Il aurait été difficile de faire pire que la brève mais tonitruante séquence Kasbarian. Les syndicats de fonctionnaires, reçus tout au long de la semaine en réunions bilatérales par Laurent Marcangeli, n’en saluent pas moins le net changement d’ambiance, lors de ces échanges avec le nouveau ministre de la Fonction publique.
« Nous n’avons pas pour habitude de commenter les castings ministériels, mais là, il faut reconnaître que la différence de tonalité par rapport à son prédécesseur est salutaire et que ce ministre ne sera visiblement pas dans la virulence », commente Christophe Delecourt, secrétaire général de l’UFSE-CGT, qui a ouvert le bal de ces rencontres, le 3 janvier.
« On sent qu’il n’y a pas une volonté de cliver à tout prix, même s’il reste un homme de droite, dont la priorité est de limiter la dépense publique sans augmenter les recettes », abonde Benoît Teste, secrétaire général de la FSU, selon qui la mobilisation nationale du 5 décembre dans la fonction publique ne serait pas étrangère à cette posture plus conciliante.
Même constat pour Force ouvrière, dont le secrétaire général de la Fédération des fonctionnaires, Christian Grolier, a salué le fait que, contrairement à un Guillaume Kasbarian ouvertement « anti-fonctionnaires », Laurent Marcangeli « ne semble, lui, pas les mépriser », est apparu « attaché au dialogue social » et a affiché sa volonté de se montrer « loyal », à leur égard, en affirmant être disposé à rechercher des compromis. Parmi leurs revendications, la question liée au régime d’indemnisation des arrêts maladie constituait un préalable à toute discussion.
Vers une suppression des trois jours de carence ?
Les amendements contenus dans le Projet de loi de finances 2025 -passé à la trappe par la censure du gouvernement Barnier- prévoyant un durcissement du régime d’indemnisation des arrêts maladie, avaient mis en branle l’ensemble des organisations syndicales.
Kasbarian avait jusqu’au bout refusé de revenir sur ce projet de ne plus payer les deuxième et troisième jours des congés maladie des agents en allongeant le délai de carence d’un à trois jours -sous le prétexte, contesté, d’aligner leur traitement avec celui du privé-, et maintenu son intention de réduire leur rémunération pendant les arrêts de travail à 90 % de leur traitement normal (contre 100 % actuellement).
Si Christophe Delecourt reste très prudent sur l’interprétation des propos tenus par Laurent Marcangeli cette semaine, Christian Grolier comme Benoît Teste ont pour leur part senti un frémissement sensible de la part du nouveau ministre sur cette revendication-là.
« Il a reconnu que les trois jours de carence étaient une mesure stigmatisante, emblématique du mépris à l’encontre des fonctionnaires, et s’est engagé à faire valoir cela au moment des arbitrages auprès de la ministre du Budget », relate Benoît Teste.
Une journée de solidarité nationale en plus ?
Selon Christian Grolier, le ministre aurait par ailleurs évoqué la possibilité « d’autres options » pour contourner ces mesures. À savoir : l’éventualité d’introduire un second jour de solidarité nationale et de limiter la Garantie individuelle de pouvoir d’achat (Gipa) – une sorte de filet de sécurité pour les agents face à l’inflation- (une prime sous le coup d’une suppression totale dans le précédent PLF) aux seuls fonctionnaires des catégories B et C.
Pour le syndicaliste qui a pris sa calculatrice, ces deux mesures alternatives compenseraient financièrement la suppression des mesures liées au régime d’indemnisation des arrêts maladie.
« Vu la façon dont il a présenté les choses, on a eu vraiment le sentiment que les trois jours de carence seraient remplacés par la réduction de la Gipa aux catégories B et C et que la perte de 10 % sur l’indemnisation des arrêts serait remplacée par la journée en plus de solidarité. Les chiffres correspondent étrangement », détaille Christian Grolier.
Une hypothèse qui sera confirmée ou infirmée lors des arbitrages budgétaires prévus dans les jours à venir et vers lesquels, bottant en touche, le ministre a renvoyé l’ensemble de leurs autres revendications.
À savoir, notamment pour la CGT : une revalorisation d’au moins 10 % de la valeur du point, un plan organisant l’égalité salariale entre les femmes et les hommes, mais aussi un débat contradictoire sur les enjeux de financements des services publics. Des mesures de fond sur lesquelles le ministre a refusé de s’engager, affirmant : « Je ne sais pas combien de temps je vais rester, je veux bien faire des mesures de court terme ; sur le long terme, je veux bien ouvrir des chantiers, mais je ne pense pas être là pour les finaliser. »
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