Un visage connu fait à nouveau son apparition auprès des associations engagées dans la défense de l’enfance. Sarah El Haïry, autrefois ministre déléguée chargée de la Jeunesse et des familles du gouvernement de Gabriel Attal, est nommée haute-commissaire à l’Enfance. Son nom circulait depuis plusieurs semaines et vient d’être confirmé par la voix de Sophie Primas, porte-parole du gouvernement, à la suite d’un Conseil des ministres.
Cette figure du Modem se trouve être une proche de François Bayrou, empêtré dans un scandale de Notre-Dame-de-Bétharram. Elle a à ce sujet été interpellée sur X par la députée FI et éducatrice spécialisée Marianne Maximi : « Nous en sommes à 150 plaintes déposées dans l’affaire Bétharram. Vous n’en avez pas dit un mot. Maintenant que vous êtes nommée au Haut-commissariat à l’enfance, allez-vous enfin prendre position et défendre les victimes ? » Son profil inquiète, la proximité avec François Bayrou également : « Pourquoi nommer quelqu’un qui est proche de ce même gouvernement ? Cela ne garantit pas la stabilité », défend Claire Bourdille, fondatrice du collectif Enfantiste.
Nous en sommes à 150 plaintes déposées dans l’affaire Bétharram.
Vous n’en avez pas dit un mot @sarahelhairy.
Maintenant que vous êtes nommée au Haut-commissariat à l’enfance, allez-vous enfin prendre position et défendre les victimes ?
– Marianne Maximus (@MarianneMaximi) 5 mars 2025
La tâche qui attend l’ancienne ministre sans ministère est colossale. Mineurs sans hébergement, violences intrafamiliales, enfants à la rue… « L’urgence de la situation de la protection de l’enfance » selon le Conseil économique social et environnemental (CESE) impose une action politique d’envergure. Notamment celle d’appeler « l’État et les départements à assumer leurs responsabilités, de protéger efficacement les enfants malmenés par le système, de faire respecter les droits de l’enfant et de recruter », indique le CESE.
« Un ministère, c’est trop demander ? »
Les acteurs de terrain se faisaient jusqu’alors pressants, en demande d’interlocuteur pour la grande oubliée du gouvernement Bayrou : l’enfance. Le locataire de Matignon n’a pas daigné reconduire le ministère sur la question, provoquant l’ire des associations. Elles récoltent « des miettes », selon Lyes Louffok, militant pour les droits des enfants : un Haut-commissariat.
Cette structure administrative est placée auprès du « super-ministère » du Travail et des solidarités de Catherine Vautrin. « Sérieusement, un ministère, c’est trop demander ? Ce haut-commissariat ne permet pas à sa représentante de participer au Conseil des ministres et elle n’a aucune autorité vis-à-vis des autres ministères », s’agace Arnaud Gallais, le président de l’association Mouv’Enfants.
Des incertitudes sur les modes de financement et les moyens humains mobilisés font craindre un fonctionnement « au rabais ». Pour Shirley Wirden, responsable nationale des droits des femmes au PCF, cette structure n’est qu’une pierre supplémentaire au chantier qu’est la dégradation de la protection de l’enfance. « Il y a des besoins colossaux pour les mères monoparentales ou pour les familles précaires. Lorsque Élisabeth Borne était première ministre, elle avait promis de s’y atteler, en vain. C’est un véritable mépris », dénonce l’adjointe à la mairie de Paris Centre aux Affaires sociales, à l’égalité et à laprotection de l’enfance. Surtout que les mesures promises tardent à être mises en place.
En décembre, Emmanuel Macron avait promis sur X que cet organisme serait créé « pour janvier » car « la protection des plus jeunes est au cœur de mon engagement ». Puis les semaines se sont enchaînées, la colère s’est accumulée et jusqu’à ce mercredi, le haut-commissariat à l’Enfance n’avait aucune existence concrète. Son lancement a pourtant été officialisé le 13 février en Conseil des ministres, deux jours après la publication d’un décret au Journal officiel.
« Chaque jour qui passe est un jour perdu pour réformer le système de protection de l’enfance et la grave crise qui touche le secteur, se scandalise Lyes Louffok. Des enfants dorment dans la rue, l’aide sociale à l’enfance (ASE) s’effondre et le gouvernement tergiverse pour mettre quelqu’un à la tête d’un haut-commissariat. » L’annonce de la nomination de Sarah El Haïry rompt avec une longue période d’attente. Le militant pour les droits de l’enfant se remémore « une relation de travail saine » lorsqu’elle était ministre chargée de l’Enfance, entre février et septembre 2024. Espérons qu’une action concrète puisse durer plus de quelques mois seulement. Et avec des moyens.
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