Ce lundi, les six candidats de la plus incertaine des circonscriptions nîmoises (Nîmes-Uzès) se sont retrouvés au grand débat organisé par le Club de la presse et Midi Libre, au Palace. Un échange musclé, qui a fait ressortir les divergences sur de nombreuses thématiques.Participants : Aurélien Colson (Modem), Sylvie Josserand (RN), Aïcha Terbèche (LO), Laura Affortit (Régionalistes), Clément Stevant (LR), Nicolas Cadène (Nouveau Front populaire).
Quel levier actionnerez-vous pour améliorer le pouvoir d’achat ?
C’est une des principales inquiétudes des Français, depuis qu’une inflation à deux chiffres a fait flamber les prix de l’alimentation, de l’essence ou de l’électricité. Pour Aurélien Colson, le blocage des prix ne fonctionne pas, « ça déplace l’inflation ». Ses propositions concrètes : « Une mutuelle publique à un euro par jour pour 3 millions de Français, rénover au niveau énergétique 300 000 logements de plus par an en taxant les rachats d’actions des grandes entreprises et baisse de la facture d’électricité de 15 % à partir d’octobre ».La hausse des salaires, beaucoup la promettent, sans être toujours très clair sur les façons de la financer. « On fera des lois alléger les budgets des familles pour meilleure qualité de vie », assure Laura Affortit.
Augmenter le Smic ?
« le Smic à 1 600 € net, l’indexation des salaires sur l’inflation, la revalorisation des petites retraites », sont au cœur du programme de Nicolas Cadène. « Mais comment fera un patron pour rajouter 200 € par feuille de salaire ? Il devra licencier », le coupe Aurélien ColsonAugmenter le salaire minimum de 10 % dans la limite de trois Smic et baisser les cotisations sociales, lutter contre l’assistanat propose Clément Stevant quand Aïcha Terbèche, dans la logique de lutte des classes de son parti, lance un « Smic à 2000€ net par mois. On est le pays où il y a le plus de riches au monde, l’argent part à la guerre ».
Sylvie Josserand, elle, évoque une hausse non chargée des salaires. « S’ils augmentent, les entreprises mettront la clé sous la porte. » Sur une proposition aventureuse de réouvrir des EPR pour faire baisser les factures d’électricité, Clément Stevant se fait reprendre par Aurélien Colson : « On n’a pas fermé d’EPR et dans le programme que je soutiens, on va en ouvrir huit. »*
Faut-il revenir sur la loi de 2023 qui enclenche une réforme des retraites ?
Départ à la retraite à 60 ans ? 62 ans ? 64 ans ? Chacun brandit ses chiffres ! Mais ce sont les larmes spontanées de Laura Affortit qui ont, pendant quelques minutes, rendu le sujet vraiment humain et sensible : « Je suis du peuple. Mes parents ont 65 ans et sont malades. Ils ont travaillé toute leur vie et ne profiteront pas de leur retraite. Comment travailler cinq ans de plus quand on est déjà épuisé ? » Face à elle, il y a les partisans du “On ne touche à rien”, comme Clément Stevant qui ne revient pas sur le départ à 64 ans mais « indexe les retraites sur l’inflation ».
Aurélien Colson propose lui aussi d’adosser les retraites à l’inflation et prévient : « La réforme a été faite car le régime des retraites était en déficit de 26 milliards. Avec la réforme, il est de 13 milliards et un milliard a ainsi pu être affecté à la pénibilité. Remettre la retraite à 60 ans, ça coûtera 40 milliards d’euros par an. Et il faudrait baisser les pensions de 4 000 € par an ».
Trouver 40 milliards
Mais d’autres assurent que c’est possible. « On veut revenir sur cette réforme injuste et inéquitable. Les retraites sont finançables : en supprimant les niches fiscales aberrantes, en renforçant la taxation des transactions financières, en créant une cotisation sur les dividendes des actionnaires, on arrive à 40 milliards », dit Nicolas Cadène.
Aïcha Terbèche, fidèle à sa doxa anticapitaliste, lance même « le retour à 37,5 ans de cotisations ». Enfin, Sylvie Josserand, temporise, comme son leader Bardella : « Comment financer la retraite avec 1,4 actif pour un retraité ? Nous allons commanditer un audit des finances publiques… Il faut adapter la retraite, certains voudraient travailler jusqu’à 68 ans, d’autres ont besoin d’être ménagés. »
Etes-vous pour l’abolition de la loi immigration ?
Sujet hautement inflammable et clivant ! « En 2022, 500 000 étrangers sont arrivés en France, et en sept ans, plus de deux millions. Depuis une dizaine d’années, on propose des quotas migratoires votés par le Parlement. Ça a toujours été refusé » : pour Clément Stevant, il faut réduire au maximum l’immigration légale et « ouvrir des centres d’asile fermés à l’extérieur des frontières de l’Europe ».Sylvie Josserand va plus loin encore, « la submersion migratoire » est un cheval de bataille du RN : « C’est un flux continu qui va s’accroître à cause de la misère et des problèmes climatiques. Peut-on accueillir dignement tous ces gens ? Non ! » Elle dénonce la libre circulation des migrants au sein de l’Union européenne, les OQTF jamais exécutées, et propose de délivrer des autorisations dans les ambassades pour entrer sur le territoire. Elle oppose « le projet migratoire de l’Europe et le pragmatisme du RN qui dit “on ne s’invite pas comme ça” ».« On est le pays qui expulse le plus », assure Aurélien Colson qui prône une politique « du juste milieu, républicaine et humaniste. 70 % des gars sur les chantiers sont étrangers, sans eux ce serait une catastrophe pour le BTP ». Laura Affortit ajoute que « en agriculture, beaucoup de main-d’œuvre vient d’Amérique Latine… »
Nicolas Cadène aussi plaide l’apport des étrangers à l’économie : « Dix milliards par an, dit l’OCDE ». Il souhaite renforcer la coopération internationale car « d’ici 2030, on redoute un milliard de personnes déplacées à cause du climat, ce sera de plus en plus difficile à gérer ». Fille d’immigrés, Aïcha Terbèche rappelle « qu’on est venu chercher les Algériens pour reconstruire la France après la guerre. C’est le pillage du monde qui crée les migrants ! »
Doit-on accélérer l’aide à l’Ukraine ?
Plusieurs positions se distinguent. Pour LR, Clément Stevant ne veut pas faire de «fausses promesses» en s’avançant sur une entrée de l’Ukraine dans l’UE. Il souhaite poursuivre un soutien massif, «financier et matériel», mais nous «n’irons pas jusqu’à envoyer des soldats en Ukraine».Pour Nicolas Cadène, il faut évidemment «soutenir la souveraineté de l’Ukraine», à travers une livraison d’armes «tant que nécessaire», une annulation de la dette extérieur de l’Ukraine et la poursuite de la saisie des avoirs des oligarques Russes. A cela, il ajoute «l’envoi de casques bleus pour sécuriser les centrales nucléaires».Toujours dans le soutien à l’Ukraine, Aurélien Colson veut lui aussi un « soutien absolu et continu à l’Ukraine. Leurs combats sont également les notre ». Appelant à « ne pas baisser la garde », il insiste sur la guerre numérique que livre aussi la Russie via des « cyberattaques contre les hôpitaux qui partent de la région de Saint-Petersbourg ».
A l’opposée, Sylvie Josserand apporte une vision bien différente de l’attaque de la Russie sur l’Ukraine : « Si Poutine est entré en guerre, c’est qu’il veut une zone neutre. L’Ukraine doit rester une zone neutre. Il ne faut pas qu’il y ait en Ukraine des canons pointés vers la Russie.» Laisse-t-elle faire la Russie en Ukraine ? Non, insiste-t-elle, « mais je privilégie la voie diplomatique ». Sur la même ligne non interventionniste, mais pour d’autres raisons, Aïcha Terbèche veut un « arrêt de l’impérialisme. Nous pouvons tous vivre ensemble !» Tout en mettant dans le même sac «Poutine, Biden, Macron… ce sont tous des dictateurs».Enfin, plus mesurée, Laura Affortit veut aussi privilégier «la voie diplomatique» «tout en soutenant le peuple ukrainien».
Comment lutter contre les déserts médicaux ?
« Il m’a fallu trois ans et demi pour trouver un médecin généraliste Avec mes enfants, j’ai souvent dû aller aux urgences faute de solution. » Le témoignage de Laura Affortit pose bien la situation. Près de 15 % des Gardois n’ont pas de médecin traitant et « les urgences sont débordées. Il faut revenir à la raison », ajoute Sylvie Josserand. « Il faut donner plus de moyens à l’hôpital et y embaucher plus de personnel », dit Aïcha Terbèche.Clement Stevant rappelle que six millions de Français n’ont pas de médecin traitant et propose que « les étudiants en médecine fassent leur dernière année en cabinet dans un désert médical ». Tout comme Nicolas Cadène qui souhaite « inciter les médecins de ville a exercé quelque temps dans les déserts médicaux. Nous voulons un budget en hausse pour les hôpitaux avec un accès aux urgences dans un délai court partout sur le territoire. »
Aurélien Colson rappelle qu’on formait 8 000 médecins par an en 2017, « avec la suppression du numerus clausus, 16 000 médecins seront formés en 2027 ». En attendant, il propose de « libérer 20 000 rendez-vous médicaux en autorisant pharmaciens et infirmiers à pratiquer de petits gestes médicaux ». Il a aussi incité sur la prise en charge de l’endométriose qui concerne 10 % des femmes.
Les questions qui fâchent des journalistes
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