Au cours d’une ultime et longue journée de pourparlers, les syndicats et le patronat sont parvenus, après plus de trois semaines, à trois projets d’accord, ce jeudi 14 novembre portant sur de nouvelles règles sur l’assurance-chômage, l’emploi des seniors, et en bonus, une entente sur les parcours syndicaux. Ils sont désormais soumis à la signature des cinq organisations syndicales (CGT, CFDT, CFTC, CFE-CGC, FO), et patronales (Medef, U2P, CPME), qui se retournent actuellement vers leurs instances respectives pour trancher formellement.
Le volet assurance-chômage, qui entrera en vigueur à compter du 1er janvier 2025, prévoit 2,4 milliards d’euros d’économie sur quatre ans, soit 179 millions en 2025, 405 millions en 2026, 893 millions en 2027 et 1 milliard en 2028. Après cette date, il rapportera 1,7 milliard en régime de croisière, soit bien davantage que les 400 millions d’euros réclamés par la nouvelle ministre du travail, Astrid Panosyan-Bouvet.
Le niveau est en revanche nettement inférieur à ce que proposait Gabriel Attal, avant que sa réforme ne soit enterrée par la dissolution de l’Assemblée nationale, mais il s’agit toutefois d’un record dans l’histoire des conventions de l’assurance-chômage. « Nous avons tué le décret Attal, qui aurait été un saccage, mais une nouvelle baisse de droits, après dix ans d’accord en ce sens consécutif, n’est pas satisfaisante pour la CGT », regrette Denis Gravouil, secrétaire confédéral du syndicat, dont la délégation appelle à ne pas signer l’accord. Les dispositions s’appuient en partie sur le projet d’accord de novembre 2023, qui avait été signé par la CFDT, la CFTC et FO ainsi que le Medef, la CPME et l’U2P.
Le décret Attal est mort
Des ajustements ont toutefois été apportés, telle que la prise en compte des conséquences de la réforme des retraites. Parmi les perdants de ces coups de rabot, on retrouve donc les seniors. Le texte contient, en effet, un relèvement de deux ans des bornes d’âge, conformément au report de l’âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans. Actuellement, les demandeurs d’emploi âgés de 53 ou 54 ans peuvent percevoir des allocations pendant 22,5 mois, ceux de 55 ans et plus bénéficiant, eux, d’une durée d’indemnisation allant jusqu’à 27 mois. Concrètement, « ceux qui ont entre 53 et 57 ans, par exemple, se retrouveraient avec une perte de 4 mois et demi de droits », souligne le cégétiste.
Autre point rouge de l’accord, l’indemnisation des chômeurs ayant travaillé dans des pays limitrophes, à l’instar de la Suisse, le Luxembourg, la Belgique ou l’Allemagne. Cette nouveauté, poussée par le patronat, doit faire baisser les allocations, presque de la moitié des frontaliers, ayant travaillé sur un territoire voisin. Un coefficient réducteur sera mis en place, ajustant les indemnités versées en fonction du niveau de vie des Français, et non des salaires étrangers. Une mesure qui permettrait d’économiser 250 millions d’euros par an. À la marge, tous les demandeurs d’emploi seront concernés par ces négociations. Les indemnités seront désormais calculées sur 30 jours calendaires pour tous les mois, sabrant ainsi 5 à 6 jours d’indemnités par an.
Sur l’emploi des seniors, la CGT reste sur sa faim
Si les instances ne se prononceront officiellement qu’en début de semaine prochaine, sur l’accord concernant les règles de l’assurance-chômage, pour coller au calendrier serré de mise en application, les tendances commencent déjà à se dessiner. Côté patronat, sans surprise, les trois organisations semblent prêtes à donner leur aval. Moins évident pour les syndicats, crispés par certaines dispositions. Seules la CGT et la CFE-CGC se sont prononcées contre la signature du texte, tandis que la CFDT et la CFTC y sont favorables, de même qu’aux deux autres textes.
Si FO ne souhaite pas se prononcer avant que le bureau confédéral ne se réunisse, Michel Beaugas, son secrétaire confédéral, prévient que la décision sera globale : « soit on signe tout, soit on ne signe rien. Il faut désormais peser le pour et le contre », explique-t-il. En parallèle, l’accord négocié sur l’emploi des seniors a moins divisé, mais la CGT reste sur sa faim. Le texte introduit par exemple une obligation pour les entreprises de plus de 300 salariés de négocier tous les trois ans sur l’emploi et les conditions de travail des seniors. « Cet accord apporte quelques améliorations, mais il bénéficie surtout aux employeurs, au détriment des principaux concernés, les salariés seniors », note Denis Gravouil. Quant à l’amélioration de l’accès à la retraite progressive, elle se fera au bon vouloir de l’employeur. Le secrétaire confédéral de la CGT, reste perplexe : « rien de révolutionnaire, donc ».
La CFE-CGC, devrait sur cet aspect rendre un avis favorable, de même que la CFDT et la CFTC. La CGT est donc la seule organisation syndicale à s’être positionnée contre, à ce jour. Il se pourrait que certaines mesures concernant l’emploi des seniors fassent pencher la balance globale de FO, et si l’U2P et le Medef signeront aussi avec enthousiasme ce second volet, c’est moins sûr pour la CPME qui aurait espéré que l’accord aille plus loin. Concernant le troisième accord, négocié tard dans la nuit, à l’initiative des syndicats, il supprime la limitation de trois mandats pour les représentants syndicaux. Il devrait être signé par tous, sauf la CPME. Ces trois textes qui sont l’aboutissement d’un marathon de négociations, lancé le 22 octobre, sont néanmoins loin d’être une véritable ligne d’arrivée pour les organisations qui ont encore du pain sur la planche.
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