À quelques années près, l’affaire n’aurait pas empêché François Bayrou de rester en poste au gouvernement tant, au fil des quinquennats, la règle selon laquelle un ministre mis en examen doit quitter son poste s’est de moins en moins appliquée. Mais on est alors en 2017 et le principe vaut encore lorsque éclate l’affaire dite « des assistants parlementaires » pour laquelle François Bayrou et dix anciens cadres et élus centristes comparaissent devant la Justice depuis le 16 octobre.
Le président du Modem, allié d’Emmanuel Macron, est attendu ce mardi en début d’après-midi à la barre du tribunal correctionnel de Paris pour ce procès qui doit durer jusqu’au 15 novembre. Dans cette affaire, les prévenus sont soupçonnés d’avoir utilisé entre 2005 et 2017 des fonds européens pour rémunérer des assistants parlementaires qui auraient travaillé en réalité pour l’UDF, puis le MoDem. Pour un complete d’environ 350 000 euros.
François Bayrou accusé d’être le « décideur » du « système »
Sur le banc, au côté du triple candidat à la présidentielle et actuel maire de Pau : l’ex-garde des Sceaux Michel Mercier, cinq anciens eurodéputés dont Jean-Luc Bennahmias, trois cadres, un assistant parlementaire de l’époque, ainsi que les deux partis en tant que personne morale. À l’difficulty de près de six ans d’instruction, quatre autres personnes – Sylvie Goulard, Nathalie Griesbeck, l’actuelle députée MoDem Maud Gatel et Robert Rochefort (qui avait été placé sous le statut de témoin assisté) – ont, elles, bénéficié d’un non-lieu.
François Bayrou, qui était à la tête du parti avec Marielle de Sarnez, décédée en 2021, est renvoyé pour complicité par instigation de détournement de fonds publics, soupçonné d’avoir été le « décideur » du « système », quand Michel Mercier est soupçonné d’en avoir été un « rouage essentiel » en tant que trésorier. Les autres prévenus sont jugés pour détournement de fonds publics, complicité ou recel de ce délit. Mais la défense du maire de Pau réfute l’existence de tout « système ». « La plupart des accusations ont été levées. Et je tiens à le répéter : je n’ai jamais, pas une seule fois, et nous n’avons jamais comme responsables, comme parti, participé au moindre détournement », a martelé, dans la République des Pyrénées, François Bayrou, qui encourt notamment l’inéligibilité.
Une éjection rapide du gouvernement en 2017
C’est la dénonciation en mars 2017 d’une ex-élue Entrance nationwide (devenu Rassemblement nationwide), Sophie Montel, sur des emplois fictifs de collaborateurs de dix-neuf de ses collègues de tous bords, qui a déclenché l’ouverture d’une enquête. Un ancien collaborateur du MoDem avait, ensuite, affirmé avoir été en partie rémunéré en 2011 comme assistant de Jean-Luc Bennahmias, alors qu’il travaillait en réalité pour le parti à Paris.
Les conséquences sur le plan politique n’ont pas tardé. Un mois seulement après leur nomination, les ministres Modem du gouvernement Philippe ont dû démissionner en juin 2017. Soit Sylvie Goulard, ministre des Armées, Marielle de Sarnez, aux Affaires européennes, et François Bayrou, garde des Sceaux alors en cost d’une loi sur la « moralisation de la vie publique ». Depuis, Sylvie Goulard a été recasée seconde sous-gouverneur de la Banque de France en janvier 2018. Un poste qu’elle a quitté un an avant la fin de son mandat pour rejoindre le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères.
Pour préserver son allié président du Modem et bien qu’il soit toujours mis en trigger, l’exécutif a mis les petits plats dans les grands. François Bayrou s’est ainsi vu proposer, dès 2020, le poste de Haut-Commissaire au plan en guise de lot de comfort alors que depuis longtemps la règle de l’éjection des ministres poursuivis par la justice ne prévaut plus en Macronie. À tel level, que l’actuel garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti, doit être entendu, ce même mardi 7 novembre, pour une affaire de prise illégale d’intérêts par la Cour de justice de la République.