Le travail est revenu au cœur des préoccupations sociales après s’être évanoui pendantdeux décennies derrière le problème de l’emploi. Mais ce retour ne fait pas pour autantconsensus. D’autant que ce retour, alors qu’il faut déterminer la place du travail dans nossociétés, s’accompagne, d’une nouvelle offensive de « dérégulation » qui fait du salaire, del’emploi et plus globalement des droits sociaux la variable d’ajustement de la politiqueéconomique. En augmentant la pression sur les travailleurs et en réduisant leursprotections, la Macronie assume la continuité avec le quinquennat sarkoziste et affiche sonconservatisme. Ainsi, le discours sur le mérite et l’égalité des chances s’efface. On revientà une argumentation plus simple : la valeur du travail sert à la stigmatisation des personnessans emploi.Les « acquis sociaux » représenteraient « les » blocages à lever pour favoriser ledéveloppement de nouvelles initiatives. En l’absence d’un diagnostic solide, latransformation actuelle du travail se trouve inaccomplie, biaisée, et surtout contrainte pardes critères financiers. La France n’est pas confrontée à un problème classique deredistribution des ressources de main-d’œuvre entre secteurs. Nous sommes face à unerestructuration d’ensemble des activités et même de la société, avec une recomposition desfonctions productives impliquant la reconnaissance d’une nouvelle place au travail.Comme le montrent les débats ouverts sur l’assurance chômage, l’emploi des seniors et lamaitrise des dépenses sociales, le gouvernement a opté pour les thèses du Medef. Del’indemnisation des sans-emploi à la représentation des salariés dans l’entreprise, lesprincipaux droits sociaux « nuiraient à l’emploi ». Alors que l’objectif affiché est lavalorisation de la qualification c’est à la multiplication des emplois peu qualifiés etfaiblement rémunérés que nous assistons avec un allongement de la durée du travail au détriment du relèvement de son efficacité. Est évoqué le besoin d’un « contrat de travail-senior », alors que la disjonction homme/travail se creuse de plus en plus, accompagné de son lot de pathologies, de souffrances, source d’inefficacité majeure et porteur d’ un forttraumatisme social.S’opposant totalement au paradigme libéral, l’hypothèse syndicale est que le travail estinséparable de la place accordée à la personne humaine. L’organisation économiqueactuelle où le travail est contraint, est « trop petite pour permettre le développementhumain» estime le sociologue Yves Clot.Opérer une simple redistribution salariale comme proposé par les solutions libérales, nepeut suffire. S’attaquer à la manière dont se crée la richesse est la priorité, en s’interrogeantsur la place du travail . Une croissance durable suppose de nouveaux paris, justifie des initiatives pour reconstruire de nouveaux cadres de sécurité pour les projets comme pourles travailleurs.Réfléchir à un droit d’intégration dans l’emploi, c’est réfléchir à un système cohérent degaranties permettant au salarié d’acquérir une qualification professionnelle, de faire valoirses compétences dans l’entreprise, d’exercer une activité compatible avec sa viepersonnelle, de retrouver un travail s’il perd son emploi. Cela suppose, en s’attaquant à lacroissance financière et en créant les conditions d’un nouveau type de productivité,d’assurer une vraie rupture avec la déflation salariale appliquée depuis des décennie.