Chaque année, les insuffisances du dépistage des cancers en France aboutissent à des dizaines de milliers de décès évitables. Alors que ce dimanche 4 février est organisée la journée mondiale contre la maladie, le constat dressé par l’Institut nationwide du most cancers (Inca) et l’Assurance maladie a de quoi faire froid dans le dos.
Sur les trois programmes nationaux existants (sur le most cancers du sein, celui du col de l’utérus et le most cancers colorectal), aucun ne remplit les objectifs chiffrés fixés par les autorités sanitaires. Quant à celui qui entraîne le plus de morts chaque année, le most cancers du poumon (30 000 décès, et 50 000 nouveaux cas), il ne bénéficie même pas d’un dépistage organisé, y compris pour les populations les plus à risques.
« Résultat : les deux tiers des personnes à qui on diagnostique un most cancers du poumon le sont à un stade métastatique, c’est-à-dire un stade avancé où les possibilities de survie chutent énormément. C’est un problème majeur », pointe Laure Guéroult-Accolas, la fondatrice de l’affiliation Sufferers en réseau, qui organise depuis 2014 des collectifs de malades pour faciliter leur vie au quotidien.
90 % des cancers du col de l’utérus pourraient être évités
« Il faut une mobilisation générale » pour dépister davantage et faire reculer le most cancers, première trigger de décès en France, ont plaidé la semaine dernière les responsables de l’Inca et de l’Assurance maladie. Pour les cancers du sein, une mammographie et un examen clinique tous les deux ans sont prévus pour les femmes de 50 à 74 ans.
En prévention de celui du col de l’utérus, ce sont les femmes de 25 à 65 ans qui sont visées : un examen cytologique est préconisé tous les trois ans jusqu’à 29 ans, puis un check HPV-HR ensuite. Mis en place en 2018, ce programme de dépistage était censé permettre d’éviter 90 % des cancers du col de l’utérus, qui touchent 3 000 nouvelles femmes par an et en tue 1 100.
Étant donnés les progrès très modestes de la vaccination contre les papillomavirus (les infections à l’origine de ces cancers) et les ratés de la campagne lancée dans les collèges en septembre dernier, ce dispositif n’est en rien superflu. Quant au most cancers colorectal, l’un des plus fréquents en France (47 000 nouveaux cas et 17 000 décès chaque année), il est censé être dépisté tous les deux ans chez tous les Français de 50 à 74 ans, par le biais d’un check immunologique qui vise à repérer du sang dans les selles.
6 600 décès en moins si on dépistait mieux le most cancers colorectal
Mais, pour ces trois programmes, « la participation reste insuffisante », reconnaît le directeur général de l’Inca, Thierry Breton. « Pour le most cancers du sein, on est certes à 47 %, mais la tendance est à la baisse ; pour le most cancers colorectal, on est collectivement en échec avec une participation de 34 %, très faible par rapport aux objectifs de 60-70 % ; pour le most cancers du col de l’utérus, on est à 60 %, mais l’objectif est de 80 %. »
S’il peut s’expliquer par des réticences à évoquer d’éventuels symptômes avec son médecin, l’échec sur le most cancers colorectal n’en est pas moins très coûteux en vies humaines. En respectant les objectifs fixés (65 % de Français dépistés), pas moins de 6 600 décès pourraient être évités chaque année, selon une évaluation faite par l’Inca en 2019, soit plus de deux fois le bilan annuel de la mortalité routière…
Hier gérées par les centres régionaux de dépistage du most cancers, les invites et relances sont désormais pilotées par l’Assurance maladie elle-même, depuis le 1er janvier 2024. Pour toucher aussi des publics éloignés du système de soins (bénéficiaires de la Complémentaire santé solidaire, assurés sans médecin traitant…), les providers de la Sécu ont aussi prévu un dispositif « d’aller vers », comparable à celui qui avait été mis en place pour la vaccination anti-Covid en 2021.
Plus de 100 téléconseillers ont été recrutés et formés pour des entretiens d’accompagnement à la prise de rendez-vous ou à l’obtention d’un package. La CPAM compte appeler 1,4 million de ces assurés « vulnérables » en 2024. Un double dispositif auquel la Cnam doit consacrer 30 tens of millions d’euros, précise Catherine Grenier, la directrice des assurés de la Sécu.
Des inégalités toujours très marquées entre cadres et ouvriers
Par sûr qu’il soit suffisant à résorber l’ensemble des inégalités de santé face au most cancers. « L’espérance de vie des cadres dépasse de six ans celle des ouvriers. Or, cet écart s’explique pour moitié par les inégalités face au most cancers », avance Aurore Loretti, docteure en sociologie de la santé et spécialiste de ces inégalités.
« Les lessons populaires connaissent une surincidence de cette maladie par rapport aux plus aisés, des retards au diagnostic plus importants, et un taux de survie moindre. Et en plus, elles doivent faire face parfois à des discours moralisateurs, voire culpabilisateurs, qui pointent leurs comportements individuels, en oubliant les facteurs de risques collectifs, liés à l’environnement ou au travail. »
Le 29 janvier dernier, la chercheuse participait au lancement d’un nouveau collectif, baptisé « Face au (x) most cancers(s) », lancé conjointement par Unicancer, le réseau hospitalier français dédié à la maladie, l’affiliation Sufferers en réseau, et le laboratoire MSD France, filiale du géant américain Merck. Parmi les dix propositions mises en avant par le collectif, figurait celle-ci : améliorer le dépistage précoce du most cancers, en particulier du most cancers du poumon.
Classer un most cancers métastatique en fonction de l’organe dans lequel il est apparu en premier est obsolète et peut parfois empêcher certains sufferers d’accéder à un traitement adapté, estiment des chercheurs de l’Institut Gustave-Roussy dans la revue Nature. « Cette habitude de classer les cancers et les traiter en fonction de l’organe touché à l’origine, freine les progrès de la recherche », écrivent dans une tribune publiée mercredi 31 janvier par la revue ces médecins-chercheurs du centre anti-cancer situé au sud de Paris et de l’Université Paris-Saclay.
Actuellement, l’intégralité de la cancérologie repose sur une segmentation des sufferers en fonction de l’organe dans lequel est apparue la maladie, rappellent-ils. On dit ainsi qu’une personne est atteinte d’un most cancers du foie, du poumon, ou encore du pancréas, et ceci même si son most cancers s’est propagé à d’autres organes. Or de nombreuses recherches ont mis en lumière des caractéristiques communes partagées par plusieurs sorts de cancers d’organes, poursuivent les chercheurs, qui appellent à classifier désormais les cancers métastatiques selon les propriétés moléculaires ou biologiques des tumeurs.
Cette logique de segmentation touche aussi le dépistage, ajoute Laure Guéroult-Accolas, de l’affiliation Sufferers en réseau. « Aujourd’hui, tout est beaucoup trop saucissonné. On dépiste tel most cancers, puis tel autre, au lieu d’avoir une approche globale. Sur ce sujet aussi, il faudrait un choc de simplification », suggère la militante.