Si l’on voulait démontrer la grande opacité qui règne en matière d’aides publiques à des groupes qui se portent assez bien pour verser des dividendes à leurs actionnaires, il faudrait prendre l’exemple de Carrefour. En 2018, le groupe de grande distribution touche 350 millions d’euros de diverses aides publiques – principalement des exonérations de cotisations sur la masse salariale — pour un effectif de 109 000 salariés. En 2024, il bénéficie d’un montant quasi similaire, 330 millions d’euros. Sauf que dans l’intervalle, les effectifs eux sont tombés à… 85 000 salariés.
La disparition du CICE a donc été totalement indolore pour le groupe qui affichait en février dernier un bénéfice de 723 millions d’euros pour 2024 (contre 1,7 milliard d’euros en 2023). Entre 2014 et 2018, le groupe avait ainsi touché entre 120 et 134 millions d’euros au titre du « crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi », auquel a succédé en 2019 un dispositif pérenne d’allègement des cotisations sociales pour les employeurs.
Ce sont pratiquement 2 milliards d’euros que le groupe a économisés entre 2013 et 2018, selon le décompte auquel est parvenu, non sans mal, le rapporteur de la commission d’enquête sénatoriale sur les aides publiques Fabien Gay, également directeur de l’Humanité.
Un système qui produit « beaucoup de casse sociale »
Auditionné le 31 mars 2025 par cette commission, le PDG, Alexandre Bompard, a préféré une présentation plus flatteuse : depuis son arrivée en 2018, il avance qu’au contraire les effectifs « sous enseigne Carrefour », ont grossi ; « on est passé de 125 000 en 2018 à 170 000 aujourd’hui ». En réalité, seuls 85 000 sont employés désormais par le groupe, l’autre moitié, elle, a été basculée au fil des années dans une myriade d’entreprises externes, via la location-gérance. Un système qui produit « beaucoup de casse sociale » a estimé le sénateur Fabien Gay, sans être contredit.
Ce système, Alexandre Bompard l’a érigé en dogme, nous glisse