NEW YORK, 22 avr (IPS) – Aujourd’hui, le spectre d’un conflit régional majeur, et même d’une éventuelle conflagration nucléaire, plane au Moyen-Orient. Malgré les sévères avertissements émis par le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, le système multilatéral a du mal à résoudre les défis mêmes qu’il était censé relever : les conflits, l’appauvrissement et l’oppression. Dans un monde profondément divisé, le Sommet du futur de septembre prochain offre une rare opportunité de consolider la coopération internationale et de combler les lacunes de la gouvernance mondiale.
Le problème est que trop peu de personnes et d’organisations de la société civile, en dehors des cercles de l’ONU, savent même que le Sommet a lieu. Ceci est caractéristique d’un manque de large consultation. Les choses ont mal commencé, avec peu de temps et d’opportunités pour la société civile de contribuer en décembre dernier à l’avant-projet du Pacte pour l’avenir, censé être un modèle de coopération internationale au 21e siècle.
Le projet zéro, publié en janvier 2024, n’a pas l’ambition que beaucoup espéraient pour relever l’énormité des défis qui nous attendent. Il ne mentionne qu’une seule fois le rôle de la société civile et rien sur l’espace civique, même si les restrictions croissantes des libertés fondamentales entravent gravement la transparence, la responsabilité et la participation nécessaires à la réalisation des Objectifs de développement durable (ODD) – l’ensemble d’objectifs ambitieux mais largement des engagements universels non réalisés que le Sommet entend réaffirmer.
Pour être clair, les co-facilitateurs du Sommet, l’Allemagne et la Namibie, se trouvent dans une position peu enviable, devant équilibrer les exigences des États qui souhaitent que le processus soit purement intergouvernemental et d’autres qui accordent de l’importance à l’engagement de la société civile. Certains ne voient aucun rôle pour la société civile : en février, une poignée d’États menés par la Biélorussie ont envoyé une lettre au Comité spécial de la Charte des Nations Unies remettant en question la légitimité des organisations de la société civile. Si leurs demandes étaient accédées, l’ONU passerait à côté de l’innovation et de la portée qu’apporte la participation de la société civile.
Le mois prochain, l’ONU accueillera une grande conférence de la société civile à Nairobi dans le but de fournir une plate-forme à la société civile pour qu’elle puisse apporter des idées au Sommet du futur. Mais, à peine un mois entre la sélection des candidats et l’organisation de la conférence, il reste à voir combien de représentants de la société civile, en particulier ceux des petites organisations des pays du Sud, seront en mesure d’y participer.
Il reste nécessaire que l’ONU prenne en compte les recommandations de Unmute Civil Society, qui incluent un appel à la nomination d’un envoyé de la société civile. Un tel envoyé pourrait conduire l’action de l’ONU auprès de la société civile au-delà de ses centres. Alors que beaucoup trouvent l’institution éloignée, un envoyé pourrait défendre une participation meilleure et plus cohérente des citoyens et de la société civile au sein des agences et bureaux tentaculaires de l’ONU. Jusqu’à présent, l’engagement de la société civile auprès de l’ONU reste profondément inégal et dépendant de la culture et du leadership des différents départements et forums de l’ONU.
Le Sommet ne peut que bénéficier de l’engagement de la société civile s’il veut atteindre ses objectifs, d’autant plus que de nombreux conflits font rage dans le monde, notamment à Gaza, au Myanmar, au Soudan, en Ukraine et ailleurs. De nombreuses idées de réforme de la société civile sont incluses dans le nouvel agenda pour la paix du secrétaire général de l’ONU, qui sera débattu lors du sommet, notamment le désarmement nucléaire, le renforcement de la diplomatie préventive et la priorité accordée à la participation des femmes aux efforts de paix.
Il est également urgent de s’attaquer aux niveaux d’endettement croissants auxquels sont confrontés de nombreux pays du Sud, qui détournent les dépenses publiques des services essentiels et de la protection sociale vers le service de la dette. La société civile soutient des efforts tels que l’Initiative de Bridgetown visant à obtenir des engagements de la part des pays riches en matière de restructuration et d’annulation de la dette des pays confrontés à une crise de remboursement. Mais la société civile doit être impliquée pour contribuer à l’élaboration des plans, car si le financement des négociations sur le développement n’inclut pas de garanties concernant l’espace civique et la participation de la société civile, il n’y a aucun moyen de garantir que les fonds publics profitent aux personnes dans le besoin. Au lieu de cela, les régimes autocratiques pourraient les utiliser pour renforcer les appareils d’État répressifs et les réseaux de corruption et de clientélisme.
La société civile appelle en outre à des réformes de l’architecture financière internationale. Il s’agit notamment d’exiger que les décisions du groupe d’économies puissantes du G20 relèvent du cadre de responsabilité de l’ONU et de répartir équitablement les parts et les prises de décision au Fonds monétaire international et à la Banque mondiale, actuellement contrôlés par quelques pays hautement industrialisés.
Mais on ne sait pas exactement combien de propositions transformatrices de la société civile en faveur de réformes de la gouvernance mondiale aboutiront dans les résultats finaux du Sommet du futur. Jusqu’à présent, la transparence a été limitée en ce qui concerne les négociations, les archives et les textes de compilation des États membres de l’ONU, bien que la société civile ait montré son engagement en soumettant plus de 400 soumissions écrites au processus du Pacte pour l’avenir.
Il est troublant de constater que peu de gouvernements ont consulté au niveau national les groupes de la société civile sur leurs positions pour les négociations du Sommet du futur. Si ces tendances se poursuivent, la communauté internationale manquera une occasion clé d’améliorer la vie des générations futures. Il n’est pas trop tard pour impliquer résolument les citoyens et la société civile dans le processus. Les objectifs du Sommet sont trop importants.
Mandeep S. Tiwana est directeur des preuves et de l’engagement de CIVICUS et représentant auprès de l’ONU à New York.
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