Pour ramener le déficit public à 5 % du PIB en 2025, alors attendu à plus de 6 % cette année, le nouveau gouvernement semble déterminé à repousser les limites… du pouvoir d’achat des Français. Lors de son discours de politique générale, mardi 1er octobre, le premier ministre Michel Barnier avait pourtant évoqué un relèvement de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (CEHR), laissant entrevoir une mise à contribution significative des plus aisés.
Mais économiser la somme de 60 milliards d’euros, que s’est fixée l’exécutif fraîchement nommé, ne se fera pas sans douleur pour le contribuable. En effet, le nouveau ministre de l’Économie, Antoine Armand, envisage de profiter d’une retombée du prix de l’électricité sur les marchés internationaux pour augmenter la taxe intérieure de consommation finale sur l’électricité (TICFE) au-delà de 32,44 euros par mégawattheure, qui était le niveau de taxation d’avant la crise inflationniste.
Selon une information des Échos, paru mardi 8 octobre au soir, le projet de budget 2025 prévoit que l’impôt sur l’électricité remonterait même autour de 40 euros par mégawattheure, voire 42 euros, soit un coût annuel de 120 euros pour un ménage moyen.
Doubler la majoration précédemment programmée
Cette taxe avait été abaissée à moins d’un euro le mégawattheure en 2022 pour enrayer les effets de la crise énergétique, déclenchée par la guerre en Ukraine. Depuis, l’ancien gouvernement l’avait rehaussée, la portant à 22,50 euros aujourd’hui, pour une fin du bouclier tarifaire programmée au 1er février 2025.
Mais Michel Barnier ne se contentera pas d’un simple retour à la normale. Il entend ainsi doubler la majoration précédemment programmée, ce qui permettrait à l’État d’engranger plus de 6 milliards d’euros, contre les 3 milliards prévus.
Interrogé mardi 8 octobre sur France Info, le ministre chargé des Comptes publics, Laurent Saint-Martin, était resté évasif sur l’ampleur de cette hausse mais avait néanmoins assuré que, malgré la fin du bouclier tarifaire, les 80 % de ménages aux tarifs réglementés devraient voir leur facture fondre de 10 % l’an prochain, grâce à la baisse du prix de gros.
Selon l’économiste de l’énergie Jacques Percebois, une telle augmentation annulerait la baisse du tarif réglementé de vente (TRV), promise par l’exécutif pour faire passer la pilule. Après avoir subi de plein fouet l’inflation, « les usagers ne profiteront, a contrario, pas de la baisse du cours de l’électricité sur les marchés », nous explique le directeur du Centre de recherche en économie et droit de l’énergie (Creden).
« Les Français modestes et les classes moyennes auront la double peine »
« C’est une fausse promesse qui permet de justifier que l’on ponctionne de manière disproportionnée les fragiles pour éviter que les ultrariches ne mettent la main à la poche ! » enrage le député FI et rapporteur sur le budget énergie 2025, Maxime Laisney. Selon lui, « augmenter une taxe adossée au niveau de consommation est d’ailleurs forcément une très mauvaise nouvelle pour les plus pauvres, qui, on le sait, vivent davantage dans des passoires thermiques ».
Il en va de même pour la responsable de plaidoyer « Justice fiscale et inégalités » d’Oxfam, Layla Abdelké Yakoub, qui estime qu’« une fiscalité verte, juste et efficace, est une fiscalité qui cible les comportements les plus polluants et qui ne met pas en difficulté les plus fragiles. Et là, comme on n’offre pas d’alternatives aux gens pour mieux se loger, se chauffer, s’isoler… cette hausse d’impôt sur l’énergie ne sonne pas comme une mesure juste. On ne peut pas séparer le social de l’écologie sur ces questions ».
La question semble diviser au sein du nouveau gouvernement. La ministre de la Transition écologique et de l’Énergie, Agnès Pannier-Runacher, était elle aussi de cet avis, interrogée dimanche sur le plateau de France 3 : « Il faut être très vigilant parce que les Français modestes et les classes moyennes (…) auront la double peine. Ce sont souvent eux qui vivent dans des passoires thermiques », avait-elle souligné.
Elle pointait déjà « le risque » d’aller trop loin dans l’augmentation de cette taxe, qui pourrait peser sur la facture des plus modestes. « Si la taxe revient à son niveau d’avant la crise, comme les prix ont retrouvé un niveau normal, le prix que payent les Français baissera. Simplement, il ne faut pas aller au-delà », avait-elle poursuivi.
Le budget 2025, qui devrait être présenté le 10 octobre en Conseil des ministres, avec neuf jours de retard sur le calendrier défini par la loi, devrait permettre d’y voir plus clair, bien que certains arbitrages soient soumis au débat parlementaire. Pour le député Maxime Laisney, une telle augmentation de la TICFE apporte un élément de réponse sur la manière dont le gouvernement entend renflouer les caisses de l’État.
Le média que les milliardaires ne peuvent pas s’acheter
Nous ne sommes financés par aucun milliardaire. Et nous en sommes fiers ! Mais nous sommes confrontés à des défis financiers constants. Soutenez-nous ! Votre don sera défiscalisé : donner 5€ vous reviendra à 1.65€. Le prix d’un café.Je veux en savoir plus !