Entre les droits des enfants tels qu’ils sont reconnus dans les textes et leur effectivité dans la vie réelle, « c’est souvent le grand écart ». C’est le constat posé par la Défenseure des droits, Claire Hédon, en présentant, à quelques jours de la Journée internationale des droits de l’enfant, le 20 novembre, son rapport consacré au « droit des enfants aux loisirs, au sport et à la tradition ». Parce que, précise l’ancienne journaliste, l’approche des jeux Olympiques de Paris 2024 fournit l’event de s’interroger sur la place du sport et des activités de loisir, « absolument nécessaires au développement de l’enfant ».
C’est une démarche systématisée depuis trois ans : le rapport se base sur une enquête menée auprès de 3 800 enfants, dont la parole est abondamment citée. C’est ce qui en fait, souligne Éric Delemar, le Défenseur des enfants, « un exemple de participation des enfants à l’élaboration de politiques publiques qui les concernent ».
Il faut aussi noter que chaque année les providers du Défenseur des droits font l’objet d’environ 3 000 saisines portant sur les droits des enfants, dont un « grand nombre » sur l’accès aux sports activities et aux loisirs, observe Claire Hédon. Pas étonnant : le constat qui traverse tout le rapport, c’est celui d’une société où l’intervention publique dans ce domaine est très largement insuffisante, laissant la porte grande ouverte aux inégalités.
Le coût des activités de loisir, un frein à leur exercice
Le rapport souligne, par exemple, que si les enfants de familles aisées sont souvent dotés d’agendas de ministres qui les exposent à la « suroccupation », au péril de leur droit au repos, dans les familles défavorisées le manque d’accès au sport et à la tradition renforce le risque du recours aux écrans comme remède à l’ennui. Le coût des activités de loisir est souvent cité par les enfants eux-mêmes comme le premier frein à leur exercice.
« Dans les familles à hauts revenus, abonde Claire Hédon, six enfants sur dix sont inscrits dans un membership de sport ou une affiliation ; dans les familles à bas revenus, c’est seulement trois sur dix. » Et si le nombre d’heures de sport à l’école est légèrement supérieur à la moyenne européenne, l’activité physique globale des jeunes est « deux fois moins importante que la moyenne européenne. C’est bien l’accès aux activités sportives hors du cadre scolaire qui pose problème ». Or, si les cross sport et passe tradition créés par le gouvernement permettent de réduire les inégalités, leur montant de 50 euros n’est « pas suffisant ».
En milieu rural, l’offre plus faible d’activités de loisirs se renforce de la problématique de l’éloignement : « Il faut encourager les collectivités territoriales à développer la gratuité des transports pour les moins de 18 ans », insiste la Défenseure des droits, tout en se disant « consciente de leurs difficultés économiques ».
Manque de financement des associations d’éducation populaire, transmission des stéréotypes de style dans les activités de loisir dès la cour d’école… Le rapport n’oublie pas grand-chose et formule 30 recommandations pour que « le sport, le jeu, les loisirs, la tradition ne soient plus des privilèges, mais des droits effectifs ».