Une allumette jetée sur un amas de branches sèches. C’est l’image qui domine au service des urgences de l’hôpital Avicenne à Bobigny (Seine-Saint-Denis), après le refus de la direction de concéder des moyens supplémentaires et les compensations demandées pour ses personnels soignants mobilisés pendant les jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de Paris.
« La colère est immense. Nous trouvons très injuste que les aides-soignantes et les infirmières, déjà exsangues, ne soient pas concernées par la prime des JO, alors qu’Avicenne est un hôpital cible, désigné pour dispenser des soins aux participants, notamment aux journalistes, durant cette période », s’indigne Lucie Branco, représentante de la CGT, qui a lancé un appel à une grève illimitée, jeudi 30 mai, pour dénoncer une « inégalité de traitement » et les arguments « fallacieux » destinés à la justifier.
Dans la machinerie olympique, ces agents, dont le quotidien est déjà une lutte pour surmonter le manque chronique de moyens, avaient, selon le syndicat, au vu des sacrifices exigés, toute légitimité à prétendre aux primes, allant de 500 à 1 500 euros, concédées en mars dernier par le gouvernement aux fonctionnaires mobilisés durant cette manifestation sportive d’ampleur mondiale.
Non-alignement avec les autres fonctionnaires
« Quand nous avons demandé des explications sur l’absence d’alignement avec les agents de la police, de la SNCF, ou de la RATP, la direction nous a rétorqué que nous n’étions pas concernés, car notre rôle est, à leurs yeux, d’accueillir les patients quoi qu’il arrive, JO ou pas », pointe Lucie Branco.
S’appuyant sur les données relatives à la fréquentation des urgences hospitalières, jugée faible, lors des JO de 2012 à Londres, la direction a également balayé d’un revers de la main les alertes du syndicat concernant les répercussions de cet événement sur un service déjà aux abois qui, chaque année, voit arriver la période estivale avec appréhension.
« L’été est devenu une période de plus en plus critique dans les hôpitaux, en raison notamment du manque d’effectifs. Les soignants mobilisés durant cette période sont confrontés à des conditions de travail particulièrement dégradées », souligne Joran Jamelot, représentant de la CGT à l’Assistance publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP).
Au-delà de cette pénurie de moyens, devenue le lot commun des hôpitaux français, le syndicaliste pointe le cocktail particulièrement explosif concentré entre les murs des urgences d’Avicenne, ultime point de chute dans un département considéré par l’Agence régionale de santé (ARS) comme un désert médical avancé.
« Les urgences, c’est un peu le thermomètre de l’hôpital, le point de fixation de toutes les défaillances : manque de lits, de personnels, afflux de patients. À Avicenne, où les soignants sont en première ligne face à une population en très grande précarité, tout est démultiplié », souligne Joran Jamelot.
Selon le syndicaliste, faute de relais médicaux, c’est ici qu’échouent les personnes sans médecin traitant, celles qui sont sans hébergement, celles qui ont des troubles psychiatriques et n’ont pu trouver de lit dans les structures dédiées, les personnes âgées sans place dans les hôpitaux gérontologiques… Avec, pour conséquence, des actes de violence de plus en plus fréquents à l’encontre des personnels soignants, relève également Joran Jamelot. Et le syndicaliste de conclure : « Voilà la toile de fond catastrophique sur laquelle vont se greffer les jeux Olympiques, qui font peser la menace sérieuse de faire exploser une cocotte-minute déjà en ébullition. »
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