L’ignoble agression antisémite dont a été victime un sexagénaire à la sortie d’une synagogue à Paris 20e, ce week-end, est extrêmement inquiétante. L’auteur de cet acte inqualifiable aurait apostrophé la victime en l’accusant de tuer « les gens à Gaza ».
Comme si le fait d’être juif faisait de ce vieil homme l’un des responsables de l’horreur que vivent les Gazaouis. Une pseudo-justification de l’injustifiable. Dans la fabrique de l’antisémitisme, il n’est jamais question de solidarité avec qui que ce soit. Il s’agit toujours de désigner un réceptacle aux haines, aux frustrations et aux colères, aux jalousies quelles qu’elles soient.
C’est bien pour cela que l’accusation d’antisémitisme doit être maniée avec discernement. Non, l’attaque terroriste du Hamas du 7 octobre, avec son cortège d’horreurs, n’était pas un acte de résistance face à l’oppression israélienne, et rien ne peut la justifier. Mais, non, être solidaire avec les Palestiniens victimes de la colonisation et, aujourd’hui, d’une guerre monstrueuse, ce n’est pas être antisémite.
Accuser ceux qui demandent un cessez-le-feu à Gaza de reprendre le discours du Hamas, comme le font certains chroniqueurs et politiques, revient à décréter que l’antisémitisme se confond avec le refus de la politique du gouvernement de Benyamin Netanyahou et de l’extrême droite israélienne.
En brandissant l’accusation d’antisémitisme comme une arme de décrédibilisation des opposants à la politique du pouvoir israélien, ils prennent le risque d’occulter la spécificité de ce racisme, son histoire, son utilisation. Ils banalisent l’antisémitisme comme ils tentent de banaliser l’extrême droite.
C’est d’ailleurs en redéfinissant l’antisémitisme comme une critique de sa politique que Benyamin Netanyahou a justifié idéologiquement son « deal » consistant à oublier l’antisémitisme des formations d’extrême droite européennes en contrepartie de leur soutien à l’occupation, à la colonisation et à la guerre en Palestine. Mais qui peut croire que le racisme et le fascisme sont un vaccin contre l’antisémitisme ? La lutte contre ce dernier constitue un impératif majeur, et elle ne sera efficace que si elle est menée sans arrière-pensées et conjointement avec la lutte contre le racisme et la xénophobie.