« C’est la première fois de ma vie que j’ai dû prendre des médicaments pour m’aider à dormir », lâche Muriel Moinet, d’une voix étranglée par les sanglots. Cette ancienne responsable des ressources humaines de l’Ehpad La Chesnaye à Suresnes, désormais secrétaire administrative de la CGT 92, est encore marquée par ce qu’elle a vécu.
La faute à un management qu’elle dénonce comme « toxique » et « autoritaire », appliqué au sein de l’établissement public par la nouvelle directrice, arrivée le 1er janvier 2022. « Elle m’a fait la misère peu après son recrutement. Elle me criait dessus pour un rien. On en est même arrivé à un point où je n’avais plus d’accès au logiciel de paie pour réaliser mes missions. Et quand je faisais des courriers, elle ne voulait pas que j’inscrive mon nom pour signer les mails », livre la quinquagénaire.
L’ancienne salariée, partie le 1er juillet 2024 de l’Ehpad, dénonce une « mise au placard » qu’elle aurait subie depuis fin 2022. « Du jour au lendemain, la directrice a décidé de me faire quitter mon bureau pour travailler dans le couloir. Je n’avais plus aucune intimité. J’étais surveillée en permanence parce qu’elle avait orienté mon ordinateur de façon telle qu’elle pouvait voir ce que je faisais », poursuit-elle. Contactée, la directrice parle plutôt d’une « redistribution des bureaux ».
« Depuis l’arrivée de la directrice, le personnel pose ses démissions »
Le cas de Muriel Moinet ne semble pas isolé. Depuis le 1er octobre, le personnel de La Chesnaye est en grève pour réclamer le départ de leur dirigeante. Sur place, mardi 12 novembre, un piquet était installé devant l’enceinte du bâtiment blanc tandis qu’un florilège de banderoles était accroché aux grilles de l’entrée : « Au secours ! Personnel en souffrance ! » Un spectacle habituel depuis une quarantaine de jours. Mais, ce jour-là, sous les coups de 10 heures, une dizaine de salariés se sont installés devant l’entrée pour un débrayage fugace, appelant à la démission de leur responsable.
« Nous souffrons avec cette directrice qui ne prend pas en compte l’avis des équipes et ne sait que donner des ordres. Depuis son arrivée, le personnel pose ses démissions », lâche un soignant de l’Ehpad, qui souhaite rester anonyme. L’une de ses collègues a porté plainte auprès de la police pour « harcèlement moral », d’après un récépissé que s’est procuré l’Humanité.
Au total, pas moins d’une vingtaine de salariés auraient démissionné (3 médecins, 1 infirmière de coordination, 1 cadre de santé, 1 psychologue, 1 psychomotricien, 1 hôtesse d’accueil, 1 gestionnaire, 1 responsable technique, 3 techniciens, 3 infirmiers diplômés d’État, 4 ASH et 8 aides-soignants), selon Malika Belarbi, secrétaire départementale de la CGT santé, action sociale du 92.
Des départs que ne conteste pas la direction. Néanmoins, « à ce jour, l’établissement est attractif, l’équipe de l’établissement est complète, plusieurs recrutements étant en effet intervenus récemment sur des profils clés : médecin coordonnateur, infirmière coordinatrice, infirmière référente, psychomotricienne, d’autres recrutements étant en cours sur le volet infirmiers notamment », justifie-t-elle. Ces recrutements ne sont pourtant pas synonymes de paix sociale, puisque 14 salariés sont convoqués pour des entretiens disciplinaires du 18 au 21 novembre 2024. De son côté, l’ARS des Hauts-de-Seine souhaite organiser une médiation entre la CGT et la direction.
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