Le religieux est installé dans la région depuis vingt-ans. Il risque l’expulsion.
Une enquête préliminaire a été ouverte ce lundi pour apologie du terrorisme contre l’imam Mahjoub Mahjoubi, un Tunisien qui exerce à Bagnols-sur-Cèze dans le Gard, visé pour ses propos “anti-France”. Dimanche déjà, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin avait demandé le retrait de son titre de séjour. “Sur mon instruction, les propos de cet imam ont fait l’objet d’un signalement cette semaine au procureur de la République par le préfet du Gard. J’ai demandé le retrait de son titre de séjour en vue de son expulsion du territoire. Aucun appel à la haine ne restera sans réponse”, a écrit le ministre sur le réseau social X.
Le prêche de l’imam Mahjoub Mahjoubi, qui vit dans le Gard depuis près de vingt-cinq ans, avaient été largement relayés sur les réseaux sociaux. Dans des vidéos, Mahjoub Mahjoubi qualifiait notamment le drapeau français de “drapeau satanique” qui n’a “aucune valeur auprès d’Allah”. “Ces drapeaux tricolores qui nous gangrènent, qui nous font mal à la tête, qui n’ont aucune valeur auprès d’Allah”, peut-on notamment entendre dans cette vidéo. “Vous voyez tous ces drapeaux qu’on lève dans les matches ? On crie et on tape le musulman sur la tête, et on l’insulte de tous les noms”, dénonce l’imam.
Un premier signalement pour des infractions financières
L’enquête devra déterminer s’il y a “apologie du terrorisme”. L’article 421-2-5 du Code pénal rappelle que “le fait de provoquer directement à des actes de terrorisme ou de faire publiquement l’apologie de ces actes est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende.” Une peine qui peut monter jusqu’à 100 000 euros d’amende et 7 ans d’emprisonnement lorsque les faits sont “commis en utilisant un service de communication au public en ligne”.
L’imam a fait l’objet de trois signalements, un premier bien avant cette affaire, pour des infractions financières liées à la gestion de la mosquée, un deuxième en janvier pour un possible conflit d’intérêt avec la mairie enfin, un troisième en fin de semaine dernière pour haine raciale et apologie du terrorisme en lien avec ses prêches récents.
“Les propos ne sont pas admissibles, a estimé le maire de Bagnols-sur-Cèze Jean-Yves Chapelet. Je suis un fervent républicain je me bats tous les jours pour que chacun dans cette ville puisse vivre sa foi. L’État, la justice, le préfet et la procureure vont jouer leur rôle. La justice se tient dans les tribunaux.”
Le député RN du Gard Nicolas Meizonnet a dénoncé pour sa part “le laxisme en matière de politique migratoire qui lui permet de prêcher la haine sur le territoire en toute impunité”. Selon un sondage de l’institut CSA pour CNEWS, Europe 1 et le Journal du Dimanche, paru hier lundi, 92 % des Français sont favorables “à l’expulsion, sans recours possible, des imams étrangers qui tiennent des prêches anti-français”.
L’avocat de l’imam de Bagnols-sur-Cèze, Me Samir Hamroun, a réagi lundi à l’affaire, précisant pour la défense de son client que “c’est une déformation et interprétation totalement fallacieuse des propos tenus par Monsieur Mahjoubi. C’est un abus de langage. Il est venu en France assez tard et même s’il s’exprime bien, il ne maîtrise pas parfaitement la langue française”.
L’avocat indique “qu’il est en France depuis plus de 10 ans donc on ne peut pas l’expulser directement. Il faut passer par la commission d’expulsion (Comex) à Nîmes composé de trois magistrats. Cette commission va donner un avis favorable ou défavorable à l’expulsion. Le ministre de l’Intérieur n’est ensuite pas tenu de suivre cet avis. Il aura, dans tous les cas, tout le loisir de maintenir ou pas son arrêté d’expulsion que nous n’avons toujours pas reçu à ce jour. S’il le maintient, nous le contesterons devant le tribunal administratif de Paris”.
Cette affaire intervient seulement quelques jours après le jugement en appel, jeudi 8 février, de l’imam de Beaucaire, condamné à huit mois de prison avec sursis et interdiction d’exercer après des publications sur Facebook appelant à la haine des juifs.
“Je ne peux accepter ces propos”
Le Nimois, Abdallah Zekri, vice-président du Conseil français du culte musulman et vice-président du conseil départemental du culte musulman du Gard, a contacté, lundi, l’imam Mahjoub Mahjoubi.
“Je l’ai appelé pour qu’il s’explique. Lui me dit qu’il ne parlait pas du drapeau tricolore mais des drapeaux multicolores, pas uniquement des drapeaux tricolores, témoigne Abdallah Zekri. Il m’a répondu que la vidéo avait été coupée et sortie de son contexte. Ou encore que ses propos avaient été mal interprétés. Aujourd’hui, il est cloîtré chez lui. Il va m’envoyer la vidéo intégrale. Je ne l’ai pas vue encore….”
Abdallah Zekri condamne cependant les propos de l’imam. “Je ne peux accepter ces propos. Des milliers de personnes sont mortes pour un drapeau tricolore, quel qu’il soit. En France, c’est le drapeau tricolore français. On ne peut y toucher. Et le foot… c’est le football.”
Driss Elmoudni, président du conseil départemental du culte musulman, a aussi condamné les propos : “Le drapeau de notre pays et sa souveraineté est une ligne rouge.”