Dans sa thèse, publiée aux éditions le Bord de l’eau, le sociologue Mickaël Chelal évoque la cité de Seine-Saint-Denis où il a grandi et où il habite. Il décrit la façon dont la socialisation des « petits » s’y effectue aussi dans l’espace public grâce aux « grands » qui l’occupent.
Pourquoi avoir enquêté sur la cité où vous avez grandi, le quartier des Marnaudes, à Rosny-sous-Bois ?
L’idée était de gagner du temps. Les sociologues qui enquêtent sur les quartiers populaires sans en être issus se heurtent à la méfiance des gens de la cité vis-à-vis des personnes extérieures. Ce que j’ai fait relève de l’enquête ethnographique, quand on vit sur place et qu’on partage les conditions de vie des personnes. J’ai vraiment essayé de profiter de cette proximité pour passer le plus de temps possible avec les gens, être intégré et réussir à toucher à l’intimité.
Mais en même temps, pour essayer de garder des distances (et de l’objectivité), j’ai décidé de ne pas enquêter sur des amis directs ou sur des personnes de ma génération. J’ai donc suivi principalement deux groupes de personnes plus jeunes que je connaissais moins : l’un composé de jeunes hommes et l’autre d’adolescentes.
Comment ont réagi les habitants de la cité à votre enquête ?
J’ai toujours été considéré comme un intello dans la cité, parce que j’avais de bonnes notes, même en fréquentant le quartier intensément. Ce qui m’a beaucoup aidé, c’est d’y avoir beaucoup joué au foot depuis l’enfance. Comme je me débrouillais pas mal, j’arrivais à m’intégrer dans de nombreux groupes. Cela m’a donné une double casquette, celle de l’intello fort au foot.
Les gens ne savaient pas trop ce qu’est la sociologie, mais…