Deux études ont dressé, ces dernières semaines, un bilan de santé des maires. Et celui-ci s’avère inquiétant.
Des élus fatigués. Surmenés. Proches de la dépression pour certains… mais tout de même portés par leur mission. Deux études – l’une publiée cet été à la demande de l’Association des maires ruraux de France (AMRF), l’autre commandée par l’Association des maires de France (AMF) avant son congrès et dévoilée cette semaine par Le Parisien – ont à nouveau dressé un bilan de santé relativement inquiétant des maires dans le pays.
3 % proches du burn-out
C’est l’observatoire Amarok, basé à Montpellier et dirigé par le professeur Olivier Torrès, qui a signé la première, calquée sur un travail similaire sur la santé des chefs d’entreprise. Deux chiffres émergent : 70 % des maires des communes de moins de 10 000 habitants sont satisfaits de leur fonction d’élu, mais, c’est un bémol, 31 % présentent un début d’épuisement. L’étude met même en exergue un autre constat : “3,48 % présentent un risque sévère d’épuisement. Cela représente tout de même entre 1 100 et 1 200 élus, ce qui n’est pas rien”. Si on compare ces conclusions à ce qui est observé depuis plusieurs années chez les chefs d’entreprise, “on retrouve à peu près les mêmes chiffres”.
Olivier Torrès le constate : “Il y a, chez les maires, beaucoup de similitudes avec les patrons de PME. Être dirigeant, comme peut l’être aussi un maire, c’est bon pour la santé, mais c’est épuisant”. Et ce qui épuise le plus le maire, “c’est le poids de la bureaucratie”. Et, “plus il va vivre sur sa commune des événements négatifs, plus cela va accentuer son état d’épuisement”.
Sacerdoce républicain
L’étude d’Amarok montre qu’un maire se consacre “en moyenne, entre 27 h et 37 h par semaine” à sa mission d’élu local. S’il est retraité, le poids de la fonction reste acceptable. “Mais s’il a une activité professionnelle, cela vient se rajouter. Le poids de l’activité hebdomadaire globale, incluant la vie professionnelle et celle d’élu, génère souvent des tiraillements dans la vie personnelle”. Des effets qui ont incontestablement des conséquences sur la santé mentale et psychique de l’élu.
Pour Olivier Torrès, “les maires sont les plus grands serviteurs de la République. Il y a, chez eux, une part de sacré. Cela porte un nom : c’est la République”. Selon lui, les élus locaux “sont dans un rapport sacerdotal républicain”. Et ça, insiste encore le fondateur d’Amarok, “ça les protège”. C’est “ce qui explique le sacrifice personnel des maires”, qui reste souvent peu estimé.
Dossiers de subvention, excès de réglementation, injonctions, incivilités…
La seconde étude va globalement dans le même sens. Les 5 000 réponses (sur 35 000 élus) épluchées par le Centre de sociologie des organisations (CSO) révèlent que pour 83 % des maires, leur mandat est “usant pour la santé”, que près de 65 % d’entre eux avouent parfois des coups de fatigue ou des moments de lassitude et qu’ils pensent à trop de choses à la fois. En cause, “un investissement considéré rétrospectivement démesuré, des tensions parfois excessives au conseil municipal, des attaques brutales sur les réseaux sociaux ou des imprévus perpétuels à gérer”. Les difficultés : “Monter des dossiers de subventions, les excès de réglementation, les injonctions de la préfecture, les incivilités et infractions”. “Les maires sont des acteurs très exposés, toujours en première ligne. Et la manière dont cette charge est supportée varie en fonction de la taille des communes”, analyse Jérôme Pélisse, chercheur au CSO.
Mais un autre chiffre vient contrebalancer toutes ces données : 99,7 % des maires expriment le sentiment de faire quelque chose d’utile pour les autres. Un véritable sacerdoce.