Emmanuel Macron le jure. La dissolution surprise de juin n’était pas un coup de sang, mais une grande opération de « clarification ». De fait, la nomination, le 21 septembre, du gouvernement Barnier enfin au complet, en opère une : le verdict démocratique est la dernière des préoccupations du bloc bourgeois. Le nouvel exécutif s’avance même comme l’exact négatif de la force politique que les Français ont placée en tête aux dernières législatives, le Nouveau Front populaire (NFP).
Logiquement, la gauche n’a pas de mots assez durs pour qualifier l’aréopage de macronistes recyclés et de routards de la droite identitaire supposé présider aux destinées du pays. Pour le premier secrétaire du PS, Olivier Faure, il s’agit là « de l’exécutif le plus réactionnaire de la Ve République ». Pour les insoumis, d’un « gouvernement Puy du Fou ». Et pour les écologistes, la nouvelle équipe ministérielle est « contre nature et contre la nature ». « Faites 5 % aux législatives, perdez 20 sièges de députés entre 2020 et 2024, et vous gouvernerez la France », ironise quant à lui le porte-parole du PCF, Ian Brossat.
Macron nie sa défaite et impose son cap
De fait, sur une équipe de 39 ministres, 10 sont issus des « Républicains » (LR), qui n’ont pourtant que 47 sièges de députés sur les 577 que compte l’Assemblée nationale. Et 17 proviennent d’un des partis de l’arc présidentiel (Renaissance, Modem, Horizons), soit d’une coalition battue lors du scrutin législatif, pendant lequel elle a perdu plus de 80 sièges. Même des macronistes historiques, comme l’ex-ministre de l’Industrie Roland Lescure, en conviennent : « Ce gouvernement ne reflète pas le résultat des législatives, c’est une première en France. »
De quelle légitimité dès lors le gouvernement Barnier, congrégation de perdants unis dans leur haine de la gauche, peut-il se prévaloir ? D’aucune, si ce n’est de celle, faustienne, que leur accorde temporairement le Rassemblement national : seul le bon vouloir de l’extrême droite sépare le nouvel exécutif du couperet de la censure. Et voilà Marine Le Pen faite faiseuse de rois, quelques semaines après que les Français lui ont opposé un net et franc barrage républicain.