse annuelle moyenne de 750 tens of millions d’euros d’ici à 2050, calcule la CCR. Soit le double de ce qu’il coûte aujourd’hui. L’enjeu est donc potentiellement énorme.
Face à ce constat, la députée suggest deux mesures principales : l’une vise à renforcer le poids des communes pour la reconnaissance en zone de disaster naturelle. « Ce qui permettrait de multiplier par trois la prise en cost », assure-t-elle. L’autre, celui des assurés face aux assureurs. En instaurant notamment une « présomption », dès lors qu’un état de disaster naturelle liée à une sécheresse est reconnu.
Les assureurs devraient ainsi apporter la preuve qu’un sinistre n’est pas la conséquence d’un phénomène de retrait-gonflement des argiles. Pour mutualiser ce risque, Sandrine Rousseau suggest de le faire rentrer dans le régime de Cat-Nat, by way of une hausse de la surprime, puisque « les assurances n’auront pas les moyens de le prendre en cost ».
La prévention à améliorer
Pour limiter le coût, les acteurs comptent sur la prévention et l’aménagement du territoire. Selon Antoine Quantin, « de nombreux dispositifs ont été mis en place ». « Dans le territoire des Hauts-de-France, explique la CCR dans sa première analyse à la suite des inondations, les pouvoirs publics (État et collectivités) ont déployé, au cours de la dernière décennie (…), près de 250 tens of millions d’euros, dont 210 tens of millions d’euros pour réaliser des infrastructures hydrauliques de safety. ».
En useless. Mais, à croire le directeur de la CCR, la « prévention est un sujet complexe et de lengthy terme, automotive seul ce qui marche est rarement mis en valeur ». Sur les inondations, les plans de prévention et les mesures prises auraient permis d’économiser « 39 % sur le montant des dommages actuels ». Prenant l’exemple des fissures, Antoine Quantin détaille un sure nombre de mesures « peu coûteuses » qui pourraient faire l’objet d’un dispositif public d’accompagnement à construire.
De son côté, le médiateur de l’assurance, Arnaud Chneiweiss, va plus loin. Une des options serait déjà d’arrêter de construire en zones inondables. Et même de se poser la query s’il est raisonnable de continuer à résider dans ces zones, compte tenu du coût des réparations ? Ce qui impliquerait de revoir le fonds Barnier, dont l’objet consiste à financer les indemnités d’expropriation de biens exposés à un risque naturel majeur. Ou encore de revoir le Code de l’assurance, qui impose de réparer à l’identique les dégâts provoqués par l’épisode climatique.