Pour répondre à la colère paysanne, Gabriel Attal ne manquait pas de propositions. D’un côté : la centaine de changements souhaités et formulés par le tandem majoritaire FNSEA-Jeunes Agriculteurs, lancé dans une course au moins-disant social et environnemental, avec, à leur droite, la Coordination rurale. De l’autre : côté progressiste, 45 mesures à prendre d’urgence listées par le Mouvement de défense des exploitants familiaux (Modef), ainsi que la plateforme revendicative de la Confédération paysanne. En choisissant de faire un peu plaisir aux premiers sans écouter les seconds, le nouveau locataire de Matignon s’est mis à dos tout le monde.
Garantir la rémunération
Mais les « simplifications administratives », les déblocages plus rapides d’aides ou les retours en arrière sur les normes environnementales (exit la fin de la ristourne fiscale sur le gazole non routier) ne sont que des pansements posés sur un modèle de manufacturing profondément malade. « Ne nous trompons pas de cible. Le grand problème que soulève le mouvement des blocages est existentiel. C’est le revenu », affirme Pierre Thomas, éleveur dans l’Allier en agriculture biologique et président du Mouvement de défense des exploitants familiaux (Modef).
Le bonheur est d’abord dans la fin d’Egalim 1 et 2, ces lois censées garantir la rémunération des producteurs lors des négociations annuelles entre grande distribution et fournisseurs alimentaires. « Le problème est que l’on proceed d’envisager les mêmes options fondées sur la logique libérale qui privilégie les plus faibles coûts afin d’obtenir les plus faibles prix, reprend Pierre Thomas. D’autres mécanismes existent. Le premier est de rompre avec les 60 dernières années de cogestion FNSEA-gouvernements qui se fonde sur l’agrobusiness. »
À l’empilement réglementaire, le Modef préfère la régulation. Avec un prix plancher de vente garanti par l’État, tenant compte des coûts de manufacturing et du salaire du producteur. Et un coefficient multiplicateur fixé par le législateur pour contenir les marges réalisées ensuite sur le dos des consommateurs.
Opposée elle aussi aux accords de libre-échange qui donnent l’avantage aux producteurs usant du dumping social et environnemental, la Confédération paysanne, par la voix de sa porte-parole nationale, Laurence Marandola, préconise « deux mesures pour augmenter la rémunération des producteurs : la régulation des marchés et l’instauration d’un prix plancher de vente de nos productions, interdisant ainsi la vente sous les coûts de manufacturing et de rémunération. »
Pour Laurence Marandola, une selected est sûre. « Moins de normes, c’est un mirage », prévient-elle. « Enlever des réglementations n’augmentera pas les revenus, automobile c’est laisser le champ encore plus libre au libre-échange. Il y a certes des normes absurdes, qu’il faut supprimer. Mais les réglementations sont au contraire des protections pour la santé des paysans, des salariés, des saisonniers, pour nos facteurs de manufacturing que sont l’eau et la terre. Et ces normes doivent être réciproques, c’est-à-dire adoptées aussi par les producteurs d’ailleurs avec qui nous commerçons. »
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