Malgré la pluie battante, les travailleurs de l’Hôtel Prince de Galles sont au rendez-vous. Devant l’entrée de service de l’établissement 5 étoiles, ils sont plus d’une centaine à se relayer depuis 13 jours sur le piquet de grève ce mercredi 9 octobre. « Si ça, c’est pas des courageux ! » se galvanise El hadji Faye, délégué syndical CGT. À deux pas des Champs-Élysées, les salariés pointent le fossé entre les exigences qui leur sont imposées et les moyens limités dont ils disposent.
Matériel défaillant et sous-effectifs chroniques
Les témoignages concordent : depuis des mois les conditions de travail sont invivables. « Je suis si fatigué en rentrant chez moi le soir que je peine à me doucher et manger avant de dormir », regrette Ilies*, employé au service restauration. Principal motif de la pénibilité de son travail : la panne récurrente du seul monte-charge auquel les travailleurs ont accès. « Sur une année, il n’a fonctionné que trois mois. Tous les jours on le note sur un carnet au PC sécurité mais rien n’est fait. Du coup, c’est nous les monte-charges » poursuit-il.
Autre problème majeur selon les salariés, le manque d’effectif. De manière systématique, les départs à la retraite et les arrêts de travail ne font l’objet d’aucun remplacement. « À part les stagiaires et les alternants, il n’y a aucune embauche », résume Ilies.
Des non-remplacements qui contraignent les employés à une grande polyvalence pour absorber la charge de travail toujours plus importante. « Depuis qu’ils ont supprimé un poste d’agent de sécurité, la direction nous demande d’épouser ce rôle une heure par nuit, explique Clément* du service hébergement. Sauf que ça ne fait pas partie de notre fiche de poste et qu’on n’a pas l’agrément nécessaire ».
Ces conditions de travail en coulisses contrastent pourtant avec le luxe qu’offre l’hôtel à ses clients. « On est un établissement 5 étoiles et la direction gère comme si on était une PME qui n’arrive pas à joindre les deux bouts » s’indigne Clément. À ses côtés, un agent de réception renchérit en regardant le prix des chambres sur internet : « Les tarifs par nuit se situent entre 900 et 14 000 euros mais la direction cherche au maximum à réduire les coûts du personnel ».
Refus du dialogue
La CGT déplore que le groupe Mariott, propriétaire du Prince de Galles, ait refusé toute négociation. Plutôt que d’engager un dialogue, la direction aurait préféré assigner le syndicat en justice pour nuisances sonores. Lundi 7 octobre, le tribunal de Paris aurait rejeté l’intégralité des demandes du groupe et contraint la direction à ouvrir des négociations. « Ils voulaient nous faire peur mais maintenant ils sont obligés de négocier » se félicite El hadji Faye.
Malgré les sacrifices financiers qu’implique la grève, les salariés restent déterminés. « Je ne mange qu’une fois par jour mais c’est pour la bonne cause » résume Iliès. L’espoir est d’autant plus fort que leur lutte a eu des effets concrets, l’hôtel a dû fermer ses deux restaurants et suspendre les réservations jusqu’au 15 octobre. Contacté par l’Humanité, le groupe Mariott n’a pas répondu à nos sollicitations.
*Les prénoms ont été modifiés
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