Les salariés de Thales ne décolèrent pas. Quatorze semaines que les grèves s’enchaînent dans les entreprises du groupe de défense et d’aérospatiale français, sur fond de négociations annuelles obligatoires (NAO). Ce mercredi 9 avril, une délégation de l’intersyndicale – CGT, CFDT, CFE-CGC, CFTC et Supper (Syndicat unitaire et pluraliste du personnel du groupe Thales, de Solidaires) – du campus de Mérignac (Gironde) s’est déplacée jusqu’à l’Assemblée nationale pour rencontrer plusieurs députés.
Au-delà de la question des salaires, l’objectif est « d’alerter la représentation nationale sur la financiarisation du groupe, qui préfère distribuer des dividendes aux actionnaires plutôt que de verser une juste part aux salariés ou encore investir dans l’outil industriel », assure Franck Perrin, élu CGT.
Des augmentations de salaire
Fin mars, l’intersyndicale a envoyé une lettre ouverte à la direction sur les mobilisations autour des NAO 2025, qui ne cessent de s’amplifier. En 2024, Thales avait versé plus de 1 milliard d’euros aux actionnaires. « On a fait le calcul : cela représente 118 euros par mois par salarié Thales dans le monde, affirme le cégétiste. N’ont-ils réellement pas les moyens de monter le budget entre 3,5 et 4 % ? » Les salariés « exigent 3,5 % d’augmentations générales » contre les 2 % imposés fin janvier par la direction, qui a rejeté la totalité des propositions faites par les « partenaires sociaux ».
Le jour du déplacement a été soigneusement choisi. Entre les murs protégés de l’Assemblée Nationale, Éric Trappier, PDG de Dassault Aviation, est dans le même temps auditionné par les députés de la commission de la Défense nationale et des Forces armées. L’avionneur est actionnaire à 27 % de Thales, qui est l’un des fournisseurs prioritaires de Dassault Aviation, notamment pour la fabrication des Rafale et des Mirage.
« Depuis trois semaines, la ligne de production du radar RBE2 à destination du Rafale est à l’arrêt à la suite de la grève, explique Éric Pedeprat, délégué central CFDT, avant d’aller rencontrer les députés. Il faut qu’ils se rendent compte que, sans les investissements nécessaires dans l’outil industriel et un juste partage de la valeur, les ambitions affichées sont irréalisables. »
Des sous-investissements chroniques
D’autant plus que l’avionneur français compte encore doubler la production de son avion de guerre d’ici à 2026. « Thales se targue de procéder à 3 000 embauches en 2025, s’exclame Franck Perrin. Mais il y a eu 4 000 départs, entre les licenciements, les départs à la retraite ou les départs volontaires. Cela laisse un déficit net de 1 000 travailleurs. »
Le manque d’investissement dans les infrastructures et les équipements, combiné aux difficultés de recrutement de travailleurs formés, préoccupe les salariés, qui voient leurs conditions de travail se dégrader. « Nous sommes obligés de rappeler des retraités sur des affaires critiques dans le militaire qui sont en retard, car les jeunes ne sont pas assez formés et mis sous une telle pression que beaucoup finissent en burn-out », alerte le représentant CFDT.
Interrogé lors de son audition sur ces problèmes par le député socialiste Sébastien Saint-Pasteur, Éric Trappier a estimé que « ce n’était pas à l’actionnaire de gérer le dialogue social », ajoutant qu’il faisait « confiance à Patrice Caine (PDG de Thales – NDLR) » et rappelant que « l’État est aussi actionnaire de Thales ». Le problème est posé. « L’État doit contrôler l’argent public déversé dans les entreprises pour s’assurer qu’il serve à des efforts d’industrialisation et non à engraisser les actionnaires », rappelle l’élu CGT.
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