Dans un arrêt historique, la Cour internationale de justice (CIJ) a déclaré illégale l’occupation des territoires palestiniens par Israël, marquant ainsi un tournant dans le long conflit israélo-palestinien. Cet avis consultatif, demandé par l’Assemblée générale des Nations Unies, a fait des vagues dans la communauté internationale et a relancé les débats sur l’avenir des territoires occupés.
La décision de la CIJ : un appel au changement
Vendredi, la Cour internationale de Justice (CIJ) a conclu, par 12 voix contre 3, que l’occupation des territoires palestiniens par Israël était illégale. La CIJ a estimé qu’Israël déplaçait de force des Palestiniens, exploitait des sources d’eau et annexait de vastes étendues de territoire occupé « par la force ». La Cour a également statué qu’Israël devait cesser toute construction de colonies en Cisjordanie et indemniser les Palestiniens pour les violations des droits de l’homme commises dans les territoires occupés.
La décision porte spécifiquement sur les actions d’Israël en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est, et à Gaza. Elle appelle les Nations Unies, en particulier le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale, à prendre des mesures pour mettre un terme « rapide » à l’occupation illégale par Israël.
Réponse d’Israël et réactions nationales
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou a rapidement rejeté la décision de la CIJ, la qualifiant de « fausse » et insistant sur le fait que la Cisjordanie est une terre juive. Netanyahou a déclaré : « Le peuple juif n’occupe pas sa propre terre – ni notre capitale éternelle Jérusalem, ni la terre de nos ancêtres en Judée et Samarie. »
Certains des partenaires de la coalition radicale de Netanyahou ont appelé à des réponses encore plus fortes. Le ministre des Finances, Bezalel Smotrich, a suggéré que Netanyahou annexe formellement toute la Cisjordanie et Jérusalem-Est si la Cour devait statuer contre Israël. Smotrich a également promis d’accélérer la construction de colonies pour « contrecarrer la création d’un État palestinien ».
Perspectives palestiniennes et optimisme prudent
Si la décision de la CIJ est considérée comme une victoire pour les droits des Palestiniens, de nombreux militants et experts juridiques en Cisjordanie se montrent prudents quant à son impact immédiat. Zainah el-Haroun, porte-parole d’Al-Haq, une organisation palestinienne de défense des droits de l’homme, a souligné que les décisions précédentes de la CIJ n’avaient pas conduit à une action internationale significative contre Israël.
Les militants palestiniens soulignent que la décision doit être interprétée dans le contexte de la Nakba, ou « catastrophe », de 1948, lorsque les milices sionistes ont expulsé environ 750 000 Palestiniens de leurs terres pour créer l’État d’Israël. Diana Buttu, une experte juridique palestinienne, a exprimé le souhait que la CIJ fasse référence à la Nakba pour mettre en évidence le comportement historique d’Israël dans les territoires occupés.
La crise humanitaire en cours
La décision de la CIJ intervient dans le contexte de la guerre en cours menée par Israël à Gaza, qui a entraîné une crise humanitaire dévastatrice. Selon le ministère palestinien de la Santé, au moins 38 848 Palestiniens ont été tués depuis le 7 octobre 2023, la majorité étant des civils. Le conflit a rendu Gaza en grande partie inhabitable, avec des épidémies de maladies telles que la polio et le choléra, et de graves pénuries alimentaires dues au siège de l’enclave par Israël.
Réactions internationales et conséquences potentielles
La communauté internationale a réagi de manière mitigée à la décision de la CIJ. Si de nombreux pays et organisations de défense des droits de l’homme ont salué la décision, d’autres ont exprimé des inquiétudes quant à son applicabilité.
Le ministre britannique des Affaires étrangères, David Lammy, a annoncé que le Royaume-Uni reprendrait son financement à l’agence des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens (UNRWA), en versant 21 millions de livres (27 millions de dollars) d’aide. Cette décision intervient après que l’UNRWA a assuré qu’elle avait pris des mesures pour « garantir qu’elle respecte les normes de neutralité les plus élevées ».
La voie à suivre : défis et opportunités
La décision de la CIJ, bien que non contraignante, a un poids moral et juridique considérable. Elle présente à la fois des défis et des opportunités pour la communauté internationale :
Mécanismes d’application : L’absence de mécanismes d’application directe des décisions de la CIJ constitue un défi pour la mise en œuvre des recommandations de la Cour. Pression diplomatique : La décision pourrait accroître la pression diplomatique sur Israël et ses alliés pour qu’ils s’attaquent à l’occupation et à ses conséquences. Action de l’ONU : La balle est désormais dans le camp du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale de l’ONU pour prendre des mesures concrètes en vue de mettre fin à l’occupation. Expansion des colonies : La décision appelle explicitement à la fin de la construction de colonies, ce qui accroît la surveillance des actions d’Israël en Cisjordanie. Aide humanitaire : La décision pourrait conduire à une attention internationale accrue sur la fourniture d’une assistance humanitaire aux Palestiniens, en particulier à Gaza.
Conclusion : un tournant ou un statu quo ?
La décision de la CIJ représente une victoire juridique et morale importante pour les Palestiniens, mais son impact réel reste à déterminer. Alors que la communauté internationale se débat avec les conséquences de cette décision, la vie de millions de Palestiniens est en jeu. Les mois et les années à venir diront si cette décision marquera un tournant dans le conflit israélo-palestinien ou si elle rejoindra les déclarations précédentes en ne parvenant pas à modifier de manière significative le statu quo.
La voie à suivre nécessite un effort concerté de toutes les parties concernées – Israël, la Palestine et la communauté internationale – pour œuvrer à une paix juste et durable qui respecte les droits et les aspirations des Israéliens et des Palestiniens. Seul le temps nous dira si cette décision de la CIJ sera le catalyseur d’une telle transformation.