L’évasion fiscale pèse lourd. « Ce n’est pas une mince affaire, ni en volume, ni en symbole. En volume, elle représente un manque à gagner pour la France de 80 à 100 milliards d’euros. Symboliquement, c’est un sujet pour le consentement à l’impôt », cadre Nicolas Sansu, député communiste, lors de la présentation, aux côtés de la parlementaire insoumise Mathilde Feld, d’un rapport sur la fraude fiscale, jeudi à l’Assemblée nationale.
« Quand vous demandez aux citoyens des sacrifices sur le ticket modérateur, le gel des retraites, la taxe sur l’électricité et qu’en même temps des milliards s’échappent, c’est dangereux pour la démocratie », s’inquiète-t-il. La question du consentement à l’impôt est au cœur du rapport, qui rappelle que dans les sondages, 55 % des Français souhaitent que « l’État dépense davantage pour lutter contre la fraude et l’évasion fiscale ».
Des moyens en baisse
Une opinion dont n’a que faire le gouvernement ; c’est là un autre enseignement du rapport. Les moyens mis pour la lutte contre la fraude fiscale fondent. Les effectifs dédiés à celle-ci vont diminuer de 550 postes à temps plein dans le budget 2025. Ils étaient encore 12 576 en 2014 et n’étaient plus que 10 154 en 2023.
Le gouvernement mise sur l’informatique pour remplacer les bras manquants, mais, rappelle Nicolas Sansu, si « 54 % des contrôles sont faits par informatique, ces derniers ne représentent que 13 % des sommes rapportées ». Cette pénurie de moyens a des effets : en 2015, les contrôles fiscaux permettaient d’encaisser 12,243 milliards d’euros ; en 2023, la somme collectée se limitait à 10,591 milliards d’euros.
Signe que l’évasion fiscale est devenue importante dans le débat public, la Macronie a pris des initiatives contre ce fléau. Mais « le plan fraude de Gabriel Attal a accouché d’une souris », dénonce l’ancienne députée FI Charlotte Leduc, autrice d’un précédent rapport sur le sujet.
« Le plan fraude de Gabriel Attal a accouché d’une souris »
Charlotte Leduc, ex-députée FI
Plusieurs amendements de gauche ont été votés dans la partie recette du projet de loi de finances 2025 (PLF), même si cette dernière a ensuite été rejetée par l’Assemblée. Des mesures contre la pratique du Cumcum ou le régime Dutreil (deux stratégies d’évitement de l’impôt sur les dividendes), contre le régime mère-fille des multinationales, et pour un impôt minimal de 2 % du patrimoine sur les milliardaires ont été votées par les députés.
S’ils ne sont pas retenus par le gouvernement au terme des débats, ce sera un bon thermomètre de sa détermination à endiguer l’évasion. « Il y a les effets de manche et les actions véritables. On verra ce que le gouvernement retient », prévient l’insoumise Mathilde Feld.
Le rapport fait par ailleurs 17 recommandations : recruter 4 000 agents pour lutter contre la fraude fiscale ; une mesure annuelle et officielle de celle-ci (établie aujourd’hui par les syndicats des finances publiques ou des associations) ; un commissaire à la lutte contre l’évasion fiscale ; ou encore l’élargissement de la liste des paradis fiscaux.
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