C’est rarissime, voire inédit : tous les syndicats de l’enseignement et de l’éducation (à l’exception d’un seul, ultra-minoritaire), mais également la FCPE, principale fédération de parents d’élèves, ainsi que les organisations lycéennes appellent ensemble à dire « Non au choc des savoirs » et à se manifester pour cela samedi 25 mai, dans plus de 60 villes et à Paris. Le message est clair : au-delà des différences, des désaccords et des divisions, la gravité de la situation exige de se rassembler.
Même si le gouvernement refuse désormais de parler de groupes « de niveau », car l’expression en révèle déjà trop sur ses intentions de tri social, c’est bien cela dont il s’agit. Et c’est ce que refuse l’intersyndicale : « Le projet de ce gouvernement est de faire vivre les jeunes dans des mondes parallèles », expliquait ainsi la secrétaire générale du Syndicat des enseignants de l’Unsa, Élisabeth Allain-Moreno, lors d’une conférence de presse de l’intersyndicale, mercredi 22 mai.
Les syndicats craignent une séparation des élèves dès l’entrée en 6e, les « bons » d’un côté, les « faibles » de l’autre, ces derniers se voyant ensuite imposer l’obtention du DNB (diplôme national du brevet) pour entrer au lycée et, en cas d’échec, une orientation vers des classes « prépa seconde », antichambre de leur éjection vers l’apprentissage.
« Un décalque de mesures portées par Marine Le Pen en 2017 »
Benoît Teste, secrétaire général de la FSU, développe l’analyse : il voit dans le « choc des savoirs » et, au-delà, dans les dernières annonces du gouvernement en matière éducative ces derniers mois, « une tentative d’avancer des mesures démagogiques, réactionnaires », de faire passer des idées nauséabondes comme celle « qu’une partie des élèves ne serait pas éducable », qu’il faudrait « en envoyer certains vers l’entreprise au plus tôt… ».
Le syndicaliste y détecte aussi « un décalque de mesures portées par Marine Le Pen à la présidentielle 2017, comme le DNB barrage ou l’uniforme. C’est aussi notre responsabilité de lutter au quotidien pour un projet humaniste d’une école pour tous. Lutter contre l’extrême droite, ce n’est pas abstrait ».
Pour lui, « l’école est à un point de rupture et c’est grave pour le futur de notre pays ». C’est l’autre point principal sur lequel l’intersyndicale s’accorde : la bataille contre les mesures du « choc des savoirs » va plus loin que le seul enjeu scolaire. Pour Maud Valégeas, de SUD éducation, « le 25 est le début d’une mobilisation plus large pour construire une école publique émancipatrice ».
Depuis janvier, les mobilisations sont partout : locales, avec la multiplication devenue presque quotidienne d’opérations « collège mort » portées aussi par les parents d’élèves ; départementales, comme le mouvement de grève « pour un plan d’urgence » en Seine-Saint-Denis, entamé le 26 février et qui dure toujours face à un ministère qui joue ostensiblement la montre ; et nationales, avec deux journées de grève « majoritaires dans les collèges », souligne encore Benoît Teste. Et personne ne voit dans ce samedi une conclusion. Au contraire, reprend le secrétaire général de la FSU, « nous espérons une forte mobilisation qui soit le début d’un mouvement de tout le pays pour son école ».