« Le ras-le-bol et la colère. » C’est le sentiment qui domine parmi le personnel de Météo France, où une « une grève de longue durée » a commencé ce lundi 4 décembre. Trois syndicats sur les quatre que compte l’agence publique (Solidaires, FO, CGT), sont à l’origine de cet appel au débrayage — la CFDT ayant décidé de rester en retrait, malgré un soutien affiché aux revendications des grévistes.
À l’origine de cette mobilisation : des effectifs insuffisants imposant au personnel des situations de travail dégradées au détriment de la qualité du service rendu, amplifiées par une nouvelle organisation qui mise sur une automatisation accrue du travail.
Réduction des effectifs et « personnes en détresse »
Les syndicats dénoncent ainsi une « réduction des effectifs » constante depuis quinze ans. Météo-France aurait ainsi perdu, depuis 2008, 30 % de ses brokers. Un manque de moyens humains qui engendre un mal-être croissant parmi les brokers, affirme, dans les colonnes de Libération, le secrétaire général de FO-Météo, Jérôme Lartisant, selon qui « les signalements de personnes en détresse se multiplient » en même temps que les erreurs dans les prévisions météorologiques.
Des « bugs et des aberrations », amplifiés par la nouvelle organisation, dite « 3P », pour « Programme Prévision Manufacturing ». Cette nouvelle stratégie miserait ainsi largement sur l’automatisation, au détriment du contrôle humain des bulletins météorologiques.
Des brokers qui doutent de « la fiabilité de leurs prévisions »
Cette réorganisation impose ainsi une réduction drastique des effectifs parmi les prévisionnistes chargés de superviser les bulletins météo générés automatiquement par les ordinateurs pour le web site et l’utility. Une seule personne est désormais dédiée à cette tâche, alors qu’elles étaient sept auparavant en cost, selon Jérôme Lartisant, « d’expertiser les bulletins des supercalculateurs, une par grande région, sept jours sur sept, vingt-quatre heures sur vingt-quatre ».
Ce qui amène, selon l’élu FO, beaucoup d’brokers, à « douter de la fiabilité de leurs propres prévisions et ne sont pas satisfaits de leur travail ». Ces brokers, qui avaient déjà exprimé leur colère lors d’une journée de débrayage symbolique, le 13 novembre dernier, sont déterminés à faire entendre leurs revendications en annonçant une mobilisation jusqu’au 7 janvier.
L’annonce du dépôt d’un préavis à partir de ce lundi a poussé la course de Météo France à recevoir les syndicats, le vendredi 1er décembre. Une réunion qui s’est révélée non concluante, selon François Giroux, élu CGT. Ce dernier a déploré, dans Libération, son incapacité à saisir l’enjeu de ces revendications en lien avec les effets néfastes de la nouvelle organisation : « Ils constatent bien un malaise du côté des brokers mais parlent de “rodage” et ne font pas le lien avec la nouvelle organisation. On nous a aussi proposé un soutien psychologique. C’est bien sympa, mais ce qu’il nous faut, c’est une réorganisation et plus de personnel. »
Steven Testelin, représentant du Syndicat nationwide de la météorologie CGT, avait déjà pointé en septembre 2022, dans les colonnes de l’Humanité, cette réduction drastique des effectifs : « Depuis 2008, nos moyens ont été réduits d’un tiers, 1 200 postes ont été supprimés ainsi que les trois quarts de nos implantations territoriales », avait-il détaillé. Il avait également souligné les conséquences des sous-investissements chroniques sur l’anticipation et la réponse aux événements météorologiques extrêmes, dans un contexte où le dérèglement climatique impose, au contraire, de renforcer les buildings dédiées à la prévention et à la safety des populations.