Les mises en garde se font pressantes. Comment accueillir les personnes âgées dans les bonnes conditions alors que les établissements sont touchés par l’inflation et menacent de mettre la clé sous la porte ? La question taraude les organisations et fédérations du grand âge alors que, depuis lundi, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2025 est examiné en commission des Affaires sociales. La faute à un projet de loi en manque d’ambition.
Sur le papier, les promesses pouvaient paraître emballantes. La branche autonomie – qui comprend les services d’aide à l’autonomie des personnes âgées et des personnes en situation de handicap –, portée par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), devrait voir ses dépenses progresser de 2,4 milliards d’euros, pour un total de 42,4 milliards, soit une augmentation de 6,0 % par rapport à 2024.
Un déficit de 400 millions d’euros
Mais ces chiffres traduisent une réalité peu séduisante. Déjà parce que cette hausse ne suffira pas à combler l’ensemble des besoins pour les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) ou encore pour les aides à domicile.
« Le rapport du CESE (Conseil économique, social et environnemental – NDLR) chiffre un besoin supplémentaire de 14 milliards à l’horizon 2030. Il faut que cette évolution se traduise tous les ans pour monter en puissance d’ici là », rappelle Hugues Vidor, président de l’Union des employeurs de l’économie sociale et solidaire.
Et les marges de manœuvre risquent de se rétrécir au regard des nouvelles projections contenues dans le projet de loi. De fait, la LFSS 2024 indiquait que la branche autonomie devait être excédentaire de 900 millions en 2025. Elle se trouve, en réalité, déficitaire de 400 millions et le déficit devrait se creuser jusqu’en 2028.
« On sort du schéma de cotisations sociales de la Sécurité sociale »
Il y a pourtant urgence à mettre la main à la poche. La situation financière des Ehpad est trop fragile. Rien qu’en 2023, près de 85 % d’entre eux ont enregistré un déficit du fait notamment des tarifs administrés. Ces établissements bénéficient de financements fixés par l’assurance-maladie et les collectivités. Or, ces deux dernières années, ils n’ont pas été à la hauteur de l’inflation ou encore des augmentations des dépenses liées aux soins.
Pour y remédier, le PLFSS prévoit donc, avec son article 21, de modifier le financement des Ehpad et des unités de soins longue durée via une expérimentation : à partir du 1er janvier 2025 et pour une durée de quatre ans, dans les départements volontaires, ces deux types de structures percevront un forfait global unique relatif aux soins et l’autonomie en remplacement des dotations fournies par l’ARS et le département.
Seul hic ? « Cette allocation va être gérée par la CNSA, financée essentiellement via l’impôt. On sort du schéma de cotisations sociales de la Sécurité sociale. Et la conséquence à terme, c’est que le bénéficiaire précaire devra compléter ce dispositif avec une assurance », dénonce Fabienne Clamens, de la fédération des organismes sociaux CGT.
« Nous avons besoin de 400 000 postes à l’horizon 2030 »
Le projet de loi envisage également le recrutement d’environ 6 500 professionnels supplémentaires en Ehpad, en 2025, pour un objectif de 50 000 équivalents temps plein en 2030. « Un chiffre en deçà des attentes alors que nous avons besoin de 400 000 postes à l’horizon 2030 », juge Hugues Vidor.
À cela s’ajoute la lente mise en œuvre de la stratégie du « virage domiciliaire », qui consiste à développer le maintien à domicile des personnes âgées via le développement de structures et le recrutement de personnels. C’était l’une des grandes promesses d’Emmanuel Macron lors de son premier quinquennat, une loi sur le grand âge, mais après de nombreux atermoiements, le texte finalement voté en mars 2024 avait été vidé de sa substance.
« Aujourd’hui, le virage domiciliaire est en grande difficulté puisque le financement des acteurs du domicile est toujours sous-tarifé. Le tarif horaire des salariés est actuellement à 23,50 euros », regrette Jean-Christophe Amarantinis, président du Synerpa.
Le PLFSS demeure obscur sur les aides apportées au secteur de l’aide à domicile. Il ne prévoit qu’une nouvelle enveloppe de 100 millions d’euros accordée à la branche autonomie pour permettre aux départements de soutenir la mobilité et le travail des aides à domicile sur leurs territoires.
« Mais je rappelle que ces 100 millions d’euros ont été votés dans la loi dite « bien vieillir » (le 8 avril 2024). Et il faut en rappeler l’histoire. Elle est quand même issue d’un amendement du gouvernement déposé en avril 2023. Devrait-on donc se féliciter d’une mesure qui est attendue par les services depuis deux ans ? » s’agace Vincent Vincentelli, président de l’Union nationale de l’aide, des soins et des services à domicile.
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