Six ans après l’effondrement mortel de deux immeubles situés au 63 et 65 de la rue d’Aubagne, au cœur du quartier de Noailles, le très attendu procès du logement indigne s’ouvre ce jeudi dans la cité phocéenne. Le dispositif titanesque, mis en place par le tribunal correctionnel de Marseille, courra sur six semaines, jusqu’au 18 décembre. La cour de la caserne du Muy, conçue pour les procès « hors norme », deviendra ainsi le théâtre d’un marathon mobilisant 87 parties civiles, dont la ville de Marseille.
Seize prévenus sur le banc des accusés
Résultats de défaillances en cascades sur la gestion du logement, ce procès cristallise d’importantes questions sur la chaîne de responsabilités des acteurs de l’habitat indigne qui gangrène Marseille depuis des décennies. Plusieurs copropriétaires mais aussi un syndic, un expert, un bailleur social, et jusqu’à l’adjoint au maire de l’époque en charge de la police des immeubles en péril, Julien Ruas, figurent parmi les 16 prévenus, qui risquent pour certains jusqu’à dix ans de prison.
Qui est responsable ? Qui du syndic, des copropriétaires, de l’adjoint au maire, n’a pas fait ce qui lui incombait ? Comment le numéro 65 et le 63, son voisin inhabité, propriété d’un office HLM de la ville, se sont-ils écroulés subitement ?
Le drame avait rapidement mis en lumière l’inaction de la municipalité de l’époque, comme une forme d’indifférence globale : « L’état du bâti ancien du centre-ville était dans un tel état de dégradation depuis de nombreuses années que tout un chacun avait pris l’habitude d’y être confronté quotidiennement », ont ainsi souligné les juges d’instruction. Ces effondrements ont bien été « le reflet dramatique et paroxystique d’une accumulation de dysfonctionnements », a d’ailleurs conclu l’enquête.
Pour les juges d’instruction, le syndic du 65, le cabinet Liautard, a « failli à sa mission » ; Richard Carta, l’expert dépêché pour diagnostiquer cet immeuble le 18 octobre, a commis des « négligences » ; Marseille Habitat, le gestionnaire du syndic, a laissé le numéro 63 tomber en « ruines ».
Quant à Julien Ruas, il avait « renoncé à exercer ses pouvoirs de police administrative », dans une ville pourtant minée par 40 000 logements indignes. Pour la Fondation Abbé-Pierre, partie civile, ce procès doit acter « tout ce qu’il ne faudra plus jamais faire » dans un pays où elle recense encore 600 000 taudis.
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