Une « querelle » entre deux puissants hommes d’affaires fait sensation.
A ma gauche, la dynastie Moux. Albert, le père de 79 ans, et son fils Patrick, le bouillant patron de Vodafone Pacifique, tous deux directeurs du groupe Pacific Island Energy (PIE). Le cœur de métier de cette entreprise familiale est de s’approvisionner en pétrole raffiné à Singapour, d’assurer le transport et la distribution d’essence à la pompe sous la marque Shell vers une douzaine d’îles de la région. À ma droite, Gaspard Ravel, 83 ans, auto-entrepreneur. -fait homme de part en part. Débarqué sur l’île de Tahiti à l’âge de 18 ans, celui surnommé « Bill » a fait fortune en créant des centaines d’entreprises dans les domaines du maritime, du transport de marchandises et de passagers, du transport aérien et de l’immobilier, en Nouvelle-Calédonie, à Tahiti et en Australie.
Une fuite de documents
Ces derniers jours, les relations entre les deux hommes se sont fortement dégradées. Patrick Moux est furieux contre celui qui a été son associé pendant de nombreuses années. Il assure que « Bill » est à l’origine d’une fuite de documents dont certains, considérés comme confidentiels, circulent entre le Pacifique et la métropole. L’origine de cette fuite reste encore à vérifier. De quoi s’agit-il ? D’après les documents que nous avons pu consulter, il ressort que PIE, la holding Moux, est basée à Singapour. C’est là que l’entreprise est enregistrée depuis de nombreuses années. Pour l’instant, rien d’illégal.
De gros bénéfices
Les résultats de cette entreprise, qui n’emploie que trois personnes, sont impressionnants sur le marché financier asiatique : rien qu’en 2022, le chiffre d’affaires a atteint un milliard de dollars américains, la marge brute s’est élevée à 230 millions et le bénéfice à 100 millions (toujours en dollars américains). les détracteurs, qui ont souhaité rester anonymes, estiment que l’entreprise ne redistribuerait pas correctement, par le biais de l’impôt, les bénéfices substantiels qu’elle tire de son activité dans les différents territoires qu’elle dessert, au détriment des consommateurs et des gouvernements locaux. Autrement dit, PIE préfère payer ses impôts à Singapour plutôt que de les répercuter sur les territoires qu’il dessert. Il convient de souligner que dans la plupart des îles de la région, pour des raisons à la fois structurelles et conjoncturelles, les niveaux de prix à la consommation sont parfois très élevés.
Optimisation fiscale
Contactés, les dirigeants de PIE se défendent bec et ongles. Ils acceptent pleinement leur décision de domicilier leur holding à Singapour, pour des raisons d’optimisation fiscale. L’argument principal est que leur entreprise est dédiée au commerce international. Singapour est une place financière très importante et surtout très attractive. Il est vrai que les entreprises bénéficient d’un régime fiscal attractif : un taux d’impôt sur les sociétés de 15 % au lieu de 30 ou 40 % dans des territoires comme la Nouvelle-Calédonie ou Tahiti. Les filiales de PIE n’échappent en aucun cas à la fiscalité dans les îles qu’elles approvisionnent en produits pétroliers. C’est du moins ce qu’ont déclaré leurs responsables à « FrenchDailyNews.com ».
De vieilles affaires sont révélées
Pour l’heure, il est impossible de vérifier les montants de ces taxes, et donc s’il y a ou non un manque à gagner dans les recettes de l’État. Que ce soit à Tahiti, aux Fidji ou en Nouvelle-Calédonie. Ce qui est sûr, c’est que la réponse a été rapide. PIE envisage de poursuivre Bill Ravel pour diffamation. Et voici les anciens procès et les litiges divers et divers. Parmi elles, des convictions qui remontent à plusieurs années et que lui a fait infliger Bill Ravel. Pour comprendre les enjeux de ce différend, il faut « zoomer » et prendre la mesure des enjeux économiques et géopolitiques de la région Indo-Pacifique. région. Au-delà des questions de ressources marines et d’approvisionnement en essence pour la multitude de territoires du Pacifique, le contrôle du transport et du stockage du pétrole est une priorité essentielle.
Bases stratégiques
Le Pacifique est le théâtre d’une lutte sourde entre les États-Unis et la Chine pour le contrôle de bases insulaires parfois minuscules mais néanmoins stratégiques. De son côté, la France tente de préserver sa présence en Polynésie et en Nouvelle-Calédonie, très convoitées par les Chinois. Même si la perte de l’énorme contrat de sous-marins annulé par l’Australie a fragilisé sa position dans la région. De nombreuses négociations sont en cours pour tenter de geler la situation et renforcer la souveraineté française dans une zone très convoitée.
Un projet porté par la France
En association avec la compagnie pétrolière malaisienne PETRONAS, un accord-cadre, s’il était approuvé, permettrait à un « club » de territoires signataires – Fidji, Tahiti, Nouvelle-Calédonie et Papouasie-Nouvelle-Guinée – d’assurer non seulement la continuité de leurs approvisionnements réguliers, mais aussi la période de stockage stratégique de 90 jours à laquelle la France est tenue. Pour l’heure, en réalité, cela ne représente que 30 jours en moyenne.