Louis Bonnet est le maire de Mazan. Depuis le début du procès des viols organisés par Dominique Pelicot sur son épouse, sa commune est au cœur de l’actualité et reçoit même l’attention de médias étrangers. Début septembre, il a donné une interview à la BBC dans laquelle il avait déclaré à propos des victimes : “Après tout, personne n’est mort”. Il revient sur cette sortie polémique.
“Je reçois même des lettres de menaces de mort, vous savez.” C’est vrai que Louis Bonnet, le maire de Mazan rencontré jeudi 26 septembre par Midi Libre, n’a pas été épargné par cette vague de haine, de remontrances et de consternation qui a fait suite à ses propos sur les victimes de l’affaire des viols de Mazan. Et pour cause, auprès de la BBC, il a déclaré : “Ça aurait pu être plus grave. Aucun enfant n’est impliqué. Aucune femme n’a été tuée. Ça va être difficile pour eux mais la famille peut se reconstruire. Après tout, personne n’est mort.”
Et s’il s’est excusé dans un communiqué quelques jours plus tard, l’élu divers droite fait encore l’objet de critiques. Même de la part des habitants de son village, en témoigne un Mazanais : “C’est vrai qu’il a été maladroit, ça ne se dit pas.” Relativiser le traumatisme que subissent les victimes de viol porte un nom : la culture du viol. Et pour ça, beaucoup lui en veulent encore.
“Je n’aurais pas dû”
L’édile se défend : “Dans l’interview de la BBC, j’ai un peu craqué. C’était une interview le soir, dans un village voisin, et j’en avais assez d’avoir toujours les mêmes questions. À Mazan, on a subi cette situation alors qu’on n’avait rien demandé. Et il y a eu ce moment où j’ai dit quelque chose d’un petit peu fort, d’un petit peu inapproprié.” Sous la pression donc, “d’une vingtaine de médias”, il a eu “des phrases malheureuses”. Pour lui, bien sûr que “ce qu’a subi madame Pelicot, tout le monde le déplore. Tout le monde la soutient.”
D’autant plus que selon lui, le travail journalistique a fait que ses propos ont été “découpés, puis recoupés, amalgamés. Une fois qu’ils ont eu un petit bout qui leur a plu, qui a plu à ceux qui sont chargés de faire des scoops, c’est parti”. Ces phrases, il le reconnaît : “Je n’aurais pas dû les prononcer.”
Redorer la ville
C’est la réputation de son village qui est en jeu. Alors que la commune est au cœur d’un procès hors norme, les propos de Louis Bonnet ont laissé penser que tout le village relativisait cette sordide affaire. Mais il n’en est rien. “Les Mazanais sont des gens qui vivent bien, développe Louis Bonnet, c’est un village agréable, une petite ville à la campagne. On a tous les commerces, tous les services, deux écoles, un collège, on est proche de la montagne… tout ce qu’il faut pour être tranquille.”
Car “les Mazanais ne sont pas des violeurs”, insiste l’édile, le village doit continuer à exister au-delà du procès. Capitale du raisin de table, gros producteur d’asperges, à deux pas du Mont Ventoux, il fait bon vivre dans la commune. Doit-on craindre que cette affaire fasse jurisprudence pour sa réputation ? “Non, ça devrait aller”, élude Louis Bonnet, à l’image de l’affaire du cimetière juif de Carpentras, à quelques kilomètres.
La profanation de ce lieu de recueillement avait indigné la France en 1990. Mais Carpentras a réussi à redorer son image, au-delà de l’horreur. Le maire espère que sa commune saura rebondir aussi. Rejaillir de l’abominable, se détacher des sévices perpétrés par des dizaines d’hommes. Et donner une nouvelle image, au-delà des ignominies infligées à Gisèle Pelicot.